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05/07/2005

Le patient anglais

medium_dragon.jpgIl oscille de droite à gauche par terre, sans parvenir à se relever.
Sa face rouge cramoisie est hilare, recouverte de télangiectasies rouges plus foncées. Il essaye vainement de s’agripper à sa femme afin de se verticaliser.
Chaque échec, et nouvelle dégringolade s’accompagnent d’une nouvelle crise de fou rire.
Quand il arrive à annoner trois mots de suite, se dévoile un accent anglais très prononcé.
Il me regarde : « Salut Doc… ».
Sa main droite se crispe sur un morcaeu de tissu noir, que j'identifirai plus tard comme un béret basque.
Encore un anglo-saxon nostalgique du cliché du français profond!
Il tousse, s’étouffe, et vire au rouge fonçé.
Je l'empoigne sous un bras, sa femme sous l'autre, mais après examen, elle me parait aussi imbibée que lui. Manquerait plus qu’il me vomisse dessus, et elle aussi, par solidarité.
Nous sommes en plein milieu du Hall du département de cardio du CHU, et cet homme qui s’est traîné là sans raison, à l’opposé du service des consultations est mon dernier patient de ce jour.

Tout va bien, la consultation va être rock’nroll.
Et je suis déjà en retard pour aller à la clinique...

04/07/2005

Le caïman.

medium_lacoste1.3.jpgLe caïman.

Taille 5, la même que lorsque j’avais 14 ans.
Son violet a pris une patine digne des vieux meubles en 19 ans d’utilisation.
Je l’ai porté hier pour la première fois depuis des années, Sally me l’ayant lâchement subtilisé au début de notre histoire.
Nous avons tout fait ensemble, le Collège public et ses sorties (je me souviens des Hospices de Beaune, et du tryptique de Van der Weiden, des voyages linguistiques à Margate, des booms de garage), le Lycée privé bon chic bon genre, véritable nid de caïmans dans tous les sens du terme, le Bac, le début de médecine.
Je l’ai un peu oublié au fond du placard ensuite.
A chaque anniversaire, j’ajoutais une couleur à ma collection, vert anis, bleu chiné, rouge, bleu marine…
Mais mon premier, « Le » violet restait enfoui au fond de ma mémoire, vieux compagnon de ma jeunesse doré.
Il est réapparu récemment, pour participer à ma trentaine, dorée, elle aussi.
C’est le signe de reconnaissance des professions libérales en vacances, les classes supérieures préférant plus clinquant.
Je me rends compte que j’ai tous les attributs des libéraux : Caïman, Rolex, Bedaine.
Manque plus que faire de la voile, et avoir une grosse voiture (je n’aime pas trop la voile, et encore moins les voitures…).
Ca ne me perturbe pas trop, je n'ai pas l'habitude de me renier au chant du coq.

Sally et moi avons deux conceptions de nos gardes robes.
Elle préfère acheter peu coûteux, mais changer souvent de vêtements.
Je préfère mettre le prix pour avoir la qualité (sans avoir aucune fascination pour les marques, en dehors de la qualité intrinsèque de leurs produits), mais, je ne jette rien, et la durée de vie de mes vêtements dépasse largement celle de la moyenne actuelle.
Cela me donne parfois un peu un look d’ancien riche, ou d’aristocrate en fin de race.
Qu’importe, je suis à l’aise dans mes vêtements un peu défraîchis, mais chargés de ma propre vie.

J’espère que nous irons loin ensemble, mon polo et moi.