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11/07/2008

Et c'est parti...

Mon cher Marc,

 

Je suis descendu ce matin chez mon médecin Hermogène, qui vient de rentrer à la Villa après un assez long voyage en Asie. L’examen devait se faire à jeun : nous avions pris rendez-vous pour les premières heures de la matinée. Je me suis couché sur un lit après m’être dépouillé de mon manteau et de ma tunique. Je t’épargne des détails qui te seraient aussi désagréables qu’à moi-même, et la description du corps d’un homme qui avance en âge et s’apprête à mourir d’une hydropisie du cœur. Disons seulement que j’ai toussé, respiré, et retenu mon souffle selon les indications d’Hermogène, alarmé malgré lui par les progrès si rapides du mal, et prêt à en rejeter le blâme sur le jeune Iollas qui m’a soigné en son absence. Il est difficile de rester empereur en présence d’un médecin, et difficile aussi de garder sa qualité d’homme. L’œil du praticien ne voyait en moi qu’un monceau d’humeurs, triste amalgame de lymphe et de sang. Ce matin, l’idée m’est venue pour la première fois que mon corps, ce fidèle compagnon, cet ami plus sûr, mieux connu de moi que mon âme, n’est qu’un monstre sournois qui finira par dévorer son maître.

 

 

Mémoires d’Hadrien. (1951)

Marguerite Yourcenar

 

18:26 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (7)

Commentaires

ahahaha!!!!!!!!!!!!!!!!! Tu l'avais déjà lu ou j'ai fait un émule?

Écrit par : Hérisson | 11/07/2008

Tu as fait un émule!

Écrit par : lawrence | 11/07/2008

c'est malin ! il va falloir encore que je trifouille 2 tonnes de bouquins pour pouvoir le relire !!

Écrit par : totoro | 12/07/2008

Je l'ai reconnu dès la deuxième ligne ! C'est un piège : non seulement tu vas adorer, mais en plus, tu vas être obligé de lire tout Yourcenar, après ça...

Écrit par : Pascal | 12/07/2008

Pascal a raison ;-)

Écrit par : Hérisson | 12/07/2008

Une autre vision sur le corps traitre:
"C’est dans la maladie que nous nous rendons compte que nous ne vivons pas seuls, mais enchaînés à un être d’un règne différent, dont des abîmes nous séparent, qui ne nous connaît pas et duquel il est impossible de nous faire comprendre: notre corps. Quelque brigand que nous rencontrions sur une route, peut-être pourrons-nous arriver à le rendre sensible à son intérêt personnel sinon à notre malheur. Mais demander pitié à notre corps, c’est discourir devant une pieuvre, pour qui nos paroles ne peuvent pas avoir plus de sens que le bruit de l’eau, et avec laquelle nous serions épouvantés d’être condamnés à vivre."
Le coté de Guermantes I
M. Proust

Écrit par : stephane | 13/07/2008

Très belle citation!

Écrit par : lawrence | 13/07/2008

Les commentaires sont fermés.