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12/06/2008

Géopolitique de bord de piscine.

Les bords de piscine m’inspirent, en général.

 

Notre hôtel à Malte était familial et « de charme ». Le « charme », comme pour les êtres humains est ce qui rend plaisant des imperfections qui seraient sinon rédhibitoires.

Son âge vénérable (1875) attire une clientèle régulière, tombée « sous le charme », ou des touristes comme nous, qui avons réservé trop tard pour obtenir une chambre dans un hôtel moderne et au bord de la mer.

 

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La clientèle de classe moyenne était donc bigarrée, plutôt âgée, et européenne avec très peu de français.

Le service était typiquement le produit de la domination anglaise : gentil, particulièrement obséquieux, mais non dénué d’un certain humour pince sans rire.

 

 

L’atmosphère générale de cet hôtel m’évoquait une époque révolue et figée dans le temps. Kipling n’y aurait pas été dépaysé plus de 10 minutes.

Nous y avons rencontré une représentante d’un monde en voie de disparition, une grande bourgeoise havraise entrée gaillardement et franchement dans sa huitième décade. Toujours souriante, pomponnée et coquette, elle fréquente l’établissement depuis 20 ans.

Elle y a pris ses petites habitudes, appelle les serveurs par leurs prénoms, et a sa table réservée.

Nos conversations étaient plutôt agréables. Elle nous a souvent conseillé dans nos explorations, car depuis 20 ans, elle connaît bien sûr la moindre pierre de l’île. Elle nous a aussi dépeint un monde disparu, celui d’industriels du Nord, jetés au Havre par la guerre, et qui sont repartis de zéro.

Un monde de cannes, de gants blancs, de crinolines…

 

Evidemment, elle ne dépareillait pas avec le cadre victorien de l’hôtel. A posteriori, je me demande même si elle ne faisait pas partie de l’animation. En parlant d’animation, pas de jeux, de séances de gymnastique ou de boites de nuit dans l’hôtel, mais un Charlie Oleg maltais qui officie depuis 30 ans dans le même coin du fumoir devenu non fumeur.

 

Et puis, « ils» sont arrivés.

Une douzaine de chinois ont fait irruption dans notre monde d’encaustique et de naphtaline pour un séminaire de travail.

La barrière de la langue, ils parlaient presque plus mal anglais que nous, c’est dire, ne nous ont pas permis de savoir dans quel domaine ils travaillaient. Nous en sommes restés aux sourires sincères mais inexpressifs, à quelques cadeaux, dont une petite boite de baume du tigre et des petites galettes au goût bizarre (peut-être que ça ne se mangeait même pas !) et aux quelques mots de chinois que ma tendre et douce a sorti à mon immense étonnement.

Ils ne se sont donc jamais mélangés avec nous autres, européens. Après le premier soir, ils avaient d’ailleurs un menu différent du notre et des baguettes en couverts. Les dames descendaient à dîner avec leurs bigoudis roses, provoquant, vous l’imaginez bien l’étonnement moqueur des clients et du personnel.

Le lendemain, séance photo avec mon fils de 4 ans qui sortait de l’eau, au bord de la piscine.

Ils se sont photographiés les uns les autres avec un Thomas ravi d’être l’objet de tant d’attentions. J’étais amusé mais aussi un peu gêné par la proximité de mon fils en maillot de bain et de ces hommes en costume-cravate.

 

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Mais nous avons fait pareil depuis des décennies avec les peuples autochtones que nous avons conquis, et à l’époque, personne n’avait l’idée, non plus, de leur demander leur autorisation.

 

 

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Là se situe peut-être un symbole fort.

La Chine s’est finalement réveillée, elle a faim, et nous, nous vivons dans le passé.

La vieille dame a eu la même analyse que moi, sur d’autres observations. Mais moi, je suis bien plus fataliste qu’elle. Chaque civilisation a dominé, ou co-dominé en son temps sur un espace géographique plus ou moins vaste, sauf l’Afrique (allez savoir pourquoi). Et bien, le temps de la Chine est revenu.

Je me demande si je ne vais pas envoyer à Beijing ma demande d’adhésion au PC chinois.

On ne sait jamais.

 

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