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11/04/2005

Waterloo, morne plaine (bis).

medium_theatreouest.jpgLundi, journée difficile.

Pas tant le matin, ou ma vacation hospitalière se déroule habituellement sans encombre.
Par un nouveau miracle sémantique récent, l’antique (souvent au propre) « vacataire » s’est mué en « Praticien Attaché », ça en jette bien plus.
Je suis donc « Praticien tiers temps » (3 vacations par semaine).

L’après-midi, cabinet.

Une patiente ce jour.
J’envisage de sous louer ma salle d’attente à l’Orchestre Symphonique de Région.
L’acoustique y est très bonne.
Deux mètres sous plafond, rien pour arrêter la propagation des ondes, une tapisserie seventies imperméable aux sons (et au bon goût).
J’ai fait la même expérience qu’à Epidaure : je distingue parfaitement à l’autre bout du cabinet l’impact d’une agrafe chinoise, que ma secrétaire fait choir au milieu de la salle d’attente.

Un patient passe apporter des résultats de spirométrie.
Venu me voir il y à 3 semaines (il était seul, aussi, ce lundi là), il est tout droit sorti du grand livre de séméiologie des BPCO alcooliques. Tel Raminagrobis, « Un saint homme de chat, bien fourré, gros et gras », rougeaud, respirant à lèvres pincées à l’effort, et se raclant la carcasse « au moins trois mois par an, depuis deux années consécutives ».
Après l’avoir interrogé, examiné et exploré, je le rassure du point de vue cardiaque.
Je lui conseille de consulter un pneumologue, pour sa bronchite chronique.
Il passe me voir, en voisin, la semaine d’après.
Son médecin traitant lui a dit « un pneumologue ?! Quelle curieuse idée ? Vous êtes bien comme ça, pas besoin… ».
Je le gronde un peu, et lui fourre dans les pattes une lettre de consultation pour un pneumologue, que je connais de réputation.
Donc, je regarde aujourd’hui la spirométrie : Tiffeneau à 54%, DEMM 25/75 à 20%, réversible sous bêtamimétiques, saturation en air ambiant à 92% (pour les non « initiés », une bronchite chronique sévère).
Uhmmm, pas très reluisant pour l’enseignement médical français…
Maladie 1- Médecins 0
Je lui somme d’arrêter ses deux paquets par jour (avec substituts nicotiniques), et de bien prendre son traitement.

A propos, puisque j’en suis à explorer le fond de mon petit trou personnel, vous souvenez vous de la patiente de la sténose iliaque droite asymptomatique ?
Eh bien, c’était une dissection aortique de type B (pied de la sous-clavière gauche, jusqu’à l’iliaque droite).
Je ne l’avais pas vu en écho döppler.
Certes, l’appareil de la clinique n’est pas très bon, mais avec le recul, j’ai manqué un peu de lucidité sur le coup.
Aux dernières nouvelles elle ne va pas trop mal (le corps humain est, heureusement pour nous, très résistant).
Maladie 2- Médecins 0

J’ai vissé ma jolie plaque en laiton cet après midi, au milieu de celles de mes associés.
Je n’ai même pas ressenti quoique ce soit.
J’étais nettement plus heureux début février, en recevant des feuilles de soins et des ordonnances 100% à mon nom.
A cette époque bénie, j’avais un peu plus l’occasion de m’en servir (3-4 patients par lundi).
Maintenant, j’en fais de petits bateaux, et des avions que je lance à travers le couloir, vers la salle d’attente, sans craindre de ne blesser personne.

Fin d’après midi.
Sylvie (celle des quatre mains) m’appelle sur le portable.
Petite précision, elle est redevenue célibataire depuis peu, après dix ans de vie commune.
Evidemment, elle n’a pas le moral.
Depuis plusieurs semaines, je joue l’entremetteur au sein de la clinique (ou nous travaillons tous les deux).
Depuis l’arrivée très récente d’un jeune kiné, j’essaye de les brancher ensemble (il a toutes les qualités : souriant, gentil, kiné, a priori pas trop mal physiquement et, cerise sur le gâteau, juif).
Bref, tout pour plaire.
Ils badinent un peu, se racontent les derniers rebondissements du « Bachelor », sous mes yeux pétillants (parfait, elle semble aller mieux..).
Mais Sylvie fait un peu la fine bouche, pas encore prête, trop jeune…
Elle voudrait connaître son âge (24 ? 25 ?)
De mon côté, je mène directement et indirectement une enquête discrète sur lui.
Samedi matin dernier, le kiné et moi discutons boulot dans le gymnase de la clinique, nous parlons aussi des commérages, et de Sylvie, incidemment.

Elle m’appelle donc aujourd’hui, hilare.

« Vous avez parlé de QUOI samedi matin? »
Je lui raconte.
« Il m’a dit que tu lui avais TOUT dit
- TOUT quoi ?
- J’ai pensé que tu lui avais parlé de tes manœuvres…
- Non
- En tout cas, tu as du lui taper dans l’œil, il m’a demandé si tu étais marié !
- Noooon !!?? Je ne te crois pas…
- Je t’assure
- Gloups, tu lui as dit quoi ?
- Que tu étais célibataire, que je pensais que tu étais probablement gay
- NOOON, tu n’as pas osé !!!
- Maiiiiis non, je lui ai dit que tu avais une petite femme, et deux enfants. La prochaine fois que tu iras le voir, tu lui demanderas son âge ?
- HORS DE QUESTION, demande à Stéphane (le troisième cardiologue de la bande des quatre) »

Le petit kiné va nous prendre tous pour des fous, qu’il soit gay ou non.
Sylvie et moi, probablement morts de rire, à chacune de ses futures apparitions.
Peut-être a-t-il cru que nous le draguions chacun de notre côté ?
Et le troisième larron, ne sachant rien, qui va lui demander benoîtement son âge, demain ou après demain.
Tous morts de faim, dans cette clinique…


Superbe journée en effet, vivement demain.

22:50 Publié dans Caliméro | Lien permanent | Commentaires (0)

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