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31/10/2008

La thrombose veineuse superficielle.

Je vois arriver une jeune femme qui désire bénéficier d’un doppler veineux de contrôle dans le cadre d’un bilan de thrombose demandé par son angiologue.

Je suis un peu curieux, je creuse donc un peu l’histoire.

Durant l’été, elle fait une thrombose veineuse superficielle d’une branche antérieure de la grande veine saphène, environ à mi cuisse.

Le diagnostic de ce que l’on appelle improprement « paraphlébite » est facile : cordon induré sous cutané, inflammatoire, sur le trajet d’une veine superficielle. Par ailleurs, cette jeune femme qui n’a aucun antécédent thrombo-embolique personnel ou familial a eu une seule grossesse parfaitement normale. Elle a toutefois hérité de sa mère un réseau superficiel déplorable, comme en témoignent ses nombreuses varices. Son généraliste l’envoie à un angiologue qui confirme le diagnostic par un doppler, débute un traitement par HBPM, et instaure une surveillance hebdomadaire par doppler. Les signes cliniques disparaissent, la thrombose s’organise. L’angiologue demande un bilan de thrombose et conseille vivement à sa patiente de faire un stripping.

 

Autant le diagnostic de thrombose veineuse superficielle est simple, autant sa prise en charge est très mal codifiée.

Enfin, « simple », à ceci près qu’il faut toujours avoir en tête qu’une thrombose veineuse, superficielle ou non, peut avoir un facteur favorisant sous jacent peu sympathique.

On se rappelle tous de ce malheureux Trousseau qui s’est diagnostiqué un cancer viscéral longtemps avant les premiers signes cliniques, car il a constaté sur lui-même ce qui allait devenir le « signe de Trousseau » (1) : « Je suis perdu, une phlébite qui vient de se déclarer cette nuit ne me laisse plus aucun doute sur la nature de mon mal. »

 

Le tableau suivant, tiré d’un article du J Vasc Surg, résume les facteurs pro-thrombotiques(2).

 

Photobucket

 

Il n’existe aucune recommandation indiquant qu’il faille faire un bilan de thrombose systématique après une thrombophlébite. Dans le cas de cette patiente, dont c’est le premier épisode, qui présente des varices importantes et sans aucun point d’appel pour une cause génétique ou pour une maladie de système, je pense que l’on aurait pu s’en passer. Bien évidemment, en cas de thrombose veineuse sans cause évidente, il ne faut pas hésiter à faire un bilan de thrombophilie chez un sujet jeune (surtout si la thrombose est récidivante) et une recherche de néoplasie chez le sujet plus âgé.

 

La surveillance hebdomadaire chez cette patiente dont les symptômes ont rapidement régressé a pour seul intérêt de facturer à chaque fois un EJQM004 à 75.60 euros.

3 fois EJQM004, ça rend le caillot rentable.

 

Quid du traitement en lui-même ?

Là, règne le flou le plus complet. Il n’existe aucune étude fiable : « The methodological quality of most of the trials was poor » (3)

Deux traitement sortent toutefois du lot: les HBPM à dose préventive et les AINS par voie générale. Seuls ces deux traitements semblent diminuer l’extension de la thrombose par rapport au placebo.

La durée du traitement ? Entre 10 jours, et 1 mois ! Nous n’en savons pas plus.

En cas d’insuffisance veineuse tronculaire, une saphénectomie pourra bien sûr être proposée à distance.

 

Tout cela pour dire que pour cette pathologie, ce qui est rare en cardiologie, la science cède en grande partie le pas à l’expérience clinique individuelle.

 

Merci au généreux donateur de l’article des Cochrane Database of Systematic Reviews.

 

 

 

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(1) Trousseau A. Phlegmatia alba dolens. Clinique Médicale de l'Hôtel Dieu. Paris Baillière Ed, Paris 1865 : 654-712.

 

(2) Mark H. Meissner et coll. Acute venous disease: Venous thrombosis and venous trauma. J Vasc Surg 2007;46:25S-53S.

 

(3) Di Nisio M, Wichers IM, Middeldorp S. Treatment for superficial thrombophlebitis of the leg. Cochrane Database of Systematic Reviews 2007, Issue 2. Art. No.: CD004982. DOI: 10.1002/14651858.CD004982.pub3.

 

 

 

 

07:33 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (5)

Commentaires

Marrant vos billets, en effet avec un peu de perspicacite, pas mal de curiosite , vos ecrits sont des sortes de pieces de puzzle,eparpillees d abord puis venant ensuite parfaitement s encastrer dans un nouveau billet, dans ce cas, la patiente est bien celle du billet du 8 juillet 2008, on espere que la brave femme ne va pas se reconnaitre!!!!

Écrit par : therese Priest | 31/10/2008

Perdu, ce n'est pas elle!

Écrit par : lawrence | 31/10/2008

My pleasure.

Écrit par : yanns | 31/10/2008

hum...Dubitatif, mon cher Watson, dubitatif.....

Écrit par : therese Priest | 31/10/2008

dans une littérature pauvre (avec de tete comme meilleure revue de référence les annals of internal medecine) osons parler un peu d'expérience ( je vais feter cette année vraisemblablement ma 20000 écho veineuse):
- la prescription de recherche d'une thrombophilie héréditaire est beaucoup trop large en général, quasiment abusive sur une tvs variqueuse qui comporte deux des éléments de la triade de Wirchow :la stase sanguine et des altérations de la fonction endothéliale, en tvp pour un premier accident la pression de conformité augmente la prescription la difficulté est l'obtention du prélévement avant toute prescription anticoagulante ce qui implique la disponibilité très rapide de l'écho ,ne pas oublier le profil inflammatoire général et surtout les APL premier diagnostic brut à mon avis,un cas particulier pour moi un accident premier femoral profond hors chirurgie a toujours une étiologie grave
- mon choix de traitement est de mauvaise foi souvent une hbpm à posologie curative car on retrouve très souvent à moins de 10 cm une perforante directe ou une crosse saphène et cette politique agressive en plus dispense de la surveillance secondaire
_ayant vu des dizaines d'embolie pulmonaire à partir d une belle tete de caillot pendouillant de la crosse Si dans la lumière fémorale je suis très large sur les indications de ligature ostiale en extreme urgence en différant l 'exérese variqueuse à quelques semaines ou mois après disparition de l 'inflammation ce qui diminue les douleurs et les troubles trophiques
-pour le cancer la situation est simple soit il est connu soit vous le trouverez dans 6 mois mais en aucun cas maintenant donc de la pédagogie sur la surveillance clinique et un débat sans fin sur les explorations ultérieures
- enfin admirons la subtilité de la ccam entre ejqm004 tout venant et ejqm003 recherche de thrombose profonde au meme tarif, j'avoue savoir qu 'existe un code controle à demi tarif perdu au milieu des pages des radiologues reprenant la cotation NGAP antérieure mais bien sur personne ne s'en sert ! je ne fais que très peu de controles rapides 10% en TVS moins de 50% en TVP que je peux toujours argumenter cliniquement comme examen complet alors pas de remords!
- enfin en aparté un point dans Prescrire de novembre sur thrombopénie et Arixtra la présentation visite médicale m'avait semblé atteindre des sommets dans le bourrage de crane et on nous promet la meme bientot dans l 'indication syndrome coronarien aigu

Écrit par : doudou | 01/11/2008

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