01/03/2007
The man who never was (suite et fin).
Je voulais faire une note sur cet épisode rocambolesque et assez méconnu de la seconde guerre mondiale.
Mais le manque de temps et la qualité des articles de Wikipedia qui traitent de ce sujet font que je vais simplement me contenter de les lier dans cette présente non-note.
Article de Wikipedia en anglais.
Article de Wikipedia en français.
09:50 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (1)
27/02/2007
La loi du profit (3).
Même le vieux McKenzie, qui considère pourtant son jeune poulain comme son fils spirituel ne peut pas lui éviter son renvoi pour une affaire de drogue montée de toute pièces. Les informations déterrées sont trop brûlantes et pourraient remonter jusqu’à la Maison Blanche. Son épouse et sa maîtresse le quittent. Alors qu’il rumine sur ses malheurs dans le salon de son meublé minable en plein quartier latinos de LA, on frappe à la porte.
Il ouvre la peur au ventre et découvre avec stupéfaction Rosita, 16 ans, à moitié morte de faim et enceinte de 8 mois et demi qui désire donner un foyer à son futur enfant.
C’est suivi lourdement de Rosita qu’il terminera son enquête afin de laver son honneur et faire éclater la vérité.
MPharma cherche donc à étendre les indications de sa molécule miracle en finançant d’autres grandes études.
De là va venir sa perte.
Une nouvelle étude sort donc le 17 mars 2005 dans « Revue ».
Appelons cette étude « Rcb-lachute ».
Les analyses intermédiaires de Rcb-lachute montrent encore une fois une majoration du risque cardio-vasculaire.
Parmi les 12 auteurs cités par l’article, 5 sont des salariés de MPharma, et les autres reçoivent des honoraires de consultants.
Comme on ne peut plus cacher le problème, on va dire qu’il ne survient qu’après 18 mois. Comme cela, on sauve les meubles.
Le souci est que cette assertion repose sur un bidouillage statistique si manifeste, que même les membres du comité de lecture de « Revue » s’en rendent compte.
« Revue » tape sur les doigts des auteurs et publie une correction le 13 juillet 2006 qui modifie les fausses conclusions de l’étude.
Comment une revue aussi prestigieuse que « Revue » a pu ainsi publier à deux reprises des papiers aussi bidouillés et des corrections aussi tardives ?
Bonne question.
Pourquoi la FDA n'a pas exercé de contrôle plus strict ?
Autre bonne question.
Mais d’autres revues prestigieuses ont aussi laissé passé des articles scientifiquement incorrects, sans lever le sourcil.
Ainsi en 2001, des auteurs (là aussi salariés ou consultants de MPharma) ont réussi à publier une étude qui a même fait l’objet de critiques internes au sein de MPharma : « Les données ont été interprétées pour soutenir une hypothèse présupposée plutôt qu’analysées pour établir de nouvelles hypothèses ».
Une étude tellement bidouillée qu’elle a même choqué certains bidouilleurs…
Finalement, le scandale a éclaté de manière publique en septembre 2004 ou le Rcb a été retiré du marché.
Le jeune avocat vit actuellement à Beverley Hills, restauré dans son honneur et ses biens et remarié à Laura, la fille aînée du vieux McKensie. Personne ne sait ce qu’il est advenu de Rosita.
Je ne suis pas mauvais en scénariste, n’est-ce pas ?
J’ai eu l’idée cette nuit, et j’ai tout écrit en une matinée.
J’attends que des producteurs me contactent, ça ne devrait pas tarder.
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En fait, je n’ai rien inventé si ce n’est l’histoire farfelue de notre jeune avocat.
Cette histoire édifiante est vraie et elle est merveilleusement bien résumée dans un article du BMJ écrit notamment par Harlan Krumholz qui n’est pas le premier venu.
Entre 1999 et septembre 2004, la molécule impliquée a fait l’objet de 107 millions de prescriptions rien qu’aux Etats-Unis.
Actuellement 30000 procès sont en cours.
Heureusement pour nous, ces faits se déroulent à une époque lointaine et sur un autre continent dont tout le monde reconnait les abus. Il ne me semble pas possible d'observer de tes agissements dans notre bonne vieille Europe ou les firmes pharmaceutiques sont attentives au bien-être des patients et les autorités de régulation vigilantes.
Je vous mets quelques liens ci-dessous, je vous conseille surtout la lecture de la lettre de ce professeur de l’université de Stanford qui se plaint auprès du patron de la firme pharmaceutique des pressions que l’on a exercé sur lui et ses subordonnés. Ce document est à peine croyable.
12:45 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (4)
La loi du profit (2).
Les choses se compliquent pour le jeune et brillant avocat. Primo, la jeune et jolie veuve, devenue sa maîtresse est en fait jalouse et possessive a fait déposer une tête de cheval mort dans le lit conjugal. Ce qui a été difficile à expliquer à Madame (un pari entre amis…). Secundo, « Pic à glace », son inséparable compagnon se suicide au gaz après s’être tiré trois balles dans la tête et tertio, l’histoire de MPharma et du Rcb devient de plus en plus embrouillée.
L’étude Rcbgénial est finalement achevée. Elle montre que le Rcb ne fait pas mieux que la molécule de référence, mais qu’elle a beaucoup moins d’effets secondaires. Du moins en dehors de la sphère cardiovasculaire, puisque là, il existe un risque relatif de 5 en défaveur du Rcb (RR de 5.00, intervalle de confiance de 95%, 1.68 à 20.13).
Comment gommer de point de détail dans la publication finale ?
C’est là que les cadres de MPharma vont montrer leurs talents.
- Dans la publication, la collecte des événements cardio-vasculaires va être arrêtée 1 mois avant la date de la fin de collecte des autres évènements indésirables. Ca fera toujours quelques infarctus de moins (3 exactement)…
- On va créer des sous groupes favorables afin de noyer le poisson (du genre « indication d’aspirine en prévention » ou ces 3 infarctus, si ils avaient été finalement pris en compte, auraient été « dilués »).
- On va présenter les résultats cardio-vasculaires en considérant le groupe « produit de référence » comme le groupe ou l’on intervient. Dans le groupe Rcb, le risque cardiovasculaire est de 5.0, dans le groupe de référence, il est de 0.2 (effet protecteur, donc). On va donc dire que c’est la molécule de référence qui protège le cœur et les vaisseaux et non que c’est le Rcb qui est délétère. Vous avez compris ? C’est subtil, mais efficace. Bien sûr, le produit de référence n’a jamais montré nulle part d’effet protecteur (le 0.2 étant probablement le fruit du hasard), mais on s’en fiche, personne ne va remarquer ça... Bien sûr, pour tous les autres effets secondaires, ou le Rcb fait mieux, on va présenter les résultats de manière habituelle : groupe Rcb=groupe ou l’on intervient, groupe « produit de référence »= groupe contrôle.
Rcbgénial est finalement publié dans une grande revue le 23 novembre 2000, appelons la simplement « Revue ».
MPharma commande près de 1 million de « reprints » à Revue, pour diffuser la bonne parole au Monde entier. Revue se pose quelques questions et publie finalement un avertissement le…29 décembre 2005. Vaut mieux tard que jamais ?
En 2001, une autre revue se pose aussi quelques questions, mais finalement le problème est peu débattu.
A cette époque, quelques médecins posent de bonnes questions, notamment sur le miraculeux effet protecteur de la molécule de référence, mais MPharma n’hésite pas à les intimider en faisant pression sur leurs supérieurs (« …il y aura des conséquences pour vous et votre faculté »).
Message reçu, la caravane continue à passer.
Suite et fin au prochain épisode...
12:00 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (0)