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05/11/2008
L’orchestre rouge.
Le neurologue : migraine.
Le diabétologue : problème hypophysaire, mais rien à faire de particulier.
L’algologue : morphine.
Le psychiatre : uhmm uhmm, c’est organique, uhmm, uhmmm
Le radiologue : énorme fibrome utérin.
Le cardiologue : c’est pas cardio.
Bon c’est bien beau tout cela, mais cette dame de 45-50 ans a mal au crâne depuis 5 ans, elle boit 6 litres d’eau par jour et sa présentation générale et ses plaintes multiples évoquent irrésistiblement ce que l’on appelle pudiquement un « problème fonctionnel ».
Et le généraliste dans tout cela, une dame en l’occurrence ?
Le prénom indiqué sur l’ordonnance évoque l’immédiat avant guerre (pas celle d’Algérie, la mondiale, la seconde, quand même), ce que le couple me confirme.
En tout cas, elle a une drôle de conception du métier.
La patiente a mal au côté gauche : patch de trinitrine (bonjour le mal de tête !)
La patiente « gonfle » avec ses 6 litres d’eau quotidiens : lasilix sans aucun bilan rénal ou cardiologique. Et bien sûr, maintenant la patiente est devenue une junkie au lasilix…
Le problème est que cette généraliste est la seule, qui pour l’instant lui ait accordé une oreille compatissante, et ne l’ait pas classée d’emblée dans le groupe infamant des zozos.
J’ai passé un coup de téléphone à une copine interniste pour voir si ce chaos lui évoquait quelque chose. J’aime bien mon interniste, même ses quelques cheveux blancs ajoutent à son charme. Je l’appelle dès que je me retrouve confronté à un problème non cardiologique, ce qui finalement arrive assez souvent. Elle palie à mon ignorance encyclopédique de tout ce qui n’est pas cardio-vasculaire.
Elle a eu le même diagnostic que moi : il faut changer de généraliste.
Je ne sais pas si cette patiente a un kangourou accroché au plafond ou si elle a réellement quelque chose. En tout cas, elle a parfaitement conscience que tous les médecins qu’elle a consultés pensaient qu’elle avait un grain (tous, sauf le psychiatre et donc son médecin traitant).
Comme j’ai l’esprit de contradiction, je crois le contraire.
Je lui ai fait la morale pour qu’elle change de généraliste, il manque en effet clairement un chef d’orchestre pour organiser toute cette cacophonie.
21:24 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (13)
Commentaires
bien sur je dis volontiers le contraire:prendre en charge efficacement un zinzin sans qu'il puisse penser une seconde qu'on le considère comme tel fait partie du savoir faire professionnel fondamental, pour les détails pratiques du calme et de l'imagination à débattre j'irais effectivement parfois jusqu'au minimun iatrogènique( quelques céphalées sous nitré peuvent empecher la conversion de divaguer vers des rivages dangereux dépressifs ou charlatanesques )
Écrit par : doudou. | 05/11/2008
C'est bizarre de gonfler avec 6 litres d'eau (ça va dans les cellules) donc pas trop d'œdèmes normalement sauf si le sel suit. Même les pires potomanes ne sont pas oedémateux.
Je présume qu'elle n'est pas diabétique (sucré), est ce que quelqu'un lui a proposé une petite épreuve de restriction hydrique histoire de pas passer à coté du diabéte insipide plutôt central avec les céphalées.
Bon je dis ça comme ça en passant.
Écrit par : stephane | 05/11/2008
C'est vrai, il manque un endocrino chevronné!
Écrit par : david vincent | 05/11/2008
@stéphane
si sa glycémie est normale, en effet diabète insipide !
traitement simple > ADH spray nasal il me semble !
Écrit par : Antoine | 05/11/2008
Je persiste à penser qu'il faut un test de restriction hydrique bien conduit. Il permettra de faire la différence entre le diabète insipide et la potomanie. Si les urines se concentre durant l'épreuve, on pourra penser à la potomanie (bien qu'il faille parfois y retourner à deux fois) si les urines restent hypotoniques, le test à l'ADH permettra de faire la différence entre diabète insipide central (adh sensible) et néphrogénique (adh insensible).
Vive les épreuves fonctionnelles...
Écrit par : stephane | 05/11/2008
Woaaa j'adore les medecins. Vous étes passionnant.
Écrit par : Marc | 05/11/2008
>Stephane, Antoine et David Vincent: elle va faire un tour en endocrino dans une dizaine de jour, on verra bien...
Écrit par : lawrence | 06/11/2008
un kangourou accroché au plafond... je la note
Écrit par : nine | 06/11/2008
Journée merdique mais depuis que je lu "un kangourou accroché au plafond" je rigole tout seul devant mon écran :) Merci.
En allemand, on ne parle pas d'une araignée dans le plafond, on fait mieux : on a un verbe que l'on peut traduire radical pour radical par "araigner". "ho mais tu arainges totalement".
Écrit par : xavier | 06/11/2008
La medecine ou l art d etre decoupe en tranches selon la specialite. DE plus avec ce bel exemple, on peut comprendre le trou beant de la secu.....
Écrit par : therese Priest | 06/11/2008
Le "un kangourou accroché au plafond" n'est pas de moi, mais j'ai lu cette expression dans le bouquin de Vikas Swarup:(http://grangeblanche.hautetfort.com/archive/2007/08/30/bolitterature.html).
L'expression m'a toujours fait rire (surtout que la victime dans le bouquin était...autralien!)
Écrit par : lawrence | 06/11/2008
Amazon et vite :) Ca tombe bien, j'en ai d'autres à commander.
Dans mon dernier commentaire, je voulais écrire "tu araignes". "Du spinnst!" De "die Spinnen" l'araignée.
La prochaine fois que qlqn me raconte des salades, je tente un "mais tu kangouroutes ou quoi??"
Écrit par : xavier | 06/11/2008
Ce serait donc un diabète insipide et pas une potomanie ?
ERARE HUMANUM EST...
PERSEVERARE DIABOLICUM
Le MG peut faire des erreurs mais ne doit pas persévérer.
C'est triste à dire, mais je crains qu'effectivement il faut changer de MG (la confraternité a ses limites).
Et la consultation avec un endocrino me semble une très bonne idée.
Écrit par : Dr Sangsue | 08/11/2008
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