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13/07/2008

Acuité.

« La profession de médecin m’aurait plu ; son esprit ne diffère pas essentiellement de celui dans lequel j’ai essayé de prendre mon métier d’empereur. Je me passionnai pour cette science trop proche de nous pour n’être pas incertaine, sujette à l’engouement et à l’erreur, mais rectifiée sans cesse par le contact de l’immédiat et du nu. »

 

« La technique que j’ai dû élaborer dans ces postes médiocres m’a servi plus tard pour mes audiences impériales. Être tout à chacun pendant la brève durée de l’audience, faire du monde une table rase où n’existaient pour le moment que ce banquier, ce vétéran, cette veuve ; accorder à ces personnes si variées, bien qu’enfermées naturellement dans les étroites limites de quelque espèce, toute l’attention polie qu’aux meilleurs moments on s’accorde à soi-même, et les voir presque immanquablement profiter de cette facilité pour s’enfler comme la grenouille de la fable ; enfin consacrer sérieusement quelques instants à penser à leur problème ou à leur affaire. C’était encore le cabinet du médecin. »

 

« A l’âge où j’étais alors, ce courage ivre persistait sans cesse. Un être grisé de vie ne prévoit pas la mort ; elle n’est pas ; il la nie par chacun de ses gestes. S’il la reçoit, c’est probablement sans le savoir ; elle n’est pour lui qu’un choc ou qu’un spasme. Je souris amèrement à me dire qu’aujourd’hui, sur deux pensées, j’en consacre une à ma propre fin, comme s’il fallait tant de façons pour décider ce corps usé à l’inévitable. A cette époque, au contraire, un jeune homme qui aurait beaucoup perdu à ne pas vivre quelques années de plus risquait chaque jour allégrement son avenir ».

 

 

Mémoires d’Hadrien.

Marguerite Yourcenar

11:23 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (0)

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