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04/05/2007
Les bonnes questions.
Une femme de 50 ans arrive à la clinique et son pronostic est défavorable.
Coronaire droite occluse de façon chronique, gros infarctus antérieur récent revascularisé tardivement. Fraction d’éjection 30-35%.
Sur le coup, je n’avais pas de chiffre précis, mais je le savais. Après avoir vérifié, 10-15% de mortalité à 1 an et 4 mois dans une grosse étude assez récente (CAPRICORN).
Je vais la voir.
Elle est souriante et agréable.
D’emblée elle pose (malheureusement) les bonnes questions.
- Est-ce que ça va recommencer ?
Oui, c’est pour cela qu’il faudra vous surveiller.
- Quelle est mon espérance de survie ?
Euhh, normale si ça ne recommence pas.
Gros mensonge pour la deuxième réponse, donc. Ce qui n’est pas mon habitude. J'ai plutôt la réputation d'être un peu trop "factuel" avec les patients. J'ai une certaine inclinaison pour le vérisme.
J’étais terriblement gêné, mais comment répondre sincèrement à une question aussi directe un vendredi soir, au cours de notre première rencontre ? Elle m'a pris au dépourvu alors que j'avais abaissé mes défenses en cette fin de semaine.
On ne peut même pas louvoyer.
La notion d’espérance de survie est une notion purement statistique qui est peu applicable au niveau individuel. Si une maladie a une mortalité de 99% à un an, mais si votre patient appartient au 1% restant, pour lui, la survie est de 100%.
Je ne sais pas si je suis très clair, mais cette question d’espérance de survie est bien la pire que l’on puisse poser à un médecin (du point de vue du médecin).
Deux réponses possibles à une telle question : « normale » ou « abaissée ».
« Abaissée de combien ?
Et bien… ».
J’ai préféré mentir.
- Dernière question : Est-ce que mon cœur va récupérer ?
Il y a des chances, il faudra faire le point dans 6 mois.
Je retrouve un terrain plus stable ou la réponse ne tombe pas comme un couperet, et ou on peut moyenner. En plus, je renvoie la réponse à dans 6 mois (notion parfaitement vraie, par ailleurs). Comme dans les études, les critères intermédiaires sont plus faciles à manier (et manipuler) que les critères « durs » comme la mortalité, pour laquelle on ne peut pas tricher.
Je suis sorti en n'étant pas fier de moi et en regrettant les questions de la plupart des patients :
Je sors quand ?
Je pourrais avoir une permission ?
Comment je fais pour avoir la télé ?
Je peux continuer à boire du vin ? Je peux mettre du sel de régime?
Je peux continuer à… ? Enfin, vous voyez ce que je veux dire, Docteur….
Je pourrais continuer à jouer au foot ?
Quand je touche cet endroit, j'ai mal, c'est normal ?
Beati pauperes spiritu.
19:35 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (14)
03/05/2007
Lenin et Stalin.
Sans les « e », ce n’est pas une erreur.
Un des patients entrés ce jour à la clinique se prénomme « Lenin ». Nous avons beaucoup discuté de l'histoire de ce prénom qui est aussi celle du destin tragique de sa famille.
Ses parents étaient des républicains espagnols qui ont fui devant l’avance des troupes de Franco.
Le petit Lenin, âgé de 8 mois passe en France avec ses parents début 1939.
Son frère, né en France, devait s’appeler « Stalin ». L’état civil lui refuse ce prénom. Ses parents finiront par l’appeler « José ».
Le petit Lenin, qui a gardé son prénom et sa nationalité espagnole est appelé par ses proches « Ernesto ».
Autre référence, mais bien plus discrète aux idéaux de ses ascendants.
19:00 Publié dans Des patients... | Lien permanent | Commentaires (6)
02/05/2007
Restauration.
J’ai réinséré les images de la note « Kanagawa oki nami ura », que j’avais dû supprimer pour cause de manque d’espace mémoire.
La date de rédaction m’a stupéfait : 24/05/2005.
Presque 2 ans, comme le temps passe vite.
Pour une rediffusion, c’est ici.
13:20 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (3)