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14/02/2008

Le deuxième avis.

« Alors ? »

Le patient est tout sourire.

J’ouvre la pochette de l’examen : négatif !

« Parfait, Champagne ce soir pour fêter ça ! »

« Je n’ai pas droit à l’alcool »

« Bon, alors Perrier à volonté ! ».

 

Ce patient est venu me voir mi janvier avec de gros soucis.

Greffé hépatique et rénal, il est suivi comme le lait sur le feu par deux équipes de greffeurs.

Chaque année, il passe une évaluation coronaire, qui est pour l’instant toujours normale.

Mais fin décembre dernier, il s’est rendu au CHG, plus proche de chez lui que le CHU pour son bilan.

Un cardiologue lui passe donc une échographie à la dobutamine. Le médecin est inquiétant : infarctus passé inaperçu, danger, coronarographie à faire rapidement. Il contacte même sur le champ le coronarographiste.

Le patient, très au courant de ses pathologies (comme tous les greffés) s’inquiète pour son rein (à cause de l’iode de la coronarographie) et demande un temps de réflexion.

Il contacte les néphrologues qui répondent « Si les cardiologues veulent la coronarographie, qu’ils la fassent ».

Il contacte alors les hépatologues qui me demandent un deuxième avis.

 

Début janvier je vois le patient, et surtout le résultat de ce fameux examen.

D’abord le nom : je le connais, pas en bien.

Ensuite la conclusion : brouillonne, aucun des critères de qualité requis.

Je lui demande de refaire cet examen, qui revient donc parfaitement normal.

 

Moralité :

Il n’y en a pas. En tout cas ce n’est pas « Préférez le CHU au CHG ».

 

Les greffés préfigurent à mon avis ce que devraient être idéalement, et seront peut-être une partie de nos patients, c'est-à-dire des acteurs, et non des spectateurs de leurs propres soins.

Ils se connaissent parfaitement, interagissent énormément avec leurs équipes de greffeurs qui sont souvent bien plus à leur écoute que n’importe quelle autre équipe de soignants, et ils en tirent un bénéfice maximum. Ils se posent des questions et sont parfois capables de trier le bon grain de l’ivraie. Ils ont bien sûr toujours besoin de nous, comme nous avons besoin d’eux pour les soigner. Ils sont bien sûr réputés « difficiles », car ils sont moins moutons de Panurge que les autres.

Si vous me permettez une comparaison bouddhiste un peu hardie, ils sont « éveillés ».

Cet « éveil » n’est bien sûr pas à la portée de tout le monde.

Mais ce qui était réservé jusqu’à présent qu’à quelques patients atteints de pathologies lourdes et entourés d’équipes médicales importantes (je n’ai parlé que des greffés, car ce sont eux que je connais le mieux) va probablement se « démocratiser », grâce notamment à la « médecine 2.0 ».

Ce concept qui excite beaucoup encore un tout petit cénacle induit une mutualisation de l’information médicale sur le net.

Cette information n’est plus déclamée en chaire sur des sites institutionnels, mais est alimentée, organisée par quiconque s’intéresse au sujet : soignants, soignés, voire d’autres.

Ne pensez pas que ce concept est encore une nuée dans l’esprit d’un geek médicophile. Il se développe doucement mais sûrement. Ce blog, comme tous les autres blogs médicaux sont censés faire partie de ce concept. Bien plus intéressant, le carnaval des blogs médicaux auquel vous avez participé, soignants ou non « est » l’exemple type de ce qu’est la « médecine 2.0 ». Mais il en existe des dizaines d'autres exemples, et leur nombre augmente chaque jour (fora, wikis...).

Vous avez fait de la « médecine 2.0 », comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, sans vous en rendre compte.

 

Bien sûr, des tas d’écueils bien réels devront être évités (j'en parlerai peut-être une prochaine fois).

Mais que nous le voulions ou non, une partie de nos patients va maintenant vouloir participer activement à leurs soins grâce aux informations glanées sur le web.

C’est ainsi, on n’y peut rien, il faut s’y préparer, et faire en sorte que cette nouvelle version du binôme soignant/soigné fonctionne pour le mieux, pour le plus grand bénéfice des deux partenaires.

Soigner des patients « éveillés » requiert plus de rigueur dans nos prises de décision et dans leur application.

Soigner des greffés, patients réputés « difficiles », et bientôt soigner de plus en plus de patients éveillés va nous obliger à devenir meilleurs, et à le rester.

 

Je crois que ce défi va être intéressant.

 

 

 

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 A lire/ à découvrir (liste non exhaustive) :

 

  • Le wiki de Gaétan Kerdelhué

 

08:50 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (5)

13/02/2008

Le coq aux hormones.

Hier visite du secteur convalescence avec le médecin généraliste. Moment toujours agréable et fructueux.

Nous discutons avec la jeune et jolie infirmière (24 ans), et la non moins jeune et jolie aide-soignante (je la connais moins).

Je sors en 10 minutes 2 remarques un peu grivoises, et mon confrère me rappelle que j’en ai sortie une en faisant un döppler, peu avant dans la matinée.

Ce n’est pas du tout mon habitude.

Remarque immédiate de l’IDE pince sans rire: « Uhmm, ta femme est partie faire du ski avec les enfants ».

C’est fou comme certaines femmes nous simplifient à l’extrême. Elles ne croient discerner en nous que la surface sombre et agitée, parfois simple clapotis, parfois gigantesques creux, d’une mer dont les profondeurs seraient tiraillées par de vastes courants hormonaux perpétuels.

Ce n’est même pas réducteur, c’est insultant.

Nous ne sommes pas des coqs aux hormones !

 

Et puis d’abord sa remarque ironique est erronée, ce que je mets sur le compte de sa jeunesse : mon épouse n’est pas encore au ski, elle est partie passer d’abord une semaine à la campagne avec les petits.

 

 

 

 

 

(D'un autre côté, c'est vrai que depuis son départ, je trouve que beaucoup de jeunes femmes sont mignones, voire même le sont devenues...).

Petit scarabée devient grand.

Depuis plusieurs mois, je fais mes döppler à l’Hôpital en compagnie d’un interne.

Au début, il se contentait de regarder, maintenant, il fait tout et c’est moi qui regarde et corrige parfois le tir.

Je suis très fier de lui car il a acquis les techniques de base en peu de temps, même si je n’ai pas la prétention de croire que je lui ai tout appris (nous ne travaillons ensemble que 2 vacations par semaine). La seule chose que je suis le seul à lui avoir apprise est toutefois un fondamental parmi les fondamentaux du döppler : toujours commencer par le côté gauche du patient pour ne pas se mettre du gel sur la manche (et l’inverse pour un médecin gaucher).

Il a même pris de la bouteille et hier m’a renvoyé magnifiquement dans les cordes.

 

Fin de vacation, dernier patient.

4h30 du soir comme disent les cadres infirmiers et les anesthésistes.

C’est un vieux monsieur sourd comme un pot, adressé par le service de psychiatrie pour un döppler des troncs supra aortiques.

L’interne commence.

Même si la garde de la nuit d’avant a été très calme, j’ai un petit coup de barre.

Je lui tapote sur l’épaule : « Allez, fils, dépêche toi ! »

Il me répond avec son sourire en coin et sans quitter l’écran des yeux : « Mais il faut encore que je lui explique ce qu’est l’épaisseur intima-media sur l’écran, et la progression de l’athérosclérose !».

J’éclate de rire et le traite d’ordure. C’est exactement ce que j’avais fait à une très  charmante jeune femme au cours du döppler précédent…

 

Ne croyez pas que je ne fasse plus que les charmantes jeunes femmes, et lui laisse tous les autres, j’ai juste un peu plus de chance que lui ;-)).

07:00 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (1)