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25/07/2006

Le sépharade fou.

Il y en a, j’en connais au moins un.

Il a un anévrysme de l’aorte ascendante qui a pris 7 mm en 12 mois (c'est énorme...).

Il ne dépasse pas encore la taille fatidique.

Mais je le surveille tous les 3-6 mois par une IRM.

Du moins, je tente, il ne vient pas aux rendez-vous depuis avril dernier.

Il arrive hier, tel Raminagrobis, «bien fourré, gros et gras », tout transpirant, et les yeux un peu glauques.

« Je suis mort, j’ai fait la nouba toute la nuit ».

« Si votre anévrysme pète sur la piste de dance, vous aurez tout gagné ! »

« Il n’y a pas que sur la piste qu’il risque de pèter… » avec des petits yeux brillants.

«Ca ne va pas laisser un souvenir impérissable à votre partenaire, faîtes un peu attention ! ».

Je lui réexplique pour la nième fois les consignes de prudence, et lui suggère d’aller voir un chirurgien cardiaque fin août.

« Je serai peut-être en Israël pour le mariage d’une cousine ! ».

 

Je le regarde dubitatif : « Ben voyons! Pas trouvé d’endroit plus calme en ce moment ? ».

D’un autre côté, il a plus de chance de mourir d’une rupture d’anévrysme sur une piste de dance d’un mariage sépharade, ou qu’il se déroule que sous une roquette du Hezbollah.

 

Eli, Eli, lamma sabachthani...

12:45 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)

Le Pacifique

medium_pacifique.jpg"Il y a, dans ces eaux, on ne sait quel tendre mystère, avec ce doux mouvement redoutable qui semble vous parler d’une âme enfermée au-dessous, semblable aux fabuleux frissons onduleux de la terre qui émeuvent, dit-on, le sol éphésien où est enseveli l’Evangéliste saint Jean. Et il est juste aussi que sur le déploiement de ces plaines marines, que sur ces amples, mouvants pâturages de l’océan, qu’au-dessus de ces vastes fonds des quatre continents, les vagues roulent et se lèvent, se creusent et se gonflent incessamment ; car des millions d’ombres et de fantômes, de rêves engloutis, ténébreux noctambules, et de songes noyés s’y entremêlent ; tout ce que nous nommons la vie et l’âme, les vies, les âmes sont là qui rêvent, sans finir ; et qui se tournent comme des dormeurs sur leur lit ; aussi les vagues éternelles ne sont-elles rien que le battement de leur inquiétude."

 

Chap. CXI. Le Pacifique

Moby Dick

Herman Melville

Texte français par Armel Guerne

11:32 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (0)

24/07/2006

La veine du toxicomane.

medium_veine.jpgConsultation hospitalière ce matin, un peu « cour des miracles cardiologiques », comme tous les lundis matin.

Ce matin, toutefois, deux consultations sortant un petit peu de l’ordinaire.

 

La première, un couple venant de Pondichéry. L’homme est en France depuis 22 ans. Il est partit trouver femme au pays récemment et a ramené sa femme en décembre dernier. Elle est enceinte et a des problèmes bénins d’extrasystoles sur cœur sain (c’est ce qu’il fallait vérifier ce matin).

On a un peu discuté de cet ancien comptoir, et j’ai appris plein de choses, notamment qu’il reste encore 20.000 français-pondichériens. Ils m’ont aussi un peu raconté leur mode de vie.

Bref encore une consultation à l’issue de laquelle mon ignorance a encore un peu régressé

 

Dernière consultation, un peu plus surréaliste.

Femme de 40-45 ans, sans particularité physique ou vestimentaire, venant pour un doppler veineux du membre supérieur droit.

En général, on demande ce genre d’examens dans un contexte néoplasique (recherche de phlébite paranéoplasique) ou de bilan pré/post fistule pour dialyse.

 

Ici, rien de tout cela, elle vient parce qu’elle a une veine apparente au pli du coude. Elle me montre, et en effet, elle a une veine médiane basilique au pli du coude un peu saillante et dépressible au toucher.

« Vous savez, c’est rien

- Mais ça me porte préjudice, et elle gonfle bien plus que cela parfois ; je suis obligée de passer de la pommade tous les soirs

- Pourquoi préjudice, elle fait mal ?

- Non, mais j’ai perdu mon emploi à cause d’elle

- ??

- J’étais assistante maternelle, et on m’a expliqué que je ne pouvais pas continuer à causes des bêtises que j’ai faites il y a 10 ans.

- Vous vous piquiez ?

- Pas moi, j’avais trop peur, un ami.

- Et alors, quel rapport avec cette veine ?

- Ils ont vu que j’étais ancienne toxico à cause d’elle.

- Je n’ai jamais entendu parler de cette histoire de veine accusatrice ; en plus, on la voit à peine…

- Mais vous l’avez vue !

- Oui, mais, vous avez pointé le doigt dessus.

- Le Pr. XXX (jamais entendu parlé de lui) m’a dit qu’on pouvait régler ça avec du laser.

- On peut, mais ça me parait fou de traiter quelque chose dont vous ne souffrez pas (ce Pr. XXX doit être encore un ami désintéressé de l’Humanité souffrante).

- J’en souffre, regardez comme elle est visible !

- Moi aussi j’en ai une, regardez, je vais la faire disparaître. Je lève le bras au dessus du cœur, et hop, vous ne la voyez plus ! »

Elle éclate en sanglots : « ça n’a donc pas de rapport avec mes bêtises ? »

- « Pourquoi pleurez-vous »

- « Parce que ça fait 10 ans que j’en avais pas parlé… »

-« C’est rien, ce qui est fait est fait, aucun intêret de revenir dessus, et foutez la paix à votre veine »…

 

Par curiosité, et pour ma culture générale, avez-vous déjà entendu parler d’une veine du pli du coude saillante, tendue comme un doigt accusateur de toxicomanie ancienne (genre "Ecce Homo") ?

Un réseau veineux en arbre mort, éventuellement, mais je n’ai jamais entendu parler de cette histoire…

13:00 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)