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23/11/2007
En route vers un monde meilleur (2).
Seconde histoire relatée dans ce texte du 21 novembre publiée dans « Theheart.org » et qui fait référence à un article publié le même jour dans « Health Blog », un blog hébergé par « the Wall Street Journal Online ».
Cette anecdote est intéressante car elle met en lumière une pratique assez courante dans les publications scientifiques, le « Ghostwriting ».
Pour résumer, une compagnie désire promouvoir un produit.
Elle monte une étude faite par son équipe, avec son financement, avec « sa » méthodologie, et fait rédiger un article ou un abstract par ses médecins.
Pour pouvoir la « blanchir » puis la publier, elle fait alors appel à un scientifique reconnu (un « leader d’opinion ») pour que celui-ci accepte de signer l’article, contre rémunération.
Dans ce cas particulier, cette publication serait juste tombée avant une décision importante de la FDA concernant le produit en cause.
Parfois (heureusement), comme relaté, cette belle machinerie s’enraye.
Notre pratique courante est influencée par les publications scientifiques soit directement, soit indirectement via des recommandations.
On ne peut être donc qu’inquiet devant l’expansion de ce phénomène.
Ce matin, je pars au travail un peu amer.
Intimidations, « Ghostwriting », tripatouillage de données, « optimisation » des tests statistiques…
Comment continuer à faire toute confiance en « L’evidence Based Medicine » qui est censée être l’Alpha et l’Oméga de la médecine moderne, mais qui repose exclusivement sur des publications scientifiques dont la validité est de plus en plus remise en cause par des scandales itératifs ?
Le problème est structurel.
Ceux qui vendent des médicaments ne devraient pas:
- financer les études
- financer les journaux scientifiques par la publicité
- arroser les médecins-chercheurs et les médecins-cliniciens.
Mais dans ce cas, qui financerait la recherche ?
Quadrature du cercle.
10:30 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (1)
En route vers un monde meilleur (1).
Cela pourrait être le slogan publicitaire d’un laboratoire pharmaceutique.
En effet, mais meilleur pour qui ?
- Les patients ?
- Le progrès scientifique ?
- Les actionnaires ?
Une première histoire relatée dans cet article du 20 novembre sur le toujours excellent site « theheart.org » nous oblige à se poser réellement la question (une seconde histoire va suivre).
Un rapport du Sénat Américain accable le laboratoire GSK dans une sombre histoire d’intimidation d’un médecin qui avait osé critiquer en public la dernière nouveauté révolutionnaire du moment dans le traitement du DNID, la rosiglitazone.
Il y a 8 ans, GSK sort ce produit avec le battage publicitaire que l’on peut imaginer.
Tous les leaders d’opinion applaudissent d'une main (l'autre tient une coupette de Champagne), sauf quelques uns, dont le Dr Buse.
Ce dernier écrit une lettre à la FDA ou il exprime ses inquiétudes par rapport à la sécurité d’emploi de cette molécule. Par ailleurs, il exprime ces mêmes préoccupations au cours de présentations publiques (dont une sponsorisée par Takeda, une société qui commercialise une glitazone concurrente).
GSK réagit en intimidant le Dr Buse, notamment en le menaçant de poursuites judiciaires, en faisant pression sur son ancien patron et en menaçant de couper certains financements.
L'extrait d'un mail interne à GSK (titré suavement "Avandia Renegade") est reproduit dans le rapport. Il me semble assez éloquent pour que je le cite, mais d'autres extraits sont pas mal non plus...
« [M]ention was made of John Buse from UNC who apparently has
repeatedly and intentionally misrepresented Avandia data from the
speaker’s dais in various fora, most recent among which was the ADA.
The sentiment of the SB group was to write him a firm letter that would
warn him about doing this again…with the punishment being that we will
complain up his academic line and to the CME granting bodies that
accredit his activities….The question comes up as to whether you think
this is a sensible strategy in the future (we don’t really do too much work
at UNC to make any threats) »
Notes:
SB étant “SmithKline Beecham”, maintenant GSK.
ADA=American Diabetes Association
UNC= University of North Carolina
CME=Continuing Medical Education
Le Dr Buse abjure et signe une lettre de “clarification” publique qui est en fait rédigée totalement par des cadres de GSK.
Ensuite, il se mure dans le silence jusqu’à la publication de la méta-analyse de Nissen qui a révélé à tous les risques cardiovasculaires de la rosiglitazone.
Le Dr Buse s’est tu en 1999, la vérité a éclaté en 2007.
Combien de patients ont « bénéficié » de cette molécule durant ces 8 ans ?
Je cite in extenso la conclusion du rapport sénatorial :
« The documents in the Committee’s possession raise serious concerns about the culture of
leadership at GSK. Even more serious perhaps is our fear that the situation with Dr. Buse
is part of a more troubling pattern of behavior by pharmaceutical executives.
Specifically, in 2004, Dr. Gurkirpal Singh of Stanford University testified at a Committee
hearing that an executive at Merck sought to intimidate him by calling his superiors.
Merck also warned Dr. Singh that they would make life very difficult for him, if he
persisted in his request for data on Merck’s drug, Vioxx. It was later discovered that
Vioxx increased the risk of heart attacks and it was withdrawn from the market. Merck’s intimidation of Dr. Singh as it sought to protect Vioxx bears striking similarities
to apparent threats by GSK against Dr. Buse to protect Avandia. The Committee is very
concerned that this behavior may be more prevalent in the pharmaceutical industry than
is evidenced by these two cases.
Corporate intimidation, the silencing of scientific dissent, and the suppression of
scientific views threaten both the public well-being and the financial health of the federal
government, which pays for health care. The behavior of GSK during the time that Dr.
Buse voiced concerns regarding the cardiovascular risks he believed were associated with
Avandia was less than stellar. Had Dr. Buse been able to continue voicing his concerns,
without being characterized as a “renegade” and without the need to sign a “retraction
letter,” it appears that the public good would have been better served.»
Cette conclusion fait aussi référence à une précédente mesure d’intimidation dont j’avais parlé ici, ici et ici.
Ne l’oubliez jamais, les laboratoires sont et seront toujours vos amis.
(Si vous en doutez, nous avons des photos de vos enfants en train de dormir)
09:30 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (0)
15 ans et pas une ride...
08:13 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (1)