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09/11/2005

Vanitas vanitatum, et omnia vanitas

medium_songe.3.jpgJournée tranquille hier.

J'ai fait une vacation express de döppler à l'hôpital.

 

La surveillance m'annonce un repas de service pour discuter du futur département de chirurgie vasculaire (qui comprend les explorations vasculaires).

Je m’excuse, car je termine tard à la clinique ce jour là.

Je lui dis que mon compère Stéphane ira, et me représentera ; car « lui ou moi, c’est pareil ».

Elle s’étonne, un peu goguenarde.

En m’éloignant, je laisse par-dessus mon épaule un sonore « Parce que c'était lui, parce que c'était moi. ».

Je fais mon döppler a un patient amaigri et au teint grisâtre, il me sourit et me glisse en me quittant : « Montaigne et La Boétie. ».

« Pardon ?! »

« Parce que c'était lui, parce que c'était moi. ».

« Ah oui… ».

Je me souvenais de Montaigne (j’avais attaqué les Essais, il y a quelques années), mais je ne souvenais plus de La Boétie.

Je viens de retrouver le texte original ici:

« Au demeurant, ce que nous appelons ordinairement amis et amitiés, ce ne sont qu'accointances et familiarités nouées par quelque occasion ou commodité, par le moyen de laquelle nos âmes s'entretiennent. En l'amitié de quoi je parle, elles se mêlent et confondent l'une en l'autre, d'un mélange si universel qu'elles effacent et ne retrouvent plus la couture qui les a jointes. Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, je sens que cela ne se peut exprimer qu'en répondant : «Parce que c'était lui, parce que c'était moi.»

Il y a, au-delà de tout mon discours, et de ce que j'en puis dire particulièrement, je ne sais quelle force inexplicable et fatale, médiatrice de cette union. Nous nous cherchions avant que de nous être vus, et par des rapports que nous entendions l'un de l'autre, qui faisaient en notre affection plus d'effort que ne porte la raison des rapports, je crois par quelque ordonnance du ciel; nous nous embrassions par nos noms. Et à notre première rencontre, qui fut par hasard en une grande fête et compagnie de ville, nous nous trouvâmes si pris, si connus, si obligés entre nous, que rien dès lors ne nous fut si proche que l'un à l'autre. Il écrivit une satyre latine excellente, qui est publiée, par laquelle il excuse et explique la précipitation de notre intelligence1, si promptement parvenue à sa perfection. Ayant si peu à durer, et ayant si tard commencé (car nous étions tous deux hommes faits, et lui de quelques années de plus)2, elle n'avait point à perdre de temps et à se régler au patron des amitiés molles et régulières, auxquelles il faut tant de précautions de longue et préalable conversation. Celle-ci n'a point d'autre idée que d'elle-même, et ne se peut rapporter qu'à soi. Ce n'est pas une spéciale considération, ni deux, ni trois, ni quatre, ni mille : c'est je ne sais quelle quintessence de tout ce mélange, qui, ayant saisi toute ma volonté, l'amena se plonger et se perdre dans la sienne; qui, ayant saisi toute sa volonté, l'amena se plonger et se perdre en la mienne, d'une faim, d'une concurrence pareille. Je dis perdre, à la vérité, ne nous réservant rien qui nous fût propre, ni qui fût ou sien, ou mien. »

1 - Notre intelligence : notre entente.
2 - Montaigne avait alors 25 ans, La Boétie 28.

Essais (1580-1595), livre Ier, chapitre XXVIII,
d'après l'édition de 1595.

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Puis je suis allé faire un tour en ville, notamment chez ma galériste favorite.

Elle a plein de nouveautés, et fort heureusement a vendu les deux seules qui m’intéressaient.

Elle a de petits bronzes très sympas d’une artiste nommée Catherine Ducreux.

Elle va organiser des « rétrospectives » mensuelles de ses quelques vingt artistes. La prochaine est sur Giraudi, le 08/12 ; je vais tout faire pour y aller avec Sally. Elle a aussi prévu d’en faire une sur Bocaj. Et là, elle m’a proposé de lui prêter mes deux toiles.

En effet, il semble qu’un collectionneur new-yorkais rafle tout ce qu’il trouve pour les exposer dans une galerie de la « Big Apple ». Donc, elle n’a plus grand’chose à exposer.

C’est bien bête et vain, mais ça m’a fait vraiment très plaisir. (J’ai bien évidemment aussi appelé de mes vœux une flambée de la côte de mes deux Bocaj, déjà que les grandes toiles de Giraudi prennent 500 euros tous les 6 mois…).

Et enfin, cerise sur le gâteau, un photographe du « Point » est venu tirer quelques clichés pour le numéro du premier décembre. Une reconnaissance très amplement méritée pour une professionnelle accessible et passionnée…

PS: La "guerre des plateaux repas" est déjà terminée (cf note précédente). L'administration a capitulé en rase campagne (pour l'instant).

"No pasaran"

07/11/2005

Quand va-t-on arrêter de se foutre de notre gueule ?

Grosse grosse colère ce matin.

Je retrouve dans ma boite intranet hospitalière, une circulaire de l’administration nous avisant que les plateaux repas des médecins de garde vont être payants, et soumis à la possession d’un ticket repas.

Je fais encore 1-2 gardes par mois à l’hôpital, en réanimation cardiaque.

Voilà ma réponse, envoyée à tout le carnet d’adresse (tous les médecins, toute l’administration du CHU, soient plusieurs centaines de personnes) :

 
« Je me permets d’intervenir dans cette histoire.
 
Je suis praticien attaché, et je fais des gardes en réanimation de chirurgie cardiaque depuis 1999-2000.
Il est tout à fait scandaleux que des médecins qui fassent « tourner » un tableau de garde ne soient plus nourris gratuitement par l’administration hospitalière, comme cela l’a toujours été.
Comment des médecins, qui ne comptent pas leurs heures, pourraient, sans se rabaisser,  faire la queue pour quémander un ticket repas entre 8h à 12h et de 14h à 16h, « côté quai de chargement » ?
Contrairement à beaucoup, l’immense majorité des médecins travaille durant ces heures.
 
Quand devrons nous payer la nuit en chambre de garde, comme une chambre d’hôtel ?
Quand devrons nous payer un loyer pour avoir le droit d’utiliser le plateau technique au cours de la garde ?
 
Pourquoi des médecins dévoués devraient payer l’incurie de l’administration ?
(la couleur de la nouvelle moquette vous convient-elle, comment trouvez vous le nouveau et « indispensable » peinturlurage des cages d’escalier de l’hôpital ?).
 
Bien sur, je ne pourrais pas faire comme XXXX (un chirurgien cardiaque), que je soutiens totalement, c’est à dire faire la grève de la cotation CCAM.
Mais il est clair que le jour ou cette mesure prendra effet, je cesserai ma participation pour le prochain tableau de garde.
 
Quand va t-on enfin cesser de tondre les gens qui donnent déjà le plus ? »
 
 

03/11/2005

Les plis.

Histoire survenue lundi matin à la visite.

Je rentre dans la chambre d’un monsieur de 65-70 ans, opéré cardiaque récent.

Il attaque d’emblée :

« Docteur, ça ne marche pas…

Le « ça » ne peut que se référer qu’au dieu Priape, aucune confusion possible.

- Et bien, c’est un peu normal après une intervention comme la votre ; avant, « ça » marchait ?

- Des fois oui, des fois non, je peux prendre du viagra ?

- Attendez un peu, un mois ou deux, pour voir si « ça » revient.

-De toute façon, je ne peux déjà plus caresser ma femme debout.

Je sens que cette conversation va « partir sur le toit », je garde mon sérieux, imperturbable. J’imagine même fugitivement que « ça », ne pouvant plus vaincre l’apesanteur, son propriétaire ne peut plus l’utiliser que couché. Non, c’est encore plus grandiose…

- Ah bon, pourquoi ?

- Pour faire disparaître les plis

- Ehhhh ?

- Vous voyez, ma femme a pris de l’embonpoint, et je n’y arrive plus qu’en la caressant couchée, les plis tirés.

 

Je suis sorti rapidement pour rire dans le couloir.

Le surlendemain, un infirmier les a surpris sur le lit, en pleine expérimentation newtonienne.