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13/09/2008

L’épine dans la chair.

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Le chemin de Damas, par Gustave Doré.

 

Voilà un article qui ne fait pas avancer la science, mais que j’ai trouvé intéressant et enrichissant.

 

L’auteur s’interroge mi-sérieusement sur l’hypothèse que la très fameuse « Epine (ou écharde) dans la chair » (2 Corinthiens 12:7) de Saint Paul était en fait une épilepsie.

C’est déjà drôle car on parle d’épine irritative en épileptologie (est-ce un hasard ?).

 

 

En lisant cet article, j’ai appris que l’épilepsie était appelée par les romains « morbus insputatus », la maladie devant laquelle on crache, car il était d’usage de cracher devant un épileptique afin, peut-être d’en « conjurer la contagion », comme le précise René Soulayrol.

Or, justement, dans son épître aux Galates, Saint Paul précise : « et, en votre épreuve dans ma chair, vous n’avez pas eu de mépris ni craché, mais vous m’avez accueilli comme un messager d’Elohîms, comme Iéshoua‘, le messie. » (Galates 4 :14).

Je suis allé chercher cette version, dite d’« André Chouraqui », afin de faire apparaître le mot « craché ». Mais on peut y voir une allusion au « morbus insputatus ».

René Soulayrol précise toutefois que l’épilepsie n’avait pas l’apanage d’être une maladie faisant cracher les autres au temps des romains. J’essaye d’imaginer un tuberculeux cracheur à Subure, au temps de la République. Au bout de quelques semaines, tout le quartier crache, entre les contaminés et ceux qui ont peur de l’être…

 

Plus intéressant, l’auteur précise que la stimulation de certaines régions cérébrales spécifiques pouvait conduire à un état d’extase, au sens religieux du terme.

Les symptômes observés étant : sensation de lévitation et « impression de bonheur ineffable et d’union avec un être supérieur » (face interne lobe temporal), abolition des frontières entre le soi et le non soi (inhibition des zones pariétales).

 

 

Saint Paul ne dit pas autre chose :

 

1 Il faut se glorifier... Cela n'est pas bon. J'en viendrai néanmoins à des visions et à des révélations du Seigneur.

2 Je connais un homme en Christ, qui fut, il y a quatorze ans, ravi jusqu'au troisième ciel (si ce fut dans son corps je ne sais, si ce fut hors de son corps je ne sais, Dieu le sait).

3 Et je sais que cet homme (si ce fut dans son corps ou sans son corps je ne sais, Dieu le sait)

4 fut enlevé dans le paradis, et qu'il entendit des paroles ineffables qu'il n'est pas permis à un homme d'exprimer.

5 Je me glorifierai d'un tel homme, mais de moi-même je ne me glorifierai pas, sinon de mes infirmités.

6 Si je voulais me glorifier, je ne serais pas un insensé, car je dirais la vérité; mais je m'en abstiens, afin que personne n'ait à mon sujet une opinion supérieure à ce qu'il voit en moi ou à ce qu'il entend de moi.

7 Et pour que je ne sois pas enflé d'orgueil, à cause de l'excellence de ces révélations, il m'a été mis une écharde dans la chair, un ange de Satan pour me souffleter et m'empêcher de m'enorgueillir.

 

(2 Corinthiens 12:1-7, version Louis Segond)

 

 

Enfin, j’ai découvert que Sainte Thérèse d’Avila, Dostoïevski et d’autres auraient aussi souffert de ces syndromes d’épilepsie à crise extatique (ici et ici). Le web fourmille de débats passionnés sur qui était épileptique et qui ne l’était pas et si la croyance est comitiale.

 

Traiter la foi par un antiépileptique ?

Je n’irais pas jusque là. Etant donné les effets secondaires de ces molécules, ce ne serait pas raisonnable en terme de santé publique.

 

En tout cas, je pense que le prochain grand mystique a bien plus de chance d’être originaire d’un pays en voie de sous développement que de nos pays dits « développés ». Pas à cause de nos « pseudo sagesses » et « fausses idoles », stigmatisées par Benoît XVI, mais plutôt car tout mystique en puissance dans notre monde occidental surmédicalisé a de grandes chances de se retrouver sous phénobarbital ou valproate de sodium avant de voir son premier ange annonciateur. Parions donc que la prochaine religion dominante sera africaine.

 

 

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Soulayrol R. Saint Paul ou « l’épine dans la chair ». Epilepsies. Janvier, Février, Mars 2006 ; 18(1) : 47-50.

 

Comprendre les épilepsies pour mieux les traiter (Document Inserm)

 

17:40 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (0)

Une histoire simple.

Discuter avec ses patients est une expérience riche et sans cesse renouvelée.

C’est ce qui fait une bonne partie de l’intérêt du métier. L’histoire que je vais raconter n’est pas extraordinaire, sa valeur tient dans le seul fait qu’elle représente une portion de vie. Je n’en tire aucune morale, aucune leçon, faites de même.

Ce patient octogénaire vif et rondouillard sort d’une chirurgie cardiaque lourde, il est entouré et aimé de sa famille. Je l’ai suivi en préopératoire, et j’ai été très content de le retrouver en bonne forme ensuite.

Comme toujours, chez mes patients, je leur demande « ce qu’ils font/ont fait dans la vie ».

« J’ai fait l’Indochine, puis 45 ans comme manutentionnaire ». Son adolescence a été houleuse, fils d’un petit fonctionnaire départemental, il trafiquait et volait avec ses copains. Difficile de croire ça quand on le voit, débonnaire, l’œil rieur, malgré son âge et sa maladie. Il se fait embarquer par la police, et reçoit la visite de son père au poste.

« Qu’est-ce que tu vas faire, maintenant ? ». Il ne savait pas. Son père lui a alors dit : « tu as le choix, la prison, ou tu t’embarques pour l’Indochine comme volontaire, pour te battre là-bas ».

Il a pris la seconde option et s’est engagé comme parachutiste à l’âge de 18 ans. Il a sauté vingt fois, sans jamais tomber sur un ennemi : « ils partaient en nous voyant, et il ne restait que les femmes, on pouvait quand même pas leur tirer dessus ! ».« On sautait beaucoup pour parader, pour faire plaisir aux généraux qui nous attendaient en bas».

Quand il n’était pas au front, il faisait le chauffeur, ce qui lui permettait de faire des virées avec ses copains. « On chassait, on péchait à la dynamite ».

Les filles de là-bas, il en a eu des tas. « Ils étaient tellement pauvres qu’une tablette de chocolat suffisait pour avoir une ou deux filles ».

Il a quand même participé à des combats, et a sauté sur une mine, heureusement sans gravité (il m'a montré sa blessure).

Au bout de trois ans, il est rentré en France, et son père l’a fait rentrer dans une administration. Il n’a jamais plus fait de conneries, a rencontré sa femme, aujourd’hui décédée, et a mené sa petite vie pépère, loin de son passé turbulent de petit délinquant et de para. Vous ne vouliez pas rester dans l'armée ? « Ca va pas, non ?!».

12/09/2008

Le Canard de la semaine.

Je n’ai pas encore terminé la lecture du Canard Enchaîné de cette semaine, mais je voulais vous signaler deux pépites.

 

La première est une caricature de Lefred-Thouron, située en une et dont le titre est « Sait-on jamais ».

Cette excellente caricature a plusieurs degrés de lecture, dont certains franchement politiquement incorrects, et c’est ce qui en fait toute sa valeur.

J’aimerais avoir un accès à un univers parallèle pour connaître les réactions qu’elle aurait engendrées si ce dessin avait été à la une du « Figaro », par exemple (à vrai dire, je ne sais même pas si il y a régulièrement une caricature à la une de ce journal). Mais bon, c’est une image, vous avez compris le fond de ma question.

 

J’en tire deux conclusions très générales.

La première est qu’une grande partie du message véhiculé par une œuvre, et donc des réactions suscitées ne dépend pas de l’œuvre elle-même, mais du contexte l’environnant.

La seconde concerne la circularité des positions politiques/philosophiques au sein d’une population. Les extrémités d’une droite se rejoignent et forment un cercle.

 

Seconde pépite, un article de Hervé Liffran titré « Levez la pa-patte et dites : je le jure ».

Le journaliste se paye la tête d’un magistrat qui aurait fait comparaître un labrador comme témoin dans une sombre affaire criminelle. Ce même magistrat avait tenté de faire perquisitionné les locaux du Canard en mai 2007.

On comprend alors aisément pourquoi cet article est si bon et écrit avec autant de verve.

A lire absolument.