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06/01/2008

Interplast France.

Je voulais vous faire connaître cette petite ONG que j’ai découverte hier en regardant la fin d’un reportage sur Arte.

Les Docteurs Patrick Knipper, chirurgien plasticien, Christophe Carré, dentiste et Patrick Antoine, anesthésiste ainsi qu’une équipe paramédicale partent en pleine brousse africaine (sur les bords du fleuve Niger dans la campagne décrite par le reportage) afin d’opérer bénévolement les villageois.

Les pathologies sont multiples, délabrantes et parfois totalement inconnues dans nos pays développés.

Ainsi, ces praticiens prennent en charge aussi bien des les fentes labio maxillo palatines, que des abcès faciaux d’origine dentaire (les nomas) que certaines mycobactérioses (ulcères de Buruli).

Les conditions opératoires sont difficiles, vous pouvez l’imaginer.

Le respect des traditions locales est une des caractéristiques majeures de la prise en charge de l’équipe de Interplast France . Chaque consultation médico-chirurgicale se fait en même temps qu’une consultation de guérisseurs.

L’équipe occidentale ne les raille pas, ne les considère pas comme des importuns. Elle les respecte. Chacun son domaine: aux occidentaux le visible, aux guérisseurs l’invisible. Etre guérisseur demande près de 7 ans de formation, et il ne leur est pas permis d’exercer avant l’âge de 42 ans.

Cette coopération, rendue possible grâce à la médiation du Dr Moussa Maman (à la fois psychiatre en France et guérisseur là-bas) a permis aux médecins occidentaux de soigner des patients, qui avant, leur étaient soustraits.

Chaque intervention se déroule à l’air libre, sous le regard des guérisseurs et des villageois. Les guérisseurs sont très impressionnés par le travail de l'anesthésiste qui accompagne le patient vers le monde des esprits et ensuite l'en ramène.

La salle de réveil est une natte posée à même le sol.

L’anesthésiste a dit une phrase qui m’a marqué. En substance, ce qu’ils font par rapport aux misères africaines est totalement dérisoire, mais leur action change absolument tout pour le patient sur lequel ils sont intervenus.

Cela me rappelle la parabole de l’étoile de mer :

«Alors qu'il marchait à l'aube sur la plage, le vieux vit devant lui un jeune homme qui ramassait des étoiles de mer et les jetait à l'eau. Il finit par le rejoindre et lui demanda pourquoi il agissait ainsi. Le jeune homme lui répondit que les étoiles de mer mourraient s'il les laissait là jusqu'au lever du soleil.

Mais la plage s'étend sur des kilomètres et il y a des millions d'étoiles de mer, répliqua-t-il. Quelle différence cela va-t-il faire ?

Le jeune homme regarda l'étoile de mer qu'il tenait dans sa main et la lança dans l'écume. Il répondit : Cela fera une différence pour celle-ci.».

Pour les connaître un peu plus et les aider, c’est ici et surtout ici

12:05 Publié dans Interplast | Lien permanent | Commentaires (3)

Commentaires

J'ai aussi vu cette émission. Je dois avouer qu'au début je me suis dit "mais qu'est ce que c'est que ces cow boys qui vont en Afrique se faire la main" puis le fait qu'ils opèrent en plein air m'a choqué au début.
Ensuite, je me suis aperçu comme tu le dis dans ta note, qu'ils étaient tout à fait lucide sur le fait que leur action n'allait pas changer le sort de l'Afrique.
Certaines associations comme MSF sont assez virulentes contre ce genre d'initiatives, qui, il est vrai, ne favorise pas le développement de structures de soin locales, ni la formation de personnel local, qui sont la base d'une action pérenne.
Et puis leur raisonnement sur le fait d'opérer en plein air tient la route (et puis c'est principalement de la plastique, ou le risque infectieux est modéré)
Le fait de se rendre sur place permet de ramener le coût de 10000 euros (s'il avait fallu faire venir les patients en France) à 200 euros (si ma mémoire est bonne)
J'ai été nettement moins impressionné par les guérisseurs et leurs 7 ans d'étude, mais je pense que l'intelligence de cette association est d'avoir su travailler avec les acteurs locaux.
En fin de compte, ce sont des gens qui ont envie d'en aider d'autres, sans autre prétention.

Écrit par : dodo | 06/01/2008

>dodo:
Ce sont bien 10000 et 200 euros.
Je n'avais pas réfléchi au problème de l'absence de développement des structures locales.
D'un autre côté, je crois que si la petite avec sa fente labiale avait du attendre une prise en charge purement locale...
Je les ai aussi trouvé très humbles, très conscients de leurs limites, finalement assez loin du discours de certaines grosses ONG.
Aider les autres avec nos moyens dérisoires et en les respectant , un point c'est tout...
Ca me semble pas mal comme credo.





(j'ai fait sauter ton doublon!)

Écrit par : lawrence | 06/01/2008

Bonjour, je suis l'anesthésiste du reportage
Je suis tombé par hasard sur votre blog en essayant de créer un blog pour pouvoir présenter l'action d'Interplast à nos donateurs.
Je vais essayer de répondre à vos interrogations, qui je vous l'avoue ont été aussi les nôtres, car nous avons bien conscience que nous avons poussé jusqu'au bout les possibilités de la chirurgie en situation précaire. La critique est d'autant plus aisée que le hasard du calendrier a mis récemment sur le devant de la scène médiatique des pratiques humanitaires parfois contestables.
Tout d'abord, une mission comme celle du reportage ne se fait pas du jour au lendemain. c'est le fruit d'une longue expérience de plus d'une dizaine d'année au cours desquelles nous avons peu à peu compris ce qu'il convenait de faire et ce qu'il était possible de faire dans les conditions précaires d'exercice de le chirurgie.
Nous sommes issus comme vous du système hospitalo-universitaire français, pétris de toutes les recommandations de bonnes pratiques et avons été en Afrique brutalement confrontés à des conditions d'exercice qui dépassent l'entendement.
Que faire?
- Soit ne rien faire en décidant que les conditions ne permettent pas de soigner correctement
- soit se dire que d'autres organisations internationales ou gouvernementales pourront avec des moyens démesurés résoudre le problème
- soit essayer de s'adapter et de soigner avec de petits moyens.
Nous avons choisi la dernière solution pour de multiples raisons :
- la chirurgie plastique est une chirurgie non vitale mais qui transforme la vie des personnes qui en ont bénéficié. Elle peut se faire avec de petits moyens, ne nécessite pas de soins post-opératoires compliqués, est accessible à tous. C'est une chirurgie du pauvre même si dans nos pays on pense que c'est une chirurgie des riches.
- si le bénéfice en terme de santé publique est négligeable , au niveau de l'individu qui retrouve une vie sociale, il est incommensurable. C'est la parabole de l'étoile de mer que je ne connaissais pas.
- Nous exerçons dans un véritable désert médical. Certains des patients que nous avons opérés étaient déjà allés dans des structures hospitalières béninoises et avaient été récusés car ces hôpitaux n'avaient ni les compétences ni le matériel adéquat. En aucune façon, notre action ne freine le développement de structures de soins locales. Au contraire, les rares dispensaires de la région s'aperçoivent que l'on peut faire beaucoup avec peu de moyens. Dans cette région, les gens sont souvent trop pauvres pour aller dans des grands centres hospitaliers. Il faut tenir compte du coût des soins, mais aussi du voyage des frais d"hébergement et du manque à gagner. Nous avons fait le choix d'aller au devant des patients qui ne seraient jamais venus à nous.
- Par exemple, notre association est une ONG de chirurgie plastique. Pourtant sur cette mission particulière nous amenons avec nous un dentiste car nous nous sommes aperçus qu'il n'y avait pas de dentiste à moins de 400km à la ronde et que les soins dentaires de base pouvaient rendre de grands services à la population. Nous essayons de nous adapter aux besoins de la population.
- Nous ne venons pas en Afrique pour nous faire la main. Nous sommes tous des praticiens ayant plus de vingt ans d'exercice. Au contraire notre expérience professionnelle nous permet dans les limites de sécurité acceptable de réaliser des actes que nous n'aurions jamais osés avec moins d'expérience. Notre but est de savoir ce qu'il est raisonnablement possible de faire dans les conditions les plus extrêmes, non pas pour raconter plus tard autour d'un feu de camp nos vieux souvenirs de cowboys, mais pour enseigner à nos confrères africains les techniques simples et praticables en condition précaire. Cette attitude nous a conduit à créer au CHU de Saint-Antoine à Paris et au CHU de Tananarive un diplôme universitaire de chirurgie plastique en condition précaire.
- à terme notre but est bien entendu de ne pas revenir et de permettre aux médecins locaux de soigner à leur tour ces patients. Mais c'est là peut-être une utopie car les patients ne pouvant payer leurs soins, il n'y a guère de médecins qui acceptent de rester sur place. Nous avons la chance de bien gagner notre vie en France et c'est ce qui nous permet de pouvoir donner notre temps si facilement. Nous n'en avons aucun mérite. Ce n'est là que pure justice.

Enfin, la coopération avec les tradi-praticiens n'est pas un effet de mode. c'est la condition indispensable à notre action, d'abord parce que les patients viennent nous voir le plus souvent qu'après l'accord des tradipraticiens et aussi qu'en Afrique il ne suffit pas de soigner un patient, il faut aussi soigner le groupe car toute maladie a une cause invisible qu'il faut trouver et guérir. Sans cela, la guérison ne serait pas complète.

Mais il y a une autre raison, moins avouable mais malheureusement bien réelle: Un certain nombre de patients qui nous sont présentés présentent des pathologies incurables dans les conditions locales. Les tradipraticiens sont alors le seul recours qui permettent à ce que le malade ne se sente pas totalement abandonné. D'un côté ils nous adressent les patients que l'on peut traiter, de l'autre nous leur adressons les patients que nous ne pouvons pas traiter.

Pour terminer, je n'ai pas fait ce commentaire pour justifier notre action, la satisfaction des patients que nous opérons depuis de nombreuses années nous suffit. Mais, sachant que nous flirtons avec les limites du possible et du raisonnable, il nous était important de connaitre le sentiment de professionnels (autres que ceux de notre entourage) sur notre action pour éventuellement corriger des excès que nous ne pourrions plus voir.

Bien confraternellement

Écrit par : Patrick ANTOINE | 31/01/2008

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