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15/05/2005

Zanzibar

medium_porte.jpgZanzibar est ailleurs, nulle part et partout, maintenant, et avant, dans le passé.
Zanzibar est un mélange d’influences africaines (ethnie Bantou), arabes (yéménites), indiennes (les portes) et européennes (un fort portugais du XVIème, et une église édifiée par des pères blancs marseillais au XIXème), il y a aussi des cafés Internet, des matatus, des carrioles tirées par des ânes efflanqués.

Nous y sommes allé début 2001, avant que les appels des Muezzins distillent autre chose que la sérénité, et le dépaysement.
Que dire ?
Stonetown est une ville blanche, triangulaire, aux milles méandres et reflets, enchâssée dans une gangue de verdure, et, malheureusement, de quartiers dortoirs, d’inspiration est-allemande.
Les rues sont petites, blanches, toujours traversées d’éclairs enfantins, et de femmes voilées. Seuls les hommes ne bougent pas dans ce pays, hiératiques et fiers, mâchant sans fin (et sans faim) leurs feuilles de bethel et de kath.
La pauvreté est omniprésente, dans cette ville aux milles joyaux architecturaux.
Les chats ont la face mangée par la leishmaniose.
Les épices, leurs couleurs et odeurs chaudes sont, elles aussi omniprésentes : vanille, poivre, clous de girofle, cannelle…
Nous avons fait le « spice tour », bien sûr, passage obligé de tout visiteur.
Comment y échapper d’ailleurs, des rabatteurs vous propose leurs « spice tour » à tous les coins de rue : « The best, very good… ».
Comment décrire nos ballades vespérales, sous le soleil couchant, nos pas rythmés par l’appel à la prière, admirant des portes centenaires, émergeant d’amas de décombres et d’ordures, le nez en l’air, empli d’odeurs d’épices, et de vent de mer.

Sally et moi avons aussi visité l’Hôpital de Stonetown, avec comme accompagnants, l’équivalent de l’Infirmier Général, et une infirmière. C’est un immense bâtiment, avec une cour centrale, sans aucun matériel moderne, hormis un scope assez inattendu dans de rustiques soins intensifs. A quoi sert ce scope ?
Troubles conductifs cardiaques ?
Question stupide, ici, les habitants ne vivent pas assez longtemps pour que leur système conductif dégénère (âge moyen de décès: 45.24 ans).
C’est pour surveiller les effets pro-arythmiques de la quinine IV.
« What are the main diseases here ?
- Only one : 99% malaria, few tuberculosis, and trauma. »
- And AIDS ?
- Very few »

[dit l’infirmière, le regard fuyant vers un point de l’espace sans intérêt]

Le paludisme est omniprésent, il fauche une partie de la population à chaque mousson.
Un homme titube, épaulé de part et d’autre par deux infirmiers.
A mon interrogation, elle répond :
« Neuromalaria ».
J’aurais dû m’en douter, ce sera probablement le seul neuropaludisme que je verrai au cours de ma carrière. Son sort est déjà scellé, mais le patient ne le sait pas, ne peut plus le savoir.

Quand au SIDA, autre calamité, silence radio, le mot est tabou.
Pour donner une idée d’une catastrophe que nous ne voyons que de nos yeux d’européens nantis, les entreprises occidentales ont fait des tests de dépistage systématiques à leurs employés kenyans (Nous avons changé de pays, mais pas de drame).
Dans ces couches assez privilégiées, la fréquence de séropositifs atteint 45%.
Bien evidemment, aucun traitement disponible.
Des villages entiers, des régions entières sont rayés des cartes humaines par ce fléau, dans les zones bordant le Lac Victoria.
L'âge moyen de décès au Kenya est de 47.99 ans.

Bon alors, on travaille ou pas ce lundi ?
Beati pauperes spiritu.

11:45 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (2)