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29/01/2008

Petit dictionnaire médico-technocratique (5).

Nouvelle réunion des instances de la clinique, donc nouveau tome du dictionnaire.

Je suis assez déçu de ma moisson, peut-être ai-je sommeillé après ma nuit presque blanche de garde.

Mais en fait, je crois que le vocabulaire médico-technocratique est finalement assez réduit et je me retrouve à noter des termes et expressions déjà cités dans les précédentes éditions de ce dictionnaire.

La pauvreté intellectuelle de ce jargon est encore accentuée par sa pauvreté sémantique.

 

 

On affine, on réfléchit, on homogénéise.

Une phrase forte qui peut s’appliquer à tout, et dont l’énonciation ne sert donc à rien

 

 

Rien n’est acté.

Verbe "acter" déjà cité.

Synonyme de « on a rien écrit », mais cette tournure de phrase permet de faire passer la pilule, sans pour autant s’abaisser à faire des excuses.

Exemple pratique : vous n’avez toujours pas souhaité les vœux du nouvel an à un parent proche, et on vous le reproche.

Répondez par « Je n’ai pas encore acté mes vœux ».

Pour un peu, c’est le parent qui va se sentir coupable.

 

 

Une problématique locale.

Déjà cité.

On savait que la problématique était partout. Mais là, elle est locale, nuance.

Cette périphrase suave décrit la situation d’une clinique ou une soixantaine de médecins avides et enragés sont en train de se bouffer le foie.

Délicat euphémisme, donc.

 

 

On va faire des flashs dans le livret d’accueil patient.

J’ai déjà signalé le pouvoir attractif de termes anglophones utilisés à la place de termes français usuels.

Dans ce cas, il ne s’agit pas de surprendre le patient en excès de vitesse de lecture, ni même de l’éblouir, mais simplement de l’informer au sujet de procédures mises en place dans la clinique.

En français : « On va étoffer les informations contenues dans notre livret d’information ». Mais ce lui qui oserait énoncer une telle phrase en pleine réunion des instances passerait au choix pour un simple d'esprit, ou un dangereux subversif.

 

On va formaliser le protocole.

Grand classique, déjà cité, mais c’est tellement bon…

 

On le laisse à l’appréciation du protocole.

Là, on passe à la vitesse supérieure.

On prête une existence propre à un protocole. Celui-ci est alors doué de raison, de sentiments, voire de sensibilité. Ceci lui permet d’apprécier l’action des êtres humains régis par lui.

Cela m’inspire la transposition suivante des lois d’Asimov que je tiens absolument à appeler pour la postérité « Les trois lois de la protologotique » (et non pas la proctologothique, science dont je vous laisse imaginer l'objet des recherches) :

 

Première Loi : Un protocole ne peut ni porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ;

Deuxième Loi : Un protocole doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres sont en contradiction avec la Première Loi ;

Troisième Loi : Un protocole doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n'entre pas en contradiction avec la Première ou la Deuxième Loi.

 

 

Globalement parlant, et de façon partagée

Entame de phrase sublime et vide de sens, et donc parfaitement consensuelle.

 

 

Il faut tout construire et formaliser.

Construire et formaliser ou formaliser et construire ? Là est la question.

Commentaires

je vois là l'arrivée sur le rythme de croisière,plus rien n'ayant du sens commun ne peut etre dit jusqu'à la rencontre avec la novlangue de l'accréditeur

Écrit par : doudou | 30/01/2008

bravo, j'adore, c'est exactement ça.
par contre, ça a le don de m'horripiler en réunion. Mais je nai pas encore trouvé la solution pour mettre les pieds dans le plat l'air de rien, comme eux !
tout un métier, vous dis-je !

Écrit par : sentinelle | 31/01/2008

>Sentinelle: fais comme moi, note les! (ça a changé ma perception de ces réunions qui sont ainsi devenues bien moins inintéressantes)

Écrit par : lawrence | 01/02/2008

Les commentaires sont fermés.