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18/04/2007

Stat magni nominis umbra.

C’est un peu exagéré, mais mon patron m’a encore un peu déçu tout à l’heure.

 

Patron au sens médical du terme, bien sûr.

Je l’ai connu jeune agrégé travaillant comme un fou pour maintenir sur les rails un service dont le patron avait une conception toute personnelle de la médecine.

Je l’ai connu quand il contrôlait les bilans biologiques des patients en fin de journée derrière l’interne. Et qu’il trouvait des choses à corriger !

Je l’ai connu avide de pouvoir, hégémonique et prêt à se battre pour récupérer un beau malade.

Il s’est taillé une belle réputation, car participait aux soins des patients qui passaient dans son service. Plus ou moins, certes, mais un correspondant qui lui envoyait un patient, même délicat, savait que ce dernier serait bien géré.

 

Le temps a passé.

Au départ de son patron, il est devenu un éphémère chef de service, avant d’être englouti dans la « fédération » puis dans le « pôle ». Ces changements technocratiques et incessants de dénomination me font bien rire. Pas lui.

 

Chaque service faisait un peu de tout, et le malade était géré de manière globale. Maintenant, on raisonne en unité fonctionnelle (coronaropathie, électrophysiologie, insuffisance cardiaque…) ou l’idéal, pour un malade cardiaque, est de ne relever que d’une de ces sous-spécialités. Sinon, gare à l’ataxie qui règne dans notre belle fédération de cardiologie. Nous allons au-delà du démembrement du malade en différents organes, nous en sommes au niveau tissulaire intra cardiaque. Dans quelques années, nous espérons bien arriver au stade cellulaire : « Docteur, je suis essoufflé : Oulàà, quel groupe de cardiomyoblastes vous fait souffrir ? »

 

Je pense que ces changements et la perte de pouvoir des médecins l’ont désabusé.

 

Et puis il y a un peu l’âge, mais ça n’explique pas tout.

 

Surtout, j’ai l’impression qu’il ne s’intéresse plus à son service, pardon, unité fonctionnelle.

 

Tout à l’heure, donc, je vois en consultation un patient qui vient d’être opéré de deux abcès cérébraux. Ce n’est pas commun. Et en plus, on a découvert au cours de l’hospitalisation une fuite mitrale sévère par rupture de cordages.

1+1= ?

Endocardite !

En fait, je n’ai pas de preuve indiscutable, puisque aucun germe n’a été mis en évidence pour l’instant (mais le généraliste l’avait traité empiriquement par des antibiotiques, pensant à je ne sais plus quoi, décapitant allègrement l’infection). Mais ce patient mérite largement d’être exploré en cardiologie, avant un geste chirurgical sur sa mitrale, dès que son état cérébral le permettra.

Je vais donc voir mon patron pour qu’il récupère le patient.

A la fin de mon explication, il me demande de dire aux neurochirurgiens qui me l’ont adressé de le contacter directement, lui ou son PH.

Bon, on se mord la queue dans cette histoire, je ne vois pas trop l’intérêt de repasser derrière moi pour en tirer les mêmes conclusions. Car, j’en suis certain, ce seront les mêmes.

Surtout je pense qu’il n’a pas écouté ce que je lui racontais, les pensées perdues dans le grand vide de l’espace intersidéral. Ou, encore pire, il s’en fiche totalement.

Pas grave, je vais le prendre au mot.

Je téléphone à l’interne de neurochirurgie et je lui demande de faire appeler le chirurgien le plus haut gradé qu’elle puisse trouver pour faire admettre ce patient.

Dix minutes plus tard chrono, l’infirmière coordinatrice (encore un machin inventé pour remplacer les surveillantes qui ne font plus que de la paperasse) me demande le dossier de ce patient qui rentrera lundi dans le service.

 

Tout ça pour ça…

Il y a quelques années, il serait venu le voir dans la salle de consultations et l’aurait pris sur le champ, quitte à le brancarder lui-même.

23:08 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)

Commentaires

la séparation des services est une chose mais le plus grave est le cloisonnement intracérébral
des médecins en nette phase aggravative;il y a trente ans nous étions pour les hospitalisés censés régler pneumo, diabéto,neuro de base puis il a fallu appeler le consultant pour donner un cp de diamicron supplémentaire,maintenant on en est à l'hypertensiologue dans un service de cardio !un éditorial semi récent du jacc: faut il transformer les plombiers en électriciens sur la stimulation multisite et les problèmes posés par des cursus trop marqués dans les sous spécialités
sinon c'est décidé je vote pour le candidat imposant le retour des pages roses dans les dictionnaires (pas pour moi je les ai apprises par coeur en cinquième à l'époque des soirées sans télé et du latin pour les scientifiques de la sixième au bac)

Écrit par : doudou | 19/04/2007

Tu ne crois pas si bien dire: on a un service d'hypertensiologie chez nous!

Écrit par : lawrence | 19/04/2007

Les commentaires sont fermés.