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14/07/2008

France 1998.

La TNT, c’est vraiment génial. Je ne sais pas comment j’ai pu m’en passer jusque là.

Je suis tombé par hasard sur la fin de la rediffusion de la finale France-Brésil de 1998.

L’un des commentateurs était Bernard Lama.

Vous imaginez bien l’absence totale de ferveur des commentaires d’un match joué il y a déjà 10 ans.

Et bien essayez d’imaginer ce que cela donne quand ils sont faits par un ancien footballeur qui n’a rien fait depuis, et qui n’a pas touché le ballon une seule fois au cours du tournoi !

C’était donc un grand moment de télévision qui m’a quand même rappelé de bons souvenirs.

J’étais alors l’interne de cardio de garde dans un hôpital périphérique.

Je n’ai que des fragments de souvenirs.

Un infirmier avec le visage bariolé de bleu de blanc et de rouge, une soirée chaude et parfaitement silencieuse, pas un seul coup de fil. Comme quoi l’urgence, même cardiologique est très largement influencée par ce qui se passe à la télé.

J’ai loupé l’intégralité de la première mi-temps, que j’ai passée avec Sally dans sa voiture tout au fond du parking de l’Hôpital, sous les arbres, juste à côté de la reprographie.

Son mari et sa belle famille étaient rivés devant leur petit écran.

Merci Aimé Jacquet.

Une fois repartie, je suis allé à l’internat pour manger un peu.

L’ensemble des médecins de garde et notamment tous les urgentistes étaient assis dans les fauteuils de l’internat. Assis n’est pas vraiment le terme. Imaginez un groupe de cocaïnomanes munis de pailles de diamètre XXL, devant une montagne de poudre

Je regarde le but de Petit et regagne tranquillement mon service.

La ville rugit, l’infirmier qui a regardé le match dans une chambre vide est totalement hystérique.

Coup de téléphone, c’est Sally qui me propose de revenir.

L’infirmier me demande qui est au bout du fil, craignant une entrée. Je lui réponds que c’est Sally. Elle se met à me traiter de tous les noms au bout du fil, notre liaison devant être par définition discrète. Et cet infirmier en particulier est une redoutable pipelette. Je ne suis pas inquiet, je suis certain que l’info, pourtant bien croustillante n’est pas arrivée à son cortex inondé de bleu, blanc et rouge. L’avenir m’a donné raison, car à la fin de mon choix, personne ne savait.

J’accueille Sally comme il se doit dans la chambre de garde.

Son mari, sa belle famille, et toutes mes urgences potentielles sont partis faire la nouba en ville jusqu'au petit jour.

Merci Aimé Jacquet.

01/12/2007

Fantôme.

Internet est vraiment un univers inattendu, on y trouve même des fantômes.

 

Je naviguais sans réel but quand je suis tombé sur le site d’un élève de mon ancien lycée.

Cet élève qui est bien postérieur à mon époque a mis en ligne quelques photos de profs.

Je suis presque tombé de mon siège en revoyant mon prof d’histoire sur un cliché daté de 2002, un enseignant qui a marqué tous ceux qui ont eu la chance de faire partie de sa classe. Un type brillant, drôle, sensible, volontiers iconoclaste. Ce lycée était privé et dirigé par un Père. Vous imaginez donc que la moindre parcelle de liberté et de fantaisie prenait à nos yeux un éclat incomparable. Ses heures de cours étaient un délice.

Par ailleurs, il était malade, très malade, ce qui entretenait encore l’épaisseur de la nuée mystérieuse qui l’entourait.

En fait il était dialysé chronique, mais pour nous, adolescents, ce terme n’évoquait rien de bien précis.

Je ne l’ai pas reconnu d’emblée car il avait pris 12 ans.

Mais ce qui m’a le plus marqué c’est qu’un ancien condisciple m’avait confirmé son décès il y a quelques années (2003-2005, il ne savait plus trop).

 

Une photo d’outre tombe.

Paix à ton âme, Gabriel.

22:51 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (1)

04/08/2007

Vulnerant omnes, ultima necat.

Hier soir, je discutais de la mort avec une famille. Une dame hospitalisée à la clinique et fragile psychologiquement est en train de perdre une de ses filles d’une pathologie en phase terminale. La seconde fille, elle aussi fragile, n’a pas vraiment prévenu sa mère de la gravité actuelle de la situation. Elle  me demandait alors ce que j’en pensais, et notamment nous parlions du pronostic, de l’heure de la fin que fixent parfois les médecins. Je lui dis que cet exercice s’apparentait parfois plus à la prédiction qu’à la science médicale et lui ai raconté l’histoire de mon grand-père paternel.

Les fins de journées, lorsque le soleil décline, surtout en fin de semaine sont souvent favorables à ce genre d’épanchements.

Mon grand-père tenait une fromagerie dans l’Ain. Il aimait beaucoup le fromage, et en mangeait bien évidemment toute la journée. Son poids dépassait largement le quintal. Il a  travaillé toute sa vie du lever au coucher du soleil, à retourner des fromages de 70 Kgs pour les faire affiner, puis à les vendre. Travailleur acharné, autodidacte, ses idées et ses valeurs étaient droites, bien arrêtées, et ne souffraient aucune contestation de la part du destin ou des êtres humains. Il ne faisait pas confiance aux banques et cachait son magot (qui était considérable) dans un coucou suisse ou une vieille chouette empaillée (je ne me souviens plus).

Il a perdu sa jeune femme (ma grand-mère) peu après la guerre d’un cancer digestif délabrant et atrocement douloureux. Malgré ce drame qui a toujours jeté un linceul sur sa vie, il continuait toujours à faire mécaniquement le signe de croix au couteau sur le pain avant de le trancher. Il s’est remarié peu après, avec une femme, qui sous l’action du fromage toujours à portée de main a elle aussi largement dépassé le quintal. Je me souviens qu’il y avait toujours une odeur aigrelette de fermentation lactique qui flottait chez eux.

Un beau jour, dans les années 70-80 (je ne m’en souviens plus, non plus), on lui annonce qu’il a un cancer du poumon à petites cellules (il fumait beaucoup entre deux morceaux de Comté) et qu’il en avait pour 6 mois, pas plus. Il perd ses cheveux en cours de chimiothérapie et décide de se faire faire une pierre tombale.

Il choisit consciencieusement la pierre et son emplacement, dans le cimetière du village, avec vue sur un hameau proche qu’il affectionnait particulièrement. Une fois la pierre confectionnée, il a pris l’habitude de se coucher dessus régulièrement, accompagné de son chien à trois pattes (une patte perdue à la suite d’un accident de voiture), « pour voir ce que cela faisait ». Le rituel a duré des jours, des semaines, puis des mois, puis la mort ne voulant pas de lui, mon grand-père s’est lassé.

Il est mort 11 ans plus tard, on ne sait pas trop de quoi.

11:05 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (0)

25/12/2006

Amphi Hermann

Petit pincement au cœur (et aussi grande  joie) en retrouvant ma fac et mon amphi de P1 dans ces vidéos retrouvées sur Youtube.

Rien n’a changé en 17 ans (gloupps…). Notamment les casquettes des santards sur le bureau du prof (deuxième vidéo) et bien sûr l'ambiance!

 








Une petite dernière ici.

 

20:35 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (5)

18/08/2006

Le sac moutarde.

medium_logo_fnac.com.jpgAprès ma journée à la clinique, j’ai visité une FNAC qui venait assez récemment d’ouvrir dans les environs.

Bon, rien de particulier à part des caissières désœuvrées.

Elles avaient le temps de se montrer discrètement les clients venant vers les caisses, et espéraient que ceux ayant fait le plus d’achats iraient chez la copine d’à côté.

En sortant avec mon sac moutarde contenant une souris (le clic gauche de l’ancienne ne marchant plus),  je me suis rappelé mon premier sac moutarde.

J’ai toujours aimé lire.

Pas de grandes œuvres, pas des classiques, d’ailleurs j’étais assez médiocre en français.

En primaire, je dévorais Astérix et des petits bouquins expliquant le pourquoi du comment.

J’habitais dans un petit village à 30 Km de Lyon, village dont quasiment tous les livres étaient détenus par l’école communale.

Bien sûr, je ne pouvais pas aller à Lyon tout seul, et quand on y allait (souvent pour les vacances), on n’allait pas à la FNAC.

Ce nom mystérieux, plutôt un acronyme (mais à l’époque ce terme m’était encore plus abscons) évoquait pour moi le pays de cocagne ou les livres poussaient sur les arbres.

(A l’occasion de cette note, je viens de découvrir la signification de FNAC : « Fédération Nationale d'Achat des Cadres »).

Pays de cocagne ou j’enrageais de ne pas pouvoir aller.

Un jour, quelqu’un est venu à l’école avec un sac moutarde.

J’étais impressionné, j’avais la sensation de toucher une relique. Un beau sac d’ailleurs, bien épais, bien solide pour contenir plein de livres à la couverture pointue.

Plus tard, j’ai pénétré dans le saint des saints, le magasin de la rue de la République. Puis j’ai eu ma première carte FNAC, avec mon nom écrit dessus en relief, puis j’ai commandé mon premier article sur FNAC.com.

Curieusement, je n’en ai aucun souvenir.

Seul le premier contact avec un sac moutarde, même pas le mien, m’est resté.

21:46 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (6)

17/08/2006

Miami Vice.

medium_logoMV.jpgLe lancement du film m’a permis de revoir quelques extraits de la série originale.

1984, 26 ans déjà.

J’avais 12 ans, probablement un peu plus quand j’ai découvert cette série lors d’un voyage linguistique en Grande-Bretagne.

Quel choc culturel !

Je ne connaissais que des séries du genre « L’homme qui tombe à pic » et « Magnum », bien gentillettes en regard du flot pastel de violence, de drogue et de sexe proposé par « Miami Vice ».

Souvent, l’épisode se terminait par l’impact d’une balle en pleine tête de la fille que les deux détectives ont tenté de protéger durant 50 minutes.

Cette série avait aussi inventé la fin mi-figue mi-raisin, voire franchement dramatique.

A partir de cette date, les séries ne se termineront plus systématiquement dans le bonheur guimauve.

Autre madeleine : j’ai aussi découvert lors de ces séjours « Indiana Jones » et « Star Wars ».

La aussi, deux grands chocs, véritables coups de poing dans mon estomac de 12-13 ans.

« Indiana Jones », le premier commence : je suis scotché au fauteuil : la progression vers le temple, les pièges, l’idole d’or, l’infâme Belloq, la course poursuite des sauvages…

Je pense que devais être en apnée.

L’avion décolle, Indy découvre le serpent à ses pieds et…

Coupure publicité !

Je me suis levé d’un bond, sous l’œil interrogateur de mon correspondant.

Comment, c’est tout ?

Et quand est-ce qu’ils diffusent le prochain épisode ?

Comment ça se termine ?

Je me revois à 25 ans de distance : la plus extraordinaire séquence de ciné de ma courte vie  n’avait duré que quelques minutes !

Je me revois malheureux et frustré.

Mon correspondant était écroulé de rire, les coupures publicitaires étant déjà chose courante à l’époque, outre Manche.

Et en effet, après quelques minutes, le spectacle a recommencé.

J’ai quand même hurlé à la coupure suivante : non mais oh ?! Ils abusent….

Je ne supportais déjà plus ces écrans publicitaires, à la deuxième coupure de ma vie.

Pour « Star Wars », j’étais maintenant habitué à ces intermèdes.

Le « que la Force soit en toi » sera toujours pour moi « May the Force be with you ».

Mes correspondants avaient une bonne centaine de figurines et de maquettes (dont le « Millenium Falcon »). Je me souviens aussi des heures de combats entre rebelles et impériaux, à coup de jets furieux d’élastiques.

 

C’était pas mal, les séjours linguistiques…

13:23 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (2)

06/06/2006

Les Sociétés de Sécurité.

Je pense que vous avez remarqué comme moi la prolifération d’agents de sécurité dans la plupart des lieux commerciaux. Ces agents sont souvent issus du même milieu que ceux qu’ils sont censés empêcher d’agir. Probablement deux intérêts à cela : couper court à toute accusation de racisme, et aussi stabilisation de la marmite sociale des banlieues en engageant des jeunes du coin.

En Afrique, ces sociétés ne boxent pas dans la même catégorie que les nôtres.

Armes de poing, impunité quasi-totale (les forces de l’ordre les engagent pour surveiller les parkings du personnel de certains commissariats !), ils forment de véritables armées privées.

 

Cet article du Monde m’a rappelé une anecdote.

 

Nous logions dans un quartier résidentiel de Nairobi, nommé Karen (en l’honneur de Karen Blixen dont la maison est proche).

Des patrouilles armées de fusils à pompe, en uniformes paramilitaires patrouillaient sans cesse.

L’amie chez qui nous logions nous raconta qu’un jour, un jeune homme chaparda le sac d’une vieille femme. Un agent de sécurité le pris immédiatement en chasse, et alerta ses collègues à l’aide d’un sifflet. Le jeune homme fut rapidement maitrisé. Les agents le ceinturèrent d’un vieux pneu et y mirent feu.

Comme ça, sans autre forme de procès.

La « justice » est tellement expéditive que les résidents appellent la police dès qu’ils entendent ces fameux coups de sifflet. Non pas pour appréhender le malfrat, mais pour le protéger !

Au moins, nous dit notre amie, il a une chance de survie si il arrive vivant au commissariat !

La première année ou nous sommes allés là-bas, en première page du « Nation », grand quotidien national, s’étendait une photo montrant des policiers posant devant trois cadavres à leurs pieds. Une photo digne des grandes chasses du siècle dernier. Tout juste si les policiers n’avaient pas le pied sur la tête d’un des hommes à terre.

 

Qu’avaient-ils donc fait de si terrible ? C'étaient de simples voleurs de voiture.

08:37 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (0)

24/08/2005

Les vieux.

medium_vieux.jpgUn couple vient de se séparer avec pertes et fracas à la clinique.

Madame, âgée de 73 ans, séjournant actuellement dans notre établissement a eu une violente dispute avec son mari cet après-midi. Il a claqué la porte en lui jetant au visage qu’il la quittait.

Au bout de combien d’années de vie commune ?

 

Cet épisode m’en a rappelé un autre, encore plus dramatique, quoique burlesque.

Je crois que j’étais externe au pavillon A (les urgences chirurgicales) de l’Hôpital Edouard Herriot quand les pompiers nous ont emmené un couple très, très âgé.

Et assez mal en point.

La femme, octogénaire avait tout l’avant bras droit lardé de longues et profondes blessures effilées. Certaines blessures allaient jusqu’à l’os, ce qui n’était pas étonnant, étant donné sa faible masse musculaire. Son mari, octo ou nonagénaire était rentré dans une rage folle, et avait voulu la défigurer avec son rasoir coupe-chou ancestral lui aussi. La pauvre femme n’avait pu que se protéger en interposant son bras. Elle s’était défendu en cassant une bouteille de bière sur la tête de son mari, qui était dans le box d’à côté pour trauma crânien. Pendant que le senior la suturait, je suis allé voir la bête fauve. Il était assis, l’air abattu, son menton reposant sur ses mains appuyées sur sa canne. Hormis les tâches de sang sur sa chemise, et son pantalon de velours, rien ne pouvait laisser penser qu’une telle fureur pouvait surgir de ce petit papi assagi.

 

La cause d’un tel déchaînement de violence ?

Il la soupçonnait de le tromper avec le boucher du quartier, lorsqu'elle allait acheter la viande.

 

*******************

 

Les vieux

Paroles et Musique: J. Brel/G. Jouannest 1964

Les vieux ne parlent plus ou alors seulement parfois du bout des yeux
Même riches ils sont pauvres, ils n'ont plus d'illusions et n'ont qu'un cœur pour deux
Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande et le verbe d'antan
Que l'on vive à Paris on vit tous en province quand on vit trop longtemps
Est-ce d'avoir trop ri que leur voix se lézarde quand ils parlent d'hier
Et d'avoir trop pleuré que des larmes encore leur perlent aux paupières
Et s'ils tremblent un peu est-ce de voir vieillir la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui dit : je vous attends

Les vieux ne rêvent plus, leurs livres s'ensommeillent, leurs pianos sont fermés
Le petit chat est mort, le muscat du dimanche ne les fait plus chanter
Les vieux ne bougent plus leurs gestes ont trop de rides leur monde est trop petit
Du lit à la fenêtre, puis du lit au fauteuil et puis du lit au lit
Et s'ils sortent encore bras dessus bras dessous tout habillés de raide
C'est pour suivre au soleil l'enterrement d'un plus vieux, l'enterrement d'une plus laide
Et le temps d'un sanglot, oublier toute une heure la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui les attend

Les vieux ne meurent pas, ils s'endorment un jour et dorment trop longtemps
Ils se tiennent par la main, ils ont peur de se perdre et se perdent pourtant
Et l'autre reste là, le meilleur ou le pire, le doux ou le sévère
Cela n'importe pas, celui des deux qui reste se retrouve en enfer
Vous le verrez peut-être, vous la verrez parfois en pluie et en chagrin
Traverser le présent en s'excusant déjà de n'être pas plus loin
Et fuir devant vous une dernière fois la pendule d'argent
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui leur dit : je t'attends
Qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non et puis qui nous attend

 

 

Image trouvée ici.

19:48 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (2)

20/08/2005

Buletins de paye

medium_hommevinci.jpg

A priori, aucun bulletin de paye n’est particulièrement inducteur de rêverie, ou de remémoration.

Mais aujourd’hui, jour post garde, je suis suffisamment encotonné pour tenter l’expérience.

J’ai retrouvé en faisant mes comptes, d’anciens bulletins, qui m’ont permis de planter quelques bornes, comme Emmanuel Conte au début de « Malevil ».

 

La première borne se signale par un « non bulletin ».

J’ai en effet perdu mes deux fiches de paye d’ASH (Agent de Service Hospitalier), en été…

Je ne sais plus.

1995, peut-être.

Bien que n’ayant nul besoin d’argent, j’avais demandé aux Hospices Civils de Lyon à effectuer un remplacement de deux mois d’ASH à L’Hôpital Edouard Herriot (toujours le même, il revient à intervalles réguliers dans ma vie…).

Les HCL, bonnes filles, accordaient larga manu ces postes temporaires aux étudiants en médecine, qui en faisait la demande.

L’ASH est le dernier maillon d’un service hospitalier, technicien de surface, coursier, brancardier parfois, il est polyvalent.

Ces deux mois m’ont plus appris sur l’Hôpital que les 10 ans suivants.

L’organisation pyramidale, les gens « d’en haut », les gens « d’en bas », les codes à respecter (« surtout, pas de zèle », « chacun paye son café et nettoie sa tasse »…), les petits et gros soucis de personnes n’étant pas nés comme moi, avec une petite cuillère en argent dans la bouche.

J’y ai appris à faire un lit (bien difficilement), car je n’avais pas ma nounou ardéchoise pour le faire. Il fallait faire vite et bien, surtout en fonction du nombre d’entrants et de sortants.

Je me suis aussi rendu compte de la gaucherie que l’on peut avoir à 22-23 ans pour des actes d’allure simplissime, par rapport à de vieux routiers expérimentés.

J’ai eu un aperçu sur le syndicalisme, la vie des antillais en Métropole…

J’ai découvert combien on a envie de sauter à la gorge d’un médecin, quand celui-ci marche sur le sol que l’on vient de nettoyer (d’un autre côté, j’étais pas très intelligent, ayant mouillé toute la largeur du couloir, et non la moitié, comme il se doit…).

J’ai aussi appris à préparer un mort avant son dernier voyage hospitalier vers la morgue (ça m’a servi bien plus tard).

 

Deuxième borne : Septembre 1997, mon dernier bulletin de salaire d’externe.

Au sommet de la hiérarchie externale, il culminait à 1203.04 francs (je n‘avais pas fait de garde ce quadrimestre).

Pendant les trois premières années de médecine, zéro, puis 900-1300 francs par mois pendant les trois années suivantes (l'externat). Puis ensuite, l'internat.


Un seul mot me revient à l’esprit aujourd’hui en relisant cette dernière fiche de paye de mon externat: ENFIN, c’est fini!

 

Troisième borne : novembre 1997, mon premier salaire d’interne : 7150.62 francs.

Impressions mitigées : une immense peur, quasi incontrôlable avant de débuter, surtout quand j’ai rencontré mon premier patron pour la première fois dans son bureau, un soir :

 

"J’ai très peur de faire des gardes

- Tu vois, si tu n’avais pas peur, ce serait inquiétant, tu vois…"

 

Facile à dire…

Indissociable de cette peur, l’immense fierté de faire enfin partie de cette « élite », dont me parlait ma mère depuis mon enfance (« quand j’ai rencontré ton père, il était externe, puis il a réussi son Internat... »). Cet examen est tellement mythique dans mon esprit, que je n’ai jamais réussi à l’écrire autrement qu’avec une majuscule. Petit, je feuilletais le livre recensant toutes les promos d’internes des Hôpitaux de Lyon depuis le XIX (avec les photos de promos pour les dernières).

Seule petite ombre, je ne serai jamais Interne des Hôpitaux de Lyon (IHL), le Graal, sauf pour les parisiens, bien sûr…

Qu’importe (j’ai quand même mis 4 ans pour arriver à le dire en le pensant vraiment).

Pour mémoire, et pour information pour les externes/jeunes internes, j’ai terminé à 2017.96 euros pour mon dernier mois d’interne en avril 2002 (avec 5 gardes quand même).

C'est aussi une date importante, puisqu'il s'agit de la fin officielle de mes études médicales (avril 2002, date de la Thèse, et du DES). Durée totale: 12 ans (octobre ou novembre 1990-avril 2002).

 

Quatrième borne : mai 2002 : attaché aux Hôpitaux de Paris, 2643.83 euros.

Financièrement, ça va beaucoup mieux, le titre est ronflant, mais sans aucune valeur. D’autant plus que j’étais rattaché au service de biophysique (je faisais des épreuves d’effort en médecine nucléaire). Bien entendu, j’étais autant « attaché en biophysique », qu’astronaute. Mais bon, c’était le seul moyen de me payer, le service de cardio n’ayant aucune vacation à fournir.

J’ai déjà parlé de cette période, pas grand-chose à rajouter.

 

Cinquième borne : novembre 2002 : première paye d’Assistant des Hôpitaux (1142.51 euros) et Chef de clinique à la Faculté (1308.31 euros).

Un seul mot là aussi : ENFIN

Que du bonheur, j’ai retrouvé Sally et Guillaume après 5 mois parisiens, et j’ai atteint mon but professionnel (je raconterai un jour la course pour avoir un poste de « CCA »). Je ne visais pas plus haut comme carrière hospitalière.

Deux ans d’aisance financière, et surtout sans aucun soucis métaphysique (le bachelier se demande si il va être étudiant en médecine, l’externe se demande si il sera interne –ou et en quoi-, l’interne se demande si il sera CCA…). A cette époque, pour la première fois, je ne me demandais plus rien depuis bien, bien longtemps.

 

Depuis novembre 2004, je suis multi casquettes : praticien attaché aux Hôpitaux (cardiologie et médecin vasculaire), cardiologue/médecin vasculaire libéral, réanimateur nocturne en chirurgie cardiaque, et médecin rééducateur.

Bref, pour l’instant ça roule.

Pourvu que cela dure.

 

Ce que je tire de cette remémoration ?

Le parcours est long, semé d’embûches, et finalement assez incertain.

L’aisance financière vient finalement assez tardivement (si l’on compte en salaire horaire, on frôle le ridicule), il faut donc avoir les reins assez solides.

Mais, jamais je n’aurais pu faire autre chose.

Ce métier, et ses études font autant parti de moi que mon cœur ou mon foie.

Je ne crois pas en Dieu, mais en mon métier.

16:25 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (7)

19/08/2005

La chambre de bonne.

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J’ai écouté, un peu par hasard « Hands Clean » de Alanis Morissette ce dimanche. Elle doit être à court d’inspiration, car son dernier album est une réédition acoustique de «Jagged little pill». Bref, j’ai eu envie d’entendre à nouveau ce morceau (tiré de « Under rug swept »).
Je ne vous referais pas le coup de la « Madeleine » de Proust, que je n’ai jamais lu, mais tout m’est revenu instantanément.
Eté 2002, la chambre de bonne, juste à l’extérieur de Paris intra muros.
Même l’odeur du parquet m’est revenue !
J’ai mis presque 2 semaines pour trouver quelque chose, pas un logement décent, mais un logement tout court.
Pendant ce temps, je prenais des gardes à l’Hôpital (une nuit, payée de surcroît est toujours bonne  à prendre) et des nuits au Kyriad local.
Heureusement pour moi, le service de cardiologie étant ce qu’il est, c'est-à-dire consciencieusement barré des listes du SAMU (pas de coronarographie, quasiment pas d’électrophysiologie, en un mot la zone), je dormais quasiment toute la nuit de garde.
J’avais trouvé cette petite chambre au septième étage sans ascenseur pour mon stage de 5 mois à Paris.
Bien évidemment, la première difficulté est de se loger pour une durée assez courte.
Nous étions trois à attendre l’homme de l’agence de location.
Il y avait un homme d’origine antillaise, et une étudiante a priori non française de souche.
J’ai immédiatement été intimement persuadé que, quelques soient les références et garanties présentées par ces deux, je serais choisi à cause de mon aspect bien « de chez nous ».
Ca n’a pas manqué.
Chronique écoeurante et sans fin de la ségrégation quotidienne.
 
Comment définir ma vie dans ce service ?
« Sieste » serait peut-être le premier mot qui me vient à l’esprit.
Tout le monde faisait la sieste ici, les patients n’étaient sortants que si des entrants programmés prenaient leur place.
Comme ça, pas de place pour les urgences.
Il ne faudrait tout de même pas trop travailler, on ne sait jamais…
Bref, j’ai un peu glandouillé pendant 5 mois tandis que mon fils, né peu avant grandissait sans que je le vois à plusieurs centaines de kilomètres. La période a été difficile pour Sally et moi, mais nous avons courbé l’échine et avons traversé ces 5 mois sans trop de difficultés.
J’ai finalement peu profité de la vie parisienne, quelques musées et restaurants, tant je restais émerveillé de me retrouver au pied de la Tour Eiffel en quelques minutes de métro.
Je garde de cette période une solide amitié, la connaissance de l’étendue du  pouvoir que possèdent les agrégés parisiens, même si la cardiologie n’y est plus à la pointe, et une connaissance très parcellaire de cette ville et de ses habitants.
Certains d’entre eux (n’est-ce pas Steph ?), pensant que le périphérique représente le « Finis Terrae », et que la station Balard est dans le Sud-Ouest profond ;-).

20:45 Publié dans Mon passé | Lien permanent | Commentaires (0)