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03/05/2006

15 ans de visite médicale.

« Prescrire » dans son numéro d’avril, propose un dossier (librement consultable) sur l’évaluation de la visite médicale en France depuis 15 ans.

J’ai souvent parlé de cette revue, qui se veut être un véritable contre-pouvoir vis-à-vis de la désinformation, trop souvent distillée par les firmes pharmaceutiques.

Il faut lire prescrire comme on lit le « Canard », c’est caustique, mais pas encore pris en défaut (une poignée de procès, tous gagnés).

Sa lecture est salutaire dans le sens qu’elle aiguise l’esprit critique. Il faut savoir dire non à la pensée unique du marketing des firmes. Il faut néanmoins apprendre à juger les nouvelles molécules, sans toutefois dénigrer systématiquement. Sylla est souvent pire que Charybde.

Dans ce dossier, la rédaction de « prescrire » résume 15 ans d’évaluation de la visite médicale par des médecins volontaires. Les évaluations se font à l’aide de formulaires qui sont analysés secondairement. Les « enquêteurs » sont relayés tous les un an et demi environ. Sauf erreur, leur nombre n’est jamais donné.

Que disent les chiffres ?

Ils sont malheureusement éloquents.

Deux exemples parmi d’autres :

En 1991-1992, le visiteur médical citait spontanément les effets secondaires dans 23% des cas, 77% ne les citaient pas.

En 2004-2005, 32% des visiteurs les citaient au moins partiellement (15% totalement, 17% partiellement), 62% ne les citaient pas, et 6% les niaient (alors qu’ils sont reconnus).

Depuis 1996, le décret R.5122-11 (ancien R. 5047-3) oblige les visiteurs médicaux à remettre au médecin l’avis de la Commission de la transparence (organisme public) émis sur la molécule présentée. En 1998-1999, premières années, 3% des visiteurs le faisaient. En 2004-2005, ils étaient encore 3%.

C'est vrai que cet avis est souvent "saignant", totalement à contre-pied du lyrisme de certains visiteurs. Ainsi, une statine récente, au budget publicité colossal (1 milliard de dollar par an) a obtenu un modeste ASMR V (rien de plus par rapport aux autres statines) à cette fameuse commission.

   

Bon, on ne peut pas demander à un visiteur de démolir son produit au cours d’une présentation. On ne peut pas, non plus,  lui demander de faire la liste de tous les effets secondaires d’une molécule (le plus souvent, le « Vidal » en donne une vingtaine).

  

Pourquoi ?

  

Tout simplement car il faut prendre conscience que ces présentations ne sont que de la publicité. Les visiteurs qui faisaient leur boulot en présentant leur molécule, et non en essayant de la faire prescrire à tout prix sont en voie de disparition.

C’est pourquoi je considère la visite comme du spam, ni plus, ni moins.

Je garde d’excellents rapports avec une poignée de visiteurs, mais je ferme dorénavant (très poliment) la porte aux autres.

Pour les jeunes médecins, « Prescrire » cite quelques ficelles du marketing des nouvelles molécules dans la rubrique « le mot de Gaspard » (également en accès libre)..

Amusez vous à les repérer dans votre pratique quotidienne !

- Multiplication des indications

- Création de produits successeurs

- Sensibilisation à la maladie avant lancement (c’est ma préferrée)

- Reformulation (nouvelles galéniques)

- Maximisation du brevet

- Pénétration de la clientèle (par le biais de services d’aide à l’observance, ou d’associations de malades).

 

Commentaires

Bonsoir,

Je lis votre blog avec plaisir.

Je travaille dans un laboratoire pharmaceutique. Donc je fais parti des "méchants". Je ne suis plus en France, donc je ne peux pas commenter Prescrire. Je pense que la profession essaie de devenir plus "éthique". Certains labos, plus que d'autres probablement.

Et oui l'industrie pharmaceutique est là pour gagner de l'argent. Le marketing est un outil. Il peut être plus ou moins bien utilisé.


Je me souviens d'une de vos notes "Je me souviens d’avoir pensé qu’ils étaient fous de prescrire des bêta-bloquants à des insuffisants cardiaques"

Et bien oui, c'etait une nouvelle indication, il a fallu en parler... Les publications ne suffisent pas.

Effectivement il ya des abus, des gens malformés, des mauvais mais comme dans toute profession.

Je travaille avec des médécins depuis plus de 10 ans. J'en ai vu des bons mais aussi des beaucoup moins bons. Leur seul interet : leur tiroir caisse. Ce qui n'est pas le plus grave. Pour autant, je ne pense pas que toute la profession médicale soit mauvaise.

Je sais par une de votre note que vous respectez les visiteurs medicaux. Les petits jeunes peuvent être bons ;-) laisser leur une chance.

Tout comme les laboratoires ont besoin des medecins, je pense que les medecins et les patients ont besoin des medicaments. Il n'y a pas d'un coté les bons et de l'autre les méchants...

Écrit par : Kez | 06/05/2006

Je ne crois pas que les visiteurs soient "méchants": ils font ce pourquoi on les paye, et c'est parfois très ingrat... et pas honnêtes... m'enfin, ils ne s'adressent pas non plus à des oies blanches!!! Encore que, je suis toujours surprise en cours de voir certains medecins interpellés lors des cours de pharmaco et dire "oui mais le labo il m'a dit..."
Moi j'adore jouer à reperer les "petits trucs" marketing... J'écoute et puis j'oublie...

Écrit par : shayalone | 06/05/2006

En unissant les forces des medecins ethiques et de l'industrie ethique, nous pourrions peut être eviter les abus denoncés dans cette note, celle intitulée The Constant Gardner et ce que l'on peut lire dans http://www.liberation.fr/page.php?Article=383233

Écrit par : kez | 19/05/2006

>kez: en effet, quelle histoire scabreuse...

Écrit par : Lawrence | 20/05/2006

Les commentaires sont fermés.