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09/01/2008

Une pilule difficile à avaler?

Une étude sortie dernièrement dans PloS Medicine risque de faire beaucoup de bruit dans le petit monde de ceux qui s’intéressent à l’industrie du médicament.

Jusqu’à présent, toutes les firmes ont justifié le prix de vente élevé de leurs nouveaux produits par les sommes énormes dépensées en recherche et développement (R/D).

  
 

Ainsi, jusqu’à présent, les chiffres fournis par l’industrie étaient à peu près ceux-ci (aux EU, pour l’année 2004, en milliards de US$).

R/D : 29.6

Publicité :27.7

 

L’étude publiée se targue de donner des chiffres plus proches de la vérité (idem) :

R/D : 31.5

Publicité :57.5

  
 

Evidemment, comme le précisent les auteurs, ces chiffres risquent de mettre à mal l’image idyllique de chercheurs en blouse blanche oeuvrant pour le bien de l’humanité au sein de leurs firmes respectives.

Le problème est que l’article, à mon tout petit niveau de praticien, ne m’a pas convaincu.

Et cela, même si j’ai bien envie d’y croire.

Les auteurs partent du principe que les firmes ne dévoilent que ce qu’elles veulent bien dévoiler, et qu’elles tentent de cacher le maximum de dépenses promotionnelles. Ils sont donc partis des données d’une société d’étude de marché (la CAM) qui audite des milliers de médecins, afin d’estimer le coût individuel de la promotion. Le problème est que la CAM est liée par des clauses de confidentialité avec ces dernières. ils ont aussi repris les données "officielles" de l'industrie pharmaceutique.

Les auteurs ont donc apprécié au mieux toutes ces données, et les ont « rectifiées » à coup de pourcentages.

Je ne suis encore une fois pas un spécialiste de ce sujet, encore largement opaque, mais cet argumentaire ne m’a pas convaincu.

A vous de vous faire votre opinion.

Le résumé en français (traduit par le premier auteur qui est québécois).

L’article.

  (Article découvert via DrWes)

Chirurgie cardiaque for dummies.

Une simulation de chirurgie cardiaque assez sophistiquée.

Photobucket

 

C’est ici.

(Comme vous pouvez le constater, je n'aurais pas fait un bon chirurgien cardiaque...)

 

(Découvert grâce à HealthBolt)

13:10 Publié dans Web | Lien permanent | Commentaires (1)

Le trou.

Une jeune femme (20-23 ans)  vient me voir en consultation à l’hôpital car elle postule pour un poste d’IDE au CHU et le médecin du travail lui a trouvé un souffle cardiaque.

Elle arrive avec un ECG et une échographie cardiaque trans thoracique.

 

Je regarde l’ECG : un bloc de branche droit incomplet, uhmm uhmm, intéressant. Pas si fréquent que cela chez le jeune, et classiquement associé aux CIA (communication inter auriculaire).

Je regarde l’échographie : « présence d’un petit shunt gauche/droit au niveau du septum inter auriculaire ».

Uhmm, uhmmm (amplifié)….

Donc a priori une découverte d’une CIA ou d’un Foramen Ovale perméable au cours d’une visite à la médecine du travail.

Je l’interroge.

Elle est plutôt sportive (elle est volontaire chez les sapeurs-pompiers) totalement asymptomatique et elle sait qu’elle a un souffle depuis la naissance, a priori jamais exploré.

Elle n’a aucun antécédent et ne fume pas.

L’échographie, bien que réalisée par un agrégé est particulièrement peu informative. Aucune information n’est mentionnée sur les cavités droites. Je ne retrouve pas non plus d’estimation du QP/QS (débit pulmonaire/débit systémique).

Je l’examine, et n’entends pas le souffle (mais j’avoue que j’étais plus préoccupé par ce que j’allais lui dire, que par ce que j’entendais via le stéthoscope). Elle n’est pas cyanosée, n’a pas de signes d’insuffisance cardiaque droite ou gauche.

Je suis initialement plutôt rassurant. Je lui explique qu’il faudra la suivre régulièrement, je lui explique les risques potentiels (les accidents emboliques notamment) et la contre indication absolue de pratiquer la plongée en bouteilles.

Je lui explique que l’on peut fermer cet orifice par voie percutanée (par amplatzer) ou par la méthode classique, chirurgicale.

Elle n’est pas chaude du tout. Je la rassure en lui disant que le temps n’est pas encore venu.

« Ah, au fait, je suis enceinte ! ».

Elle m’a lancé ça comme si c’était sans importance…

Je lui demande de m’excuser, car je vais chercher des réponses à mes questions.

 

Je sors et fais une recherche sur internet. Si j’avais eu un terminal dans ma salle de consultation, je l’aurais faite devant elle sans problème.

Première question rapidement résolue : aucun problème avec la prévention de l’endocardite.

Deuxième question, qui est plutôt une recherche de confirmation, je discute avec l’assistant du service.

Avant de lui avoir précisé qu’elle était enceinte, il me dit d’emblée qu’il faut fermer ce shunt avec un amplatzer.

Pourquoi ?

« Parce que c’est tellement facile qu’on les ferme tous, maintenant ».

Je ne suis pas très satisfait par cette réponse qui est digne d’un coronarographiste (les coronarographistes, ce sont un peu nos orthopédistes…). Mais comme cet assistant est non interventionnel et plutôt brillant, je suis un peu ébranlé.

Je retourne en salle de consultation et je fais part de mes doutes à la patiente.

Après avoir un peu tourné autour du pot, je décide de la faire voir par Le chef de service qui sera sûrement de bon conseil.

C’est Lui qui m’a formé, j’ai beaucoup de respect pour Lui, même si Ses conseils sont parfois assez inattendus. D’un autre côté, si Ses conseils étaient prévisibles, je n’irais pas lui en demander…

Il me demande de la prévoir à Sa consultation d’échographie le lendemain en début d’après-midi.

Parfait ! J’organise le rendez-vous.

Je m’attendais un peu à ce qu’Il demande une échographie trans-oesophagienne, ou qu’Il confirme ce que m’avait dit son assistant.

En rentrant à la maison,  je consulte la littérature sur le net, je téléphone à un copain parisien pour qu’il expose le cas à ses « congénitalistes ». Pour qualifier les cardiologues spécialisés dans les pathologies congénitales, on emploie ce terme, de préférence à « congénitaux » qui peut être perçu comme une insulte. « C’est un congénital » peut en effet porter à confusion…

De ces diverses sources, je ne trouve rien qui « pousse » à une fermeture en prévention primaire. Après un accident, oui, mais avant, non. Deux exceptions certaines : si les cavités droites soufrent, et si le patient est plongeur professionnel. Après, c’est du cas par cas.

 

Coup de téléphone professoral le lendemain soir : « Pas de shunt, enfin presque rien, en tout cas il ne faut rien faire à part une échographie régulière ».

Parfait.

Comme quoi, Ses avis sont toujours inattendus.

 

Pour le coup, j’étais un peu déçu. J’aurais voulu lui faire passer une ETO, ou tout simplement faire un test aux bulles pour « caractériser » ce shunt.

J’en avais parlé à la patiente, elle était d’accord sur le principe de l’ETO, qui est quand même un peu désagréable.

Puis après, j’ai réfléchi.

De toute façon, il n’y a aucune indication de fermer ce shunt, qui semble minime, voire absent ( ?).

Pourquoi alors faire un examen assez pénible ?

La sagesse, c’est parfois de savoir fermer les yeux.

 

 

Moralités :

  • Internet, c’est le nec plus ultra pour le médecin en quête d’informations (à condition de savoir où chercher, ce qui est l’éternel problème).
  • Ne jamais hésiter à demander plus d'un avis.
  • Devant un problème difficile, notamment quand il n’y a pas de réponse scientifique franche, ne pas hésiter à laisser passer une nuit dessus.

12:00 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (5)