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30/09/2007
Yves Klein et l'immatériel
« Donc, je suis à la recherche de la réelle valeur du tableau, celle qui fait que deux peintures rigoureusement identiques en tous les effets visibles et lisibles, tels lignes, couleurs, dessin, formes, format, épaisseur de pâte et technique en général, mais peintes l’une par un « peintre » et l’autre par un habile « technicien », un « artisan » et bien qu’officiellement reconnus tous deux comme « peintres » par la collectivité ; cette valeur réelle invisible fait que l’un des deux objets est un « tableau » et l’autre pas »
Comment étudier cette « réelle valeur », à la fois si immatérielle et pourtant si matérielle (la différence de prix entre un original et une copie !).
Quand je dis étudier, je devrais dire plutôt « vendre ».
Tout d’abord, Klein va vendre des monochromes bleus strictement identiques (même taille, même technique et bien sûr même « sujet ») à des prix différents au cours d’une même exposition dans une galerie italienne.
Puis il va aller plus loin : il va quand même réussir un exploit digne de Manzoni : vendre du vide au prix de l’or.
Petite description de cette performance, au sens propre comme au sens figuré.
Klein a vendu plusieurs « Zones de sensibilité picturales immatérielles » qui comme leur nom l’indique, sont immatérielles.
Leur prix : une certaine quantité d’or fin (24ct).
Dans l’exemple donné par le catalogue, 325 grammes pour être précis (mais ce poids va varier au cours du temps).
L’acheteur donne donc 325 grammes d’or à Klein qui en échange lui donne un reçu tiré d’une sorte de chéquier. Sur le talon du reçu que l’artiste conserve, Klein inscrit le nom de l’acheteur.
Ensuite un rituel précis et codifié commence : Klein balance la moitié de l’or dans un lieu ou personne ne pourra le récupérer, par exemple au fond de la Seine. L’acheteur, lui, brûle son reçu.
Pourquoi brûler le reçu ? Tout simplement, car les 4 premiers acheteurs le considérant comme l’œuvre d’art en elle-même, l’ont encadré et exposé.
Klein a considéré cela comme une transgression de son concept, puisque l’acheteur se retrouve tout de même en possession de quelque chose de tangible. D’où la modification des règles.
Pourquoi balancer la moitié de l’or ?
Bonne question dont je n’ai pas la réponse malgré 319 pages d’un jargon artistico intellectualiste touffu.
Mascarade, mystification ?
Klein le reconnaît bien volontiers : « Aussi incroyable que cela paraisse, j’ai vendu un certain nombre de ces états picturaux immatériels »
Photo et textes tirés du catalogue de la dernière exposition consacrée à Yves Klein au Centre Georges Pompidou (5 octobre 2006/ 5 février 2007).
09:25 Publié dans Divers et variés | Lien permanent | Commentaires (2)
Commentaires
pas si immaterielle que cela si l'on considère qu'il subsiste tout de même une bien jolie photo en noir et blanc..... une quasi preuve materielle du délit !
Écrit par : kropotkineb | 01/10/2007
Je ne sais même pas si la photo était "donnée" aux acheteurs!?
Écrit par : lawrence | 01/10/2007
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