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16/04/2008

Big Pharma.

Encore deux histoires intéressantes dans le New York Times.

 

La première relate le parcours de trois « leaders d’opinion » qui ont décidé dorénavant  pour des considérations éthiques de refuser tout paiement de la part de l’industrie pharmaceutique.

Parmi eux, il y a même un cardiologue, c’est dire que c’est un évènement !

J’espère que ce n’est que le début d’une très longue liste.

 

J’admire bon nombre de mes confrères. Comment font-ils pour tenir leur stylo publicitaire lorsqu’ils rédigent une ordonnance, la patte graissée, tout en regardant leurs patients droit dans les yeux ?

Quelle dextérité !

 

La seconde histoire raconte comment un laboratoire a mené et entièrement rédigé des dizaines d’articles concernant son coxib. Il suffisait ensuite simplement de les envoyer à des « leaders d’opinion » pour que ceux-ci complètent les pointillés avec leur nom:

 

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Et hop, à la publication, sans bien-sûr le dire dans l’article.

 

Ce système de « Ghostwriting » (dont j’ai brièvement parlé ici) est idéal pour tout le monde : le laboratoire contrôle parfaitement l’essai, sans s’embarrasser de scientifiques parfois scrupuleux, et le leader d’opinion rajoute une belle référence sur son CV, sans le moindre effort.

Et le patient dans tout ça ?

Le quoi ? L’actionnaire vous voulez dire ?

 

Le NYT a même la gentillesse de donner un lien direct vers l’article intégral du JAMA.

 

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Citing Ethics, Some Doctors Are Rejecting Industry Pay

By Gina Kolata

The New York Times

Published: April 15, 2008

 

Merck Wrote Drug Studies for Doctors

By Stephanie Saul

The New York Times

Published: April 16, 2008

 

Ross JS, Hill KP, Egilman DS, Krumholz. Guest Authorship and Ghostwriting in Publications Related to Rofecoxib. A Case Study of Industry Documents From Rofecoxib Litigation. JAMA. 2008;299(15):1800-1812

 

05/04/2008

Les études de marché.

J’aime bien faire des études de marché pour les firmes pharmaceutiques.

Et ça tombe bien, il y en a de plus en plus.

En général, l’industriel confie la réalisation de ces études à des prestataires français ou étrangers, connus (l’un d’eux est une filiale d’un célèbre organisme de sondages) ou non.

J’observe depuis 6 ans une multiplication de ces prestataires de service qui forment maintenant une véritable petite industrie, probablement très rentable.

Rentable, d’autant plus que la plupart de ces études se font maintenant sur Internet, pour un coût dérisoire.

Les questions sont toujours les mêmes.

« Si un nouveau produit X sortait avec telle ou telle caractéristique, le prescririez-vous ? »

« Si le produit Y était génériqué, le prescririez-vous ? »

« Quelle est le meilleur texte promotionnel parmi les suivants ? »

Ces questions sont intéressantes, car elles traduisent les angoisses profondes de l’industrie pharmaceutique.

Parfois, en cherchant un peu sur Internet à côté, on peut savoir ce que va être ce fameux « produit X » qui sera bientôt commercialisé.

On arrive aussi à savoir quel produit « blockbuster » va bientôt être déremboursé, ou quel produit de la concurrence fait peur au probable commanditaire de l’étude. En effet, bien que toujours anonyme, on arrive assez facilement à le démasquer en analysant un peu les questions.

Je vous avais aussi raconté la soirée que j’avais passée et où on nous avait interrogé ce qui est devenu le rimonabant.

Cette soirée m’avait ouvert les yeux sur le battage publicitaire qui a été fait ensuite, pour finalement aboutir à un gigantesque flop.

Bien sûr, en dehors de cette fenêtre ouverte sur l’inconscient des firmes pharmaceutiques, ces études sont aussi très bien rémunérées.

En dessous de 50 euros, je ne réponds même pas. En général la rémunération tourne autour de 75-120 euros pour un questionnaire de 45 minutes.

Le fin du fin est la rémunération sous forme de chèque-cadeaux Amazon, car dans ce cas, en plus, cerise sur le gâteau, c’est net d’impôts.

Je me suis ainsi constitué une belle bibliothèque grâce à ce système.

Bon, les questionnaires sont un peu fastidieux et parfois les questions, mal traduites de l’anglais sont curieuses. Mais je les complète souvent un peu au hasard lorsque j’en ai assez de réfléchir, ce qui finalement arrive assez rapidement. J’ai même un collègue qui les fait remplir par son fils de 7 ans et sa femme.

Deux petits écueils pour avoir accès à cette manne : avoir une relation appartenant à ce milieu des sociétés prestataires de ces études, et avoir le profil recherché.

Une fois que votre relation vous a mis le pied à l'étrier en vous faisant connaitre par un ou plusieurs prestataires, les études vont commencer à affluer dans votre boite mail.

La prolifération des études sur Internet gomme un peu le premier obstacle. Il existe même des sites ou n’importe quel médecin peut s’enregistrer afin de participer à des études futures.

Avoir le profil exact recherché est un peu plus difficile.

Etre spécialiste dans un domaine ou l’industrie gagne beaucoup d’argent et où la concurrence est féroce (par exemple en cardiologie !) aide beaucoup.

Ensuite, il faut répondre à une dizaine de questions préliminaires afin de préciser si vous correspondez bien au profil demandé.

A la moindre erreur, vous êtes éjectés.

Donc prudence dans vos réponses, sinon "adieu veaux, vaches, cochons et bons d’achat » !

Et encore, là aussi, il y a moyen de moyenner.

Je me suis fait récemment éjecter d’une étude. J’ai passé un coup de fil, et dans la soirée, j’avais un nouvel accès au site web et surtout les réponses à donner au questionnaire initial, envoyées par le prestataire lui-même.

Une firme pharmaceutique fait un gros chèque pour interroger 100 médecins. Si le prestataire ne les a pas à l'approche de la date limite, il devient bien moins regardant…

J’avoue que répondre de façon plus ou moins aléatoire à un questionnaire grassement rémunéré et censé mieux faire vendre des médicaments à l’industrie pharmaceutique me procure un plaisir intense.

Bon, quel bouquin je vais bien pouvoir choisir sur Amazon ?

Et pourquoi pas l’intégrale de « Calvin et Hobbes » qui me fait tant envie ?

30/03/2008

La mondialisation (2).

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 Crédit: Ariana Lindquist for The New York Times

Qu’est-ce c’est ?

(Réponse à la fin de la note).

La mondialisation a des conséquences même dans l’univers très aseptisé et contrôlé de l’industrie pharmaceutique.

Je vous avais déjà raconté les problèmes rencontrés par Baxter aux Etats-Unis et Rotex Medica en Allemagne au sujet de l’héparine.

Le composant non identifié a fini par l’être. Il s’agit d’un glycosaminoglycane, très proche chimiquement de l’héparine.

Par contre, on ne sait toujours pas si cette substance a été utilisée par erreur par négligence, ou sciemment comme une contrefaçon de l’héparine.

En tout cas, cette histoire a permis de prendre conscience d’un des effets pervers de la mondialisation, une portion de plus en plus importante du processus de fabrication de certains médicaments échappe complètement au contrôle des laboratoires pharmaceutiques et des autorités de régulation de nos pays.

Sur les quelques 500 unités de production chinoises travaillant pour l’industrie pharmaceutique américaine, seules 13 ont été inspectées l’an dernier.

Il reste encore donc beaucoup de travail.

 

 

 

 

 

 

 

Réponse : il s’agit d’un atelier familial situé dans le village de Xinwangzhuang, qui assure les premières opérations qui conduisent à la fabrication de l’héparine.

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The Drug Scare That Exposed a World of Hurt

By WALT BOGDANICH

The New York Times

Published: March 30, 2008

Sue Hughes. Heparin contaminant identified . theheart.org. [HeartWire > Acute coronary syndromes]; March 19, 2008. Accessed at http://www.theheart.org/article/848329.do on Mar 30, 2008.