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16/06/2008

L’égyptien.

Alors que Youssef Chahine se meurt, je vois ce matin un de ses compatriotes d’une cinquantaine d’années.

Il n’a pas grand chose pour lui : sans papier « intégré » en France depuis 30 ans, plus ou moins en instance d’expulsion, sorti récemment de prison, il fume et a des douleurs dans la poitrine depuis 1 mois.

Ces douleurs quasi quotidiennes surviennent surtout à l’effort, et irradient dans le bras gauche, mais il est vrai qu’elles peuvent aussi évoquer aussi une oesophagite.

Donc, si une chose est certaine dans son histoire, c’est qu’il faut faire rapidement la part des choses entre l’œsophage et les coronaires.

En effet, des douleurs quasi quotidiennes pour des efforts de la vie courante sont quand même particulièrement inquiétantes dans le cas ou ce sont ses coronaires qui le font souffrir.

Il est allé consulter dans deux services d’urgences distincts. A chaque fois, l’ECG, et je le présume, les enzymes étaient normales. Comme vous le savez, cela n’élimine pas une origine coronaire, notamment si les douleurs sont intermittentes.

Chaque fois, on l’a fait sortir en lui disant d’aller consulter un cardiologue (Ah bon, il n’y en a plus au CHU ?)

 

Si il avait été consul d’Egypte, ou mieux, français, l’aurait-on pris en charge de la même façon ? Ne l’aurait-on pas « mis dans un coin », en cardio ou ailleurs, le temps de lui faire une épreuve d’effort et une échographie cardiaque qui auraient enfin répondu à ce doute pénible, coronaire, ou œsophage ?

 

J’ai fait l’échographie cardiaque ce matin, elle est normale. J’ai programmé une épreuve d’effort le jour même, pas à l’hôpital car le délai est à 2 mois, mais dans une clinique privée (avec laquelle je n’ai aucun lien).

 

Je n’ai pas de prévision sur le résultat : précocement positif, ou totalement négatif. Je n’exclus même pas qu’il ait un peu mis en scène des douleurs pour retarder sa procédure de reconduite aux frontières, mais je lui laisse le bénéfice du doute.

 

La seule chose dont je suis sûr, est que le doute tue en médecine, et qu’un patient, qui qu’il soit et quoiqu’il ait fait mérite qu’on le soigne avec un minimum de conscience et de respect.

Et pourtant, vous savez que je n’ai rien d’un dangereux médecin gauchiste ;-)

Commentaires

Un urgentiste ne doute pas, il sait.
Un urgentiste ne soigne pas, il oriente.
Malheureusement, la majorité des médecins ne retiennent de leur activité que leur spécificité en oubliant l'essentiel: le patient. En ne retenant que la spécificité, on oublie qu'avant d'être urgentiste, cardiologue, dermatologue, le premier diplome reçu est celui de médecin.

Écrit par : stephane | 16/06/2008

Je ne sais pas si c'est le repas de midi ou le poncif à la con de Stéphane qui me donne envie de dégueuler !!
Sacrée Maladie de Sachs !!

Écrit par : kropotkine | 16/06/2008

C'est quoi la maladie de sachs?

Écrit par : stephane | 16/06/2008

Je remercie Kropotkine qui m'a fait découvrir un beau texte (
Un extrait: ..." Je m'arrête à la première supposition, pour revenir ensuite à la seconde ; j'admets que vous avez reçu une éducation scientifique. Supposons que vous allez devenir... médecin.

Demain, un homme en blouse viendra vous chercher pour voir une malade. Il vous mènera dans une de ces ruelles, où les voisines se touchent presque la main par-dessus la tête du passant ; vous montez dans un air corrompu, à la lumière vacillante d'un lampion, deux, trois, quatre, cinq étages couverts d'une crasse glissante, et dans une chambre sombre et froide vous trouvez la malade couchée sur un grabat, recouverte de sales haillons. Des enfants pâles, livides, grelottant sous leurs guenilles, vous regardent de leurs yeux grands ouverts.

Le mari a travaillé toute sa vie des douze ou treize heures à n'importe quel labeur ; maintenant il chôme depuis trois mois. Le chômage n'est pas rare dans son métier ; il se répète périodiquement toutes les années ; mais autrefois, quand il chômait, la femme allait travailler comme journalière... laver vos chemises peut-être, en gagnant trente sous par jour ; mais la voilà alitée depuis deux mois et la misère se dresse hideuse devant la famille.

Que conseillerez-vous à la malade, Monsieur le docteur ? vous, qui avez deviné que la cause de la maladie, c'est l'anémie générale, le manque de bonne nourriture, le manque d'air ? Un bon bifteck chaque jour ? un peu de mouvement à l'air libre ? une chambre sèche et bien aérée ? Quelle ironie ! Si elle le pouvait, elle l'aurait déjà fait sans attendre vos conseils !

Si vous avez le cœur bon, la parole franche, le regard honnête, la famille vous contera bien des choses. Elle vous dira que de l'autre côté de la cloison, cette femme qui tousse d'une toux qui vous fend le cœur, est la pauvre repasseuse ; qu'un escalier plus bas, tous les enfants ont la fièvre ; que la blanchisseuse du rez-de-chaussée, elle non plus ne verra pas le printemps, et que dans la maison à côté c'est encore pis.

Que direz-vous à tous ces malades ? Bonne nourriture, changement de climat, un travail moins pénible ?... Vous auriez voulu pouvoir le dire, mais vous n'osez pas, et vous sortez le cœur brisé, la malédiction sur les lèvres.

Le lendemain vous réfléchissez encore aux habitants du taudis, lorsque votre camarade vous raconte qu'hier un valet de pied est venu le chercher, en carrosse cette fois-ci. C'était pour l'habitante d'un riche hôtel, pour une dame, épuisée par des nuits sans sommeil, qui donne toute sa vie aux toilettes, aux visites, à la danse et aux querelles avec un mari butor. Votre camarade lui a conseillé une vie moins inepte, une nourriture moins échauffante, des promenades à l'air frais, le calme de l'esprit et un peu de gymnastique de chambre, pour remplacer jusqu'à un certain point le travail productif !

L'une meurt parce que, toute sa vie durant, elle n'a jamais assez mangé, ne s'est jamais suffisamment reposée ; l'autre languit parce que durant toute sa vie elle n'a jamais su ce que c'est que le travail...

Si vous êtes une de ces natures mollasses qui se font à tout, qui, à la vue des faits les plus révoltants se soulagent par un léger soupir et par une chope, alors vous vous ferez à la longue à ces contrastes et, la nature de la bête aidant, vous n'aurez plus [lacune] de vous caser dans les rangs des jouisseurs pour ne jamais vous trouver parmi les misérables. Mais si vous êtes «un homme», si chaque sentiment se traduit chez vous par un acte de volonté, si la bête n'a pas tué l'être intelligent, alors, vous reviendrez un jour chez vous en disant : «Non, c'est injuste, cela ne doit pas traîner ainsi. Il ne s'agit pas de guérir les maladies, il faut les prévenir. Un peu de bien-être et de développement intellectuel suffiraient pour rayer de nos listes la moitié des malades et des maladies. Au diable les drogues ! De l'air, de la nourriture, un travail moins abrutissant, c'est par là qu'il faut commencer. Sans cela, tout ce métier de médecin n'est qu'une duperie et un faux-semblant.» ...
L'auteur, vous avez du deviner.
Merci encore kropotkine, j'ai découvert avec le temps qu'aller au delà des apparences et de l'insulte, permet souvent de s'enrichir. Je donne le bâton pour me faire battre avec mes poncifs à la C..

Écrit par : stephane | 16/06/2008

Ah AH ... je crois qu'en effet dangereux gauchiste c'est la bonne expression ! merci pour cette petite tranche de vie je ne viens ici que trop rarement ! Y viva la revolucion yel El che passmore !
soir dit en passant il en a de la chance le collègue Stephane de toujours savoir j'aimerais bien qu'il me donne sa recette ... il aurait pu dire qu'en ne retenant que la specificité on oublie la sensibilité mais la c'en est trop, bon allez je retourne me coucher.

Écrit par : urgences matin | 16/06/2008

"Un urgentiste ne doute pas, il sait. Un urgentiste ne soigne pas, il oriente". On pourrait jouer au diplomate qui dans sa prescience trouve les interstices de compréhension pour valider une telle sentence. Mais n'ayant ni le temps ni l'envie et pour avoir douté comme soigné aux urgences, je me réserve le droit de ne pas justifier un sophisme patent. Quant au reste: combien même une idée serait juste et noble à en chier des aménités à longueur d’hémisphère, la dilution affligeante et soporifique consistant à rebattre en une formulation assommante ses contours les plus évidents jusqu’au sommaire, la dépèce de toute pertinence pour la facilité d’une vacuité rance où chaque mot agencé à l’autre est un agglomérat de faix, un pertuis de plus faisant le renom d’une béance. En somme, une sorte de langue de bois du pauvre où l’évidence se drape d’une solennité pompeusement ridicule, où la démocratisation de l’écrit trompe l’insignifiant, le ressassé, le banal pour lui faire croire en sa compétence. Oui grand Dieu, bien sur que le patient doit être au centre de tout comme les gens du milieu sont au centre de toutes les peines depuis la conscience. Bien sur que cet arrogant et horrible médecin, caution et réceptacle de toutes les défaillances de l’humaine dénature, et qui ne songe qu’au dépassement d’honoraires pour aller jouir honteusement à Malte, doit faire amande honorable et ne plus penser nuit au jour qu’au bien être de cet alibi à conscience que sont les hémorroïdes de madame Machin et la diarrhée de monsieur Bidule. Oui grand Dieu, bien sur que le spécialiste est d’abord médecin comme le médecin n’est jamais homme et comme l’arbre ne pousse rarement hélas loin de la pomme. On exige, On veut, On estime, On revendique cette santé pour tous et pour laquelle beaucoup n’ont rien fait si ce n’est rester droits dans leurs blouses. Il est vrai qu’au temps du césarisme éclairé, du pluralisme imparfait, du volontarisme bobo et de la citoyenneté écolo, il est des phrases rococo aux assonances nauséeux de truismes démago. Le bien c’est bien, le mal c’est mal, le méchant c’est le ponte et l’Enfer c’est les autres. Merci bel ami Stéphane, la sentence en couperet est révolutionnaire et tes patients ont beaucoup de chance ! Alors bien sur la liberté d’expression a ses travers tout comme la démocratie offre la possibilité de jugement à la pléthore d’imbéciles. Et de grâce, ne soyez point injuste envers moi. Ne poussez pas ces cris d’orfraie républicains ou d’effarouchées pucelles à moitié putains pour défendre le moins mauvais des systèmes humain où l’asservissement par le consentement consumériste donne des élans d’espoirs aux plus défaitistes. Ce texte de Kropotkine est d’un autre temps où l’utopie se moquait de l’homme (ravi de t'avoir fait découvrir ce que tu ignores), lorsque moi hélas je ne suis qu’un malade égaré dans une salle d’attente à lire des revues surannées et qui esquisse un sourire nerveux lorsqu’il tombe sur la banalité en action. Car après tout, les savants, c’est vous ! Les sachants, c’est vous ! Alors tant de lieux communs, c’est fou ! Putain, j'ai encore la nausée !!

Écrit par : kropotkine | 16/06/2008

Effectivement les patients ont de la chance puisque je n'en soigne pas.
L'enfer ce n'est pas les autres mais nous même; encore une phrase rococo avec un truisme. Ca ne va pas améliorer la nausée.
Les sachants, je ne sais pas, il me semble que la situation n'a pas énormément changé depuis qu'un auteur du début du siècle précédent écrivait ceci
: "Car la médecine étant un compendium des erreurs successives et contradictoires des médecins, en appelant à soi les meilleurs d’entre eux on a grande chance d’implorer une vérité qui sera reconnue fausse quelques années plus tard. De sorte que croire à la médecine serait la suprême folie, si n’y pas croire n’en était pas une plus grande, car de cet amoncellement d’erreurs se sont dégagées à la longue quelques vérités."
La littérature est un bon remède à la nausée.

Écrit par : stephane | 17/06/2008

Magnifique interprétation ! La sérénité du sage face à l’agitation qui se compromet. Admirable ! Ainsi donc cher ami récitant, vous ne soignez pas mais avez la facilité, grande qualité, de proclamer. Je comprends mieux l’absurdité de vos sentences affirmatives tintant comme une double peine à l’orée d’un amalgame pédantesque. Je saisi mieux l’exigence anciennement moderne de patients tellement coupables que le destin, Thémis ou l’équité divine se charge magnanime de racheter leurs fautes. Vous jugez la "majorité des médecins" oublieux de toute humanité, affalés dans leurs spécialités et privilèges, reléguant le patient, ce toujours pauvre et noble patient à la condition de "cas", de numéro, d’insignifiant, et Diable que cela est parfois nécessaire. Je n’aime pas cette généralisation nauséabonde, ce jugement à l’emporte-pièce, votre simplification mutilant le vrai, vos assertions de camelot en foire. Et de grâce, épargnez-moi vos citations asthmatiques d’un temps perdu que l’on tourne et retourne et enfile selon l’humeur et le dessein du moment. Car s'il est vrai que la littérature est un remède à la nausée, la bêtise quant à elle est hélas un germe résistant.

Écrit par : kropotkine | 17/06/2008

Pfffuuuuut!
Fin de partie.
Cet échange devient amer et le point Goodwin se rapproche.
Ceci me désole d'autant plus que je vous "connais" depuis longtemps (l'un virtuellement, l'autre en vrai) et que je vous apprécie tous les deux.
Si vous désirez poursuivre cette conversation, merci de le faire directement par vos mails respectifs.

Écrit par : lawrence | 17/06/2008

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