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09/08/2007

Le jésuite et le chirurgien.

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J’ai examiné un père jésuite aujourd’hui (AMDG...).

Il doit sortir demain après 3 semaines de rééducation dans les suites d’une chirurgie mitrale un peu délicate, réalisée dans un contexte qui ne l’était pas moins.

Il m’a raconté avoir revu le chirurgien qui l’avait brillamment opéré, et que ce dernier était ravi de sa bonne évolution.

Le bon père lui a alors sorti un psaume qui l’a laissé sur place :

« C'est avec toi que je saute le fossé, avec mon Dieu que je franchis la muraille. » (TOB)

 

Ce psaume (Ps 18 :30) n’est pas très facile à ressortir, mais j’imagine bien l’effet qu’il a pu produire, connaissant bien le chirurgien.

Ah bon, je vous ai fait franchir une muraille ?

08/08/2007

Les gazelles.

Je vois de plus en plus de gazelles à ma consultation.

 

Comment les définirais-je ?

25-30 ans, origine maghrébine, nées en France, et totalement « fashion-victims ».

Elles sont souvent minces et grandes, et d’une beauté particulièrement recherchée. Pantalon serré, laissant apparaître la dentelle d’une petite culotte, chaussures pointues et à talons hauts, portable noir à la main, ou se balançant autour du cou, petit haut translucide ou permissif, leurs vêtements sont assez souvent stéréotypés.

Elles font souvent une entrée remarquée dans ma médiocre salle de consultation,  ou tout du moins remarquée par les patients qui ne sont pas déments.

Elles y côtoient souvent ma clientèle habituelle.

Notamment la dame maghrébine elle aussi, mais diabétique et obèse, 50 ou 60 ans mais qui en fait 20 de plus, voilée de noir, beige ou bleu marine, mais toujours uni et de pied en cap, sauf le visage ; et dont la vie a été, est et sera bouffée par un grand nombre d’enfants et un mari âgé, malade et exigeant. Parfois infidèle, en plus.

Bien évidemment, ces dernières sont souvent les mères des premières.

 

Je pourrais faire une note complète sur ces femmes, leur gentillesse, leur visage doux et résigné, leur rire quand je tente 2-3 mots en arabe ou en berbère, leurs grigris qu’elles portent contre la peau, leurs tatouages et scarifications souvent faits dans leur enfance pour les guérir de je ne sais quels maux, et leurs dizaines de jupons et de sous tuniques.

Mais aujourd’hui, ce n’est pas le sujet.

 

Le motif de consultation des gazelles est assez constant : palpitations, malaises, ou les deux.

 

La semaine dernière première gazelle.

25 ans, très volubile et un peu agitée.

Elle a des palpitations quand elle boit du café et fume.

Et bien arrêtez !

Non, ça aurait été trop simple.

Trop de stress, trop de pression, il faut qu’elle continue.

D’ailleurs, pour que je constate ses palpitations, elle a bu un expresso et a fumé une cigarette juste avant de rentrer dans l’hôpital. Ca marche toujours, c’est immanquable.

Malheureusement, rien sur le tracé et à l’examen.

Comme j’étais d’une humeur badine, je lui ai proposé d’aller se reprendre un expresso et de se refaire une clope avant de remonter me voir en prenant les escaliers.

J’aime bien prendre la place du démon, parfois.

 

Elle arrive encore plus excitée qu’avant (normal) et me tend son poignet : « Je le sens, vous aussi ? ».

Je la fait rentrer, l’ausculte et fait un tracé : je ne vois rien.

Elle convient toutefois, que ce n’était pas aussi fort qu’avant.

Je lui programme un holter qui sera probablement normal, mais qui la rassurera.

 

Aujourd’hui, gazelle numéro 2, accompagnée par sa cousine, une gazelle numéro 3.

Elle vient pour…

Malaises.

Elle a déjà fait part de son choix d’examens paracliniques auprès de mon infirmière : holter ECG, échographie cardiaque, bilan biologique…

 

Je commence à l’interroger.

Ca dure depuis un an (je suis déjà rassuré), elle perd parfois connaissance mais la durée de ses malaises lui laissent heureusement le temps de se rendre à l’Hôpital voisin pour finalement syncoper dans les bras d’une infirmière.

Ce ne sont donc pas des malaises à l’emporte-pièce, c’est le moins que l’on puisse dire.

Je l’interroge 10 minutes, sans vraiment arriver à trouver une nosologie convenable.

Ca ressemble vaguement à des malaises vagaux. Vaguement.

Je poursuis : tabac, oui, alcool et café, pas demandé, drogue, oui (Cannabis occasionnel et quelques rails de coke il y a un an).

Pas de quoi fouetter un chat, semble-t-elle me dire.

Je la fais se dévêtir « en haut », ce qui prend 0.7seconde et je remarque alors ses prothèses mammaires.

Elles sont proprement démesurées sur une jeune femme mince et grande. Elle vient juste de se faire opérer dans une clinique de la région.

Quand elle s’allonge, ses tétons ne sont pas loin d’être au niveau du bout de son nez.

Je déteste ces prothèses, même de taille raisonnable.

D’abord par goût personnel, et aussi car elles rendent aveugle la fenêtre apicale en échographie cardiaque trans-thoracique. Je pense que c’est dû à un phénomène de reflexion/réfraction des ultra-sons, mais quelque soit la position de la sonde, même à distance de la prothèse, on ne voit strictement rien à part un grand vide échographique.

Je me souviens d’une patiente déjà plus toute jeune qui était effrayée que je puisse raconter « son secret », que j’avais découvert au cours d’une échographie. D’abord, le raconter à qui, étant donné qu'elle était venue seule ? Je ne lui ai pas demandé. Et ensuite, elle devait imager que ses proches et ses médecins étaient persuadés que ses magnifiques seins étaient doués de propriété antigravitationnelle.

 

Je demande ensuite à ma gazelle si elle est née là-bas ou en France. En France, bien…

Ne voyez pas là un relent de nationalisme identitaire (que j’exècre), mais plutôt un moyen élégant de se rassurer (ou de s’inquiéter) sur la présence d’un toujours possible rhumatisme articulaire aigu.

Alors que je l’examine, ce qui n’est pas totalement désagréable lorsque ses seins inhumains sortent de mon champ de vision, je me dis que ce serait bien qu’elle fasse un malaise.

Le miracle eut lieu : elle voulu bien me donner ce que la jeune femme de la semaine d’avant m’avait refusé, une magnifique scène clinique « comme à la maison ».

L’examen est resté normal, de même que l’ECG. La patiente s'est heureusement remise assez rapidement.

La cousine me dit alors que c’est parce qu’elle retient trop de choses en elle, et qu’elle n’extériorise qu'occasionnellement l'ensemble de ses problèmes que sous cette forme. Je pousse un « ummpffpeutêtrepourquoipas » poli mais qui n’engage à rien. Encore une qui a trop lu Biba Magazine.

Ce malaise bien opportun m’a évité d’avoir à programmer tout un bilan cardiovasculaire.

Je rédige alors un petit courrier circonstancié à son généraliste.

02/08/2007

Hokusai ou soin de suite et rééducation ?

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J’ai donc donné le bouquin promis à la petite dame insuffisante respiratoire adepte d’ikebana.

A notre première rencontre, elle m’avait dit que son fils quinquagénaire était adepte d’estampes japonaises.

A bon, ça tombe bien, j’aime bien Hokusai !

Hier, nous rediscutons un peu de son insuffisance respiratoire que je soupçonne d’être grave, puisqu’elle respire à lèvres pincées, alors que son seul effort est de parler.

Ses enfants, un homme et une femme entrent.

Rapides présentations : « Tu sais, c’est le médecin dont je t’ai parlé ».

La femme est effacée, elle restera quasiment muette au cours de l'entretien. Ses vêtements sont une déclinaison de gris.

L’homme est habillé de noir de pied en cap. Et cela littéralement puisque ses cheveux sont teints couleur « aile de corbeau ».

En fait, c’est surtout son attitude que je remarque, il est la caricature de la grande folle de type nigrum. Etouffant vis-à-vis de sa mère, voix haut perchée et chantante, gestes raffinés, tout y est. Je me suis contenté de discuter avec lui du devenir de sa mère.

Laissons donc de côté le sujet au combien intéressant mais potentiellement glissant des estampes japonaises, notamment des shunga.