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23/08/2006
On n’est pas aidé…
Une patiente arrive à la clinique avec un courrier assez imprécis.
Je vais la voir, discute avec elle, et décide d’initier un traitement.
La fille de la patiente, médecin du travail, m’appelle et me demande d’arrêter le traitement, car les cardiologues de l’établissement qui nous l’ont adressée ont dit qu’il ne fallait pas l'instaurer chez sa maman.
Bon, ce n’était pas marqué dans le courrier, car celui qui l’a écrit n’a jamais vu la patiente, mais il l’a écrit quand même car le cardiologue traitant de la patiente la lui avait adressée initialement personnellement (vous suivez ?).
Bon, je donne mes arguments à la fille en expliquant ma décision, et en lui pointant l’équilibre difficile des plateaux entre la balance bénéfices/risques. Je reste très confraternel en n’enfonçant pas l’autre équipe de cardios (par ailleurs, leurs arguments se valent tout à fait). Je ne suis pas omniscient, mais j’ai le sentiment d’avoir raison dans cette histoire.
Cependant, elle ne veut pas de mon traitement.
Je reste calme, mais avec efforts, tout de même, car de toute évidence, elle ne comprend rien et croit savoir (c’est bien pire que de rien savoir du tout).
Je lui dis que je contacterai les cardios de l’autre équipe pour avoir des informations complémentaires. Je prescrits alors l’option conseillée par ces derniers.
Bon, tout le monde est content. La fille est rassurée, la mère n’a aucune idée de ce qui se trame autour d’elle, et j’ai l’esprit tranquille car je n’ai pris aucun risque personnel médico-légal. Vous allez me dire « et la patiente dans tout cela ? ». Dans ce genre de situation un peu tendue et trouble, j’applique la technique de Ponce Pilate : je m’en lave les mains (En latin, c’est bien plus classe : Matthaeus 27:24. videns autem Pilatus quia nihil proficeret sed magis tumultus fieret accepta aqua lavit manus coram populo dicens innocens ego sum a sanguine iusti huius vos videritis).
Si j’impose mes vues et qu’un incident survient, je suis responsable. Si l’option choisie par mes collègues et la famille de la patiente échoue, je n’y suis pour rien. Ce n’est pas humaniste, c’est de la realpolitik ; il faut savoir en faire, parfois.
Or, aujourd'hui, j’apprends qu’un membre de l’équipe (qui est sur une galaxie différente de celle ou se trouve ce dossier) a dit à la famille que d’avoir choisi cette option alternative allait avoir des conséquences désastreuses.
Branle bas de combat, la fille veut voir « le responsable de l’établissement » les poings tout faits : j’étais d’accord avec l’option choisie (c’est faux), et je ne lui aurais pas parlé des risques (faux, aussi). En gros, elle m'accuserait d'avoir approuvé une option thérapeutique que je n'ai en réalité jamais voulue...
J’appelle mes collègues qui me donnent leurs arguments, mais qui ne me convainquent toujours pas (même si je les respecte)...
Ils me confirment que la fille est très pénible.
En gros, un magnifique merdier que j’avais évité assez élégamment, et qui me revient en pleine figure et à toute vitesse.
Impact prévu demain.
19:45 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)
Commentaires
J'ai hate d'être installé pour pouvoir gouter à ce merdier... J'ai déjà cette impression d'oppression dans mon calebute avant l'heure... attend voir... mais biensur la sensation qu'on me tient par les couilles et pas par n'importe qui, par mes futurs patients!
Écrit par : LL | 23/08/2006
Heureusement, ces situations sont assez rares. Pas de quoi porter un caleçon en plomb!
Incroyable, tu as enfin ouvert un blog avec des notes dedans!
Je te félicite!
Je t'ai rajouté illico à ma liste.
Écrit par : Lawrence | 24/08/2006
En revanche...ce sont bien toujours ceux qui sont à l'abri derriere leur status administratif qui emmerdent les autres...parce que vous n'allez pas me dire "médecin du travail"..c'est à croire qu'elle s'en veut d'avoir autant étudié pour n'avoir rien à foutre aujourd'hui.
Enfin moi je dis ça..c'est juste mon avis!
Écrit par : isabelle | 24/08/2006
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