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17/11/2006

Post mortem.

Ce qui m’a le plus choqué dans cette histoire, n’est pas tant la brutalité du décès (c’est le lot quotidien des cardiologues), ni l’aspect du mort (la mort fait partie de la vie de tout médecin), mais qu’il soit mort à l’extérieur. Cela peut paraître curieux, mais ce détail n’en est pas un pour moi. Je n’ai jamais fait de SAMU/SP. Tous mes morts, et il y en eu, l’ont été dans une chambre, le plus souvent dans un lit. De même, ils portaient dans la plupart des cas une chemise d’hôpital, ou une chemise de nuit. Là, ce mort en civil et en liberté m’a impressionné. Je ne reconnaissais pas mon environnement familier et rassurant, penché sur ce corps entre deux carrosseries et sous une pluie battante.

J’ai même envisagé (maintenant ça me fait sourire) d’appeler la Police, tant cette mort me semblait inhabituelle. Pourtant, médicalement, elle ne l’était pas. Heureusement que je ne l’ai finalement pas fait, j’imagine avec gène ce que j’aurais pu dire à mon interlocuteur.

   

 « Un de mes patient est mort dans le parking de la clinique

Sa mort vous semble naturelle ?

Oui, il était très grave Alors pourquoi vous nous appelez-nous ?

Ben, parce qu’il n’était ni dans son lit ni en pyjama… »

 

  Il m’aurait pris pour un fou, incapable de comprendre l’importance du rituel qui entoure la mort à l’hôpital. On ne devrait mourir que subitement dans un lit, et en pyjama. C’est pourquoi je hais toute violence, qu’elle soit routière, guerrière ou autre et toute forme d’agonie.

    

Là, je suis en garde mais j'ai une envie poignante de serrer Sally dans mes bras.

  

°O°O°O°O°O°O°O°

 

Le dormeur du val

 

C'est un trou de verdure où chante une rivière,

Accrochant follement aux herbes des haillons

D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,

Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.

 

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,

Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

 

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

Sourirait un enfant malade, il fait un somme :

Nature, berce-le chaudement : il a froid.

 

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

 

A. Rimbaud

21:45 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

D'un strict point de vue médico-légal, ça n'aurait pas été aussi insensé que ça d'appeler la police........il s'agit en effet d'un décès sur la voie publique qui entraine normalement et de manière automatique l'intervention de la police. Poussons le raisonnement jusqu'à l'absurde....ce monsieur est resté seul quelques minutes puisque son ami était parti devant lui...il aurait pû être agressé pendant ces cinq minutes;

Écrit par : Fab | 18/11/2006

Le parking appartient à la clinique. Cela se serait passé sur la voie publique, j'aurais plus sûrement appelé la Police.
Par ailleurs, alors que je me posais toujours la question, je l'ai déshabillé et examiné: rien à part un trauma nasal. Pas de coups, de contusions ou de traces suspectes.
Mais bon, j'espère avoir pris la bonne décision.

Écrit par : lawrence | 18/11/2006

Les commentaires sont fermés.