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10/04/2008

Petit dictionnaire médico-technocratique (7).

Pour cette septième note, je vais innover.

Devant vos yeux ébahis, je vais vous donner la copie exacte (j’insiste sur ce point) de la « feuille de route » qui m’a été assignée par le COPIL (comité de pilotage) pour faire progresser l’accréditation de l’établissement.

Chaque médecin en a reçu une, voici la mienne:

 

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J’ai envoyé un mail au directeur demandant de m’expliciter ces phrases, et en osant ajouter le commentaire suivant :  Des mots ont sauté ? Ou c’est moi qui ne comprends pas le « langage accréditation » ?

Je m’attendais à une rectification, une correction, une explication.

A la place, j’ai eu droit à des excuses, car cette feuille de route ne m’était pas destinée.

Je me pose les questions suivantes :

  • le « langage accréditation » est-il tellement différent de notre langue qu’il peut être considéré comme une langue étrangère ? Et donc ses locuteurs comme des non-francophones ?
  • ou bien le « langage accréditation » n’est-il pas plutôt une évolution de notre langue ? Un peu comme le français qui est lui même une évolution du latin ?
  • ou encore cette accréditation est tellement n’importe quoi dans notre établissement que toutes ces notes, ces protocoles formalisés dont nous sommes inondés n’ont d’autre valeur que leur simple existence, leur sens même n’en ayant aucune ? Et personne n’ose faire remarquer que « l’accréditation est nue ». Parfois, j’ai même des doutes sur mes capacités à comprendre. Je me dis, ce n’est pas possible, c’est moi qui suis débile. Alors j’en parle à mes deux copains confrères dans l’établissement, et nous nous rassurons avec nos gros éclats de rire.

     

Je vous laisse sur ces quelques remarques philosophiques, il faut que je formalise mon transport à la maison.

09/04/2008

LOVE.

Une jeune femme échevelée et discrètement moustachue entre dans ma salle d’examen, talonnée par une dame consciente de son importance, qui se révélera être sa mère.

 

Elles sont bien excitées toutes les deux, et malgré la petitesse de la pièce elles s’interpellent lourdement et se coupent la parole sans cesse.

Patiemment, j’attends que le nœud de leur pensée se desserre un peu. J’ai donc le temps de les détailler.

 

La jeune a 37 ans, un petit poil de moustache, un air vaguement bête et des cheveux blonds teints devant lesquels n’importe quel coiffeur consciencieux se serait mis à sangloter.

La maman, blonde teintée aussi, est littéralement couverte d’or : nombreux bracelets, lourde chaîne, nombreuses bagouzes. Je ne vois que partiellement son visage caché derrière une paire de lunettes de soleil Dior® qui sont bien inutiles aujourd’hui ou le ciel est gris plombé et bas.

Je remarque enfin à son poignet droit deux bracelets en or dont je reconnais la marque aux 2 C entrelacés. Ils font partie de la collection LOVE® (Luxe Ostentatoire, Vulgaire et Epanoui).

 

Finalement, la cacophonie diminue d’intensité, et me permet de poser quelques questions à la fille, auxquelles la mère s’empresse de répondre.

L’histoire est finalement assez simple : une hypertension s’est déclenchée chez la fille en péri-partum, et cette dernière veut que j'arrête son traitement qui l’empêche de boire de l’alcool, à cause de flushs et qui « lui prend la tête » dès le lever du lit.

Je suis le second cardiologue qu’elle va consulter en plus de son cardiologue traitant, car ce dernier est « vieux ».

L’autre confrère qu’elle est allée voir lui a aussi « pris la tête » car il lui a conseillé de diminuer sa consommation de sel.

Mais ce n’est pas ça qu’elle veut : elle veut que tout redevienne comme avant, sans régime ni comprimé.

Elle a d’ailleurs, sur les conseils éclairés d’un non médecin, commencé de son propre chef à diminuer son traitement en ne prenant que la moitié d’un de ses comprimés (d’ailleurs non sécable, soit dit en passant).

 

Je lui prends la tension : 150/80 au bras droit.

Je commence à lui expliquer un peu la situation, sans pouvoir terminer une seule phrase, puisque sa mère m’interrompt constamment.

C’est que cette dernière a une théorie fort intéressante car elle pense que tout vient du petit dernier qui est hyper remuant, mais attention, pas hyper actif (nuance). Elle pense aussi que « tout est dans la tête » de sa fille.

Encore une qui lit trop les pages psycho des magazines féminins, et qui est persuadée que Madame Figaro est à Gala ce que le Dit du Genji est aux Liaisons Dangereuses.

Enfin, cerise sur le gâteau, l’affaire familiale est l’objet de tracasseries des services fiscaux, ces requins sanguinaires, qui leur réclament indûment environ 250000 euros d’impayés.

 

J’ai consciencieusement compati à leurs problèmes d’argent, et leur ai fortement conseillé de revoir leur cardiologue traitant, à la compétence et à la sagacité reconnues de tous ses confrères.

 

Vint alors pour moi le meilleur moment, celui du règlement.

Aucun soucis de ce côté-là : la jeune femme a la CMU…

 

En les raccompagnant, je leur ai souhaité à toutes deux une bonne santé, et surtout leur ai assuré de mon soutien moral total dans leurs ennuis avec le fisc.

J’espère en effet qu’ils ne baisseront pas le rideau de sitôt.

 

Ils tiennent un bar-tabac-presse.

08/04/2008

La découverte de la quinine.

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 Cinchona officinalis

J’ai la flemme ce soir (sortie de garde), et donc je ne ferai pas de résumé de la fabuleuse histoire de la découverte de la quinine.

 

Mais un certain M.R. Lee le fait très bien ici.

 

Pour les fans de la saga du traitement du paludisme, le seconde partie de l’article, concernant l’artémisine est ici.

 

J’ai plus simplement une petite anecdote.

Pendant notre voyage à Zanzibar, nous avons fait halte dans un petit village pendant un « spice tour ». Un superbe arbre se dressait au coin d’une maison, adossé à un des murs.

J’ai demandé au guide comment s’appelait cet arbre.

Il m’a répondu que les villageois l’appelaient « l’arbre aux quarante maladies », parce que son écorce pouvait en soigner 40.

J’ai fait la relation avec le paludisme et ses nombreux signes cliniques, la quinine, et donc un quinquina. j’ai mâché un peu d’écorce fraîche découpée à coup de machette, et je crois me rappeler que c’était très très amer.

Enfin, bon, comme je ne suis pas botaniste, si ça se trouve, ce n'était pas du tout ça...

 

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Quinquina ou pas? 

21:37 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (1)