14/07/2006
Le cardiologue cardiaque.
J’avais presque oublié.
Je suis allé chercher la nuit dernière en unité un cardiologue d’une cinquantaine d’années en plein œdème pulmonaire. Je l'ai emmené en réa.
Il sait parfaitement ce qu’il a, et que la seule option thérapeutique, le remplacement valvulaire mitral est à haut risque chez lui (réintervention après des pontages en 2001, fonction ventriculaire gauche altérée, radiothérapie thoracique à l’adolescence…).
Il a tout analysé froidement, et se laisse aller à prendre des remèdes qu’il a toujours jugés inefficaces, parce que ces derniers temps, il s’étouffe toutes les nuits.
Dans la plupart des yeux des patients qui s’étouffent brutalement, on peut y lire la peur, la stupeur et l’incompréhension.
Dans les siens, uniquement le désespoir.
C’est encore pire.
Il devrait être opéré la semaine prochaine.
J’espère que tout se passera bien.
20:59 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : médecine
23/06/2006
De Moïse à Moïse, il ne s'en leva aucun comme Moïse
En recherchant le texte antique du Serment d’Hippocrate sur Wikipedia, je suis tombé sur une variante, attribuée au médecin et philosophe Moïse Maïmonide.
La première phrase glorifie l’amour pour son métier et la Vie, la seconde met en garde contre l’appât du gain.
Rien n’a donc vraiment changé depuis le XIIème ; les Hommes demeurent des Hommes, et ce, à jamais !
En allant à Cordoue, j’avais regardé sa statue, mais je n’étais pas allé plus loin.
L’article qui lui est consacré est, comme souvent, très intéressant.
Encore une autre façon de voir notre métier !
« Mon Dieu, remplis mon âme d'amour pour l'Art et pour toutes les créatures. N'admets pas que la soif du gain et la recherche de la gloire m'influencent dans l'exercice de mon Art, car les ennemis de la vérité et de l'amour des hommes pourraient facilement m'abuser et m'éloigner du noble devoir de faire du bien à tes enfants. Soutiens la force de mon cœur pour qu'il soit toujours prêt à servir le pauvre et le riche, l'ami et l'ennemi, le bon et le mauvais.
Fais que je ne voie que l'homme dans celui qui souffre. Fais que mon esprit reste clair auprès du lit du malade et qu'il ne soit distrait par aucune chose étrangère afin qu'il ait présent tout ce que l'expérience et la science lui ont enseigné, car grandes et sublimes sont les recherches scientifiques qui ont pour but de conserver la santé et la vie de toutes les créatures.
Fais que mes malades aient confiance en moi et mon Art pour qu'ils suivent mes conseils et mes prescriptions. Éloigne de leur lit les charlatans, l'armée des parents aux mille conseils, et les gardes qui savent toujours tout: car c'est une engeance dangereuse qui, par vanité, fait échouer les meilleures intentions de l'Art et conduit souvent les créatures à la mort. Si les ignorants me blâment et me raillent, fais que l'amour de mon Art, comme une cuirasse, me rende invulnérable, pour que je puisse persévérer dans le vrai, sans égard au prestige, au renom et à l'âge de mes ennemis. Prête-moi, mon Dieu, l'indulgence et la patience auprès des malades entêtés et grossiers.
Fais que je sois modéré en tout, mais insatiable dans mon amour de la science. Éloigne de moi l'idée que je peux tout. Donne-moi la force, la volonté et l'occasion d'élargir de plus en plus mes connaissances. Je peux aujourd'hui découvrir dans mon savoir des choses que je ne soupçonnais pas hier, car l'Art est grand mais l'esprit de l'homme pénètre toujours plus avant. »
10:03 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : médecine
22/06/2006
Honte bis
Je me suis permis de moderniser notre serment, aux lumières des pratiques médicales de certains; au moins ça a le mérite d'être clair:
« Je jure par Pluton, le divin, par Midas, aux oreilles d’Âne, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin que je remplirai, suivant mes forces et ma capacité, le serment et l'engagement suivant : Je mettrai mon expert comptable au même rang que les auteurs de mes jours, je partagerai avec lui mon un pourcentage raisonnable de mon avoir et, seulement en cas d’absolue nécessité, je pourvoirai à ses besoins ; je tiendrai ses enfants pour des frères, et, s'ils désirent partager leur héritage avec moi, je ne m’y opposerai point. Je ferai part de mes préceptes, des leçons orales et du reste de l'enseignement à mes fils, afin d’accroitre les revenus de la maison à ceux de mon maître et aux disciples liés par engagement et un serment suivant la loi du gain, mais à nul autre, pour ne pas former de concurrents. »
« Je dirigerai le régime des malades n'ayant pas la CMU à mon avantage et à celui de mes correspondants, qui ainsi m'en enverrons d'autres pour mon plus grand profit, suivant mes forces, mon jugement et leurs possibilités financières, et je m'abstiendrai de tout mal et de toute injustice, si cela est contraire à mon bien. Je ne me remettrai à personne du poison gratuitement, si on m'en demande, ni ne prendrai l'initiative d'une pareille suggestion ; semblablement, je ne remettrai à aucune femme un pessaire abortif. Je passerai ma vie et j'exercerai mon art dans l’opulence et la volupté. Je ne pratiquerai pas l'opération de la taille. Dans quelque maison que je rentre, j'y entrerai pour l'utilité des malades n'ayant pas la CMU, me préservant de tout méfait volontaire et corrupteur, et surtout de la séduction désintéressée des femmes et des garçons, libres ou esclaves. Quoi que je voie ou entende dans la société pendant l'exercice de ma profession, je tairai ce qui n'a jamais besoin d'être divulgué, regardant la discrétion comme un devoir en pareil cas, sauf si un éditeur est prêt à y mettre le prix »
« Si je remplis ce serment sans l'enfreindre, qu'il me soit donné de jouir heureusement de mes gains et de ma profession, honoré à jamais des banquiers et concessionnaires Porsche ; si je le viole et que je me parjure, puissé-je avoir un sort contraire. »
19:25 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : Médecine
Honte.
Un article du Monde m’a fait découvrir ce rapport. La CMU est la couverture des plus démunis en France. A ma connaissance, c'est-à-dire mon expérience et celle de mes confrères proches, l’organisme qui la gère a toujours payé les soins en temps et en heure. Mais pour certains, ça ne suffit pas. Pour certains, le gain prime sur tout, surtout les soins. Pour certains, la vocation est de toujours plus se gaver d’argent, même si on n’arrive pas à le dépenser. Pour certains, les indigents ne méritent pas leurs soins ; trop pauvres, incapables de payer 150, 200, 300 %. Qu’ils aillent se faire voir avec les autres pauvres, dans les dispensaires, ou à l’Hôpital ! Je suis curieux de savoir quelle inaction va mener le Conseil de l’Ordre…
Le serment d'Hippocrate est ici, pour mémoire.
17:35 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Médecine