Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

« lun. 09 juil. - dim. 15 juil. | Page d'accueil | lun. 23 juil. - dim. 29 juil. »

19/07/2007

30 coudées.

J’ai trouvé sur un blog anglo-saxon une note assez drôle qui se moque des « créationnistes ».

En prenant un passage précis de la Bible (1 Rois 7:23) qui décrit un bassin circulaire que se fait fabriquer le roi Salomon, l’auteur de la note calculait que selon le texte sacré, π était égal à 3 pile.

Ce bassin circulaire mesurait en effet 10 coudées de diamètre, 5 de profondeur et 30 de circonférence  selon le texte.

Comme la circonférence est égale à 2.π.r, π est égal à 30/(2*5), soit 3 pile.

 

La version qu’il citait laissait en effet peu de doutes :

« He made the Sea of cast metal, circular in shape, measuring ten cubits from rim to rim and five cubits high. It took a line of thirty cubits to measure around it. » (New International Version)

« Cubits » signifie « coudées ». Une coudée fait environ 50 cm.

 
Je me suis alors demandé quelles étaient les différentes traductions en français, langue du fief des cartésiens.

Petit inventaire à la Prévert :

 

« Il fit la mer de fonte. Elle avait dix coudées d'un bord à l'autre, une forme entièrement ronde, cinq coudées de hauteur, et une circonférence que mesurait un cordon de trente coudées »

Louis Segond

 

« Il fait la Mer, coulée, dix coudées de sa lèvre à sa lèvre, ronde, autour; sa taille, cinq coudées. Une ligne de trente coudées l’entoure, autour. »

Bible de Chouraqui

 

« Puis il jeta en fonte la Mer. Parfaitement circulaire, elle avait dix coudées d'un bord à l'autre, et cinq coudées de hauteur; une ligne de trente coudées en mesurait le tour. »

Traduction du rabbinat

 

« Il fit la Mer en métal fondu, de dix coudées de bord à bord, à pourtour circulaire, de cinq coudées de hauteur ; un fil de trente coudées en mesurait le tour. »

Bible de Jérusalem

 

« Il fit, en métal fondu, la Mer. Elle avait 10 coudées de diamètre, et elle était de forme circulaire. Elle avait 5 coudées de haut, et un cordeau de 30 coudées en aurait fait le tour. »

Bible TOB

 

« Puis Hiram fit la grande cuve ronde en métal fondu. Elle mesurait cinq mètres de diamètre et deux mètres cinquante de hauteur, un cordeau de plus de quinze mètres mesurait sa circonférence. »

Bible du semeur

 

« Et il fit la mer de fonte, de dix coudées d’un bord à l’autre bord, ronde tout autour, et haute de cinq coudées ; et un cordon de trente coudées l’entourait tout autour. »

Bible Darby

 

 

Bien évidemment, celle que je préfère est la version « Bible du semeur » qui est la seule qui introduise dans le texte le doute du traducteur. Plus qu’un doute, une fêlure.

La plupart des autres traducteurs se mouillent moins, car on peut en effet parfaitement « mesurer » un peu plus de 31.4 coudées avec un arpent de 30. Ce n’est pas le plus facile, mais c’est possible.

J’aime bien aussi celles qui nient délibérément les règles mathématiques, par exemple: « un cordeau de 30 coudées en aurait fait le tour » (TOB).

Bien non, justement, il manque un peu plus de 1.4 coudées, soit tout de même environ 70.8 cm.

L’artisan fondeur se rend au « Leroy David » du coin et commande  pour 30 coudées de bordures, sûr d’avoir Dieu (et Salomon) derrière lui.

Il revient sur le chantier et constate l’erreur.

Imaginez son désarroi.

De quoi en perdre la foi.

Et comme le récit de cette construction n’a pas été rectifié, il n’a jamais fait part de cette erreur à ses employeurs. Ou pire, « On » l’a réduit au silence.

Je propose encore une autre hypothèse méconnue des exégètes, mais qui expliquerait que Salomon ait mis 13 ans pour achever sa maison : il employait au noir des bricolos du dimanche.

Le tout se voit dans l’infime.

Ce matin, j’ai déposé à la mairie un formulaire de demande pour un renouvellement de carte d’identité.

Je savais que le délai était long, un proche qui a déposé sa demande il y a 1 mois avait entendu parler d’un délai de 5 mois.

Aujourd’hui j’ai demandé : 7 mois de délai avant la réception de la nouvelle carte.

Par contre, l’employée de mairie m’a souligné qu’il n’y avait pas moins de 4 façons de connaître l’état d’avancement des opérations, ou d’être prévenue de la réception de la tant désirée carte :

  • Site web qui suit l’état d’avancement, comme chez UPS
  • 2 numéros de téléphone à la mairie
  • Le service des cartes d’identité (situé à Limoges) envoie un SMS au demandeur pour le prévenir de l’arrivée de la carte à la mairie ("T Krd d'identité est arivé").

 

J’en suggère un cinquième, graver le SMS sur une plaque funéraire au cas ou, situation pas impossible étant donnés les délais, la carte arrive trop tard.

 

Tout dans l’information, pas grand-chose dans l’action, encore moins dans la réflexion, telle est la dominante en ce début de 21ème siècle.

Variante: la communication précède l'action qui n'est précédée par rien.

18/07/2007

L’ectropion du méat urinaire et autres complications (6).

Cinquième patient.

 

Un homme jeune et un homme assez âgé entrent ensemble.

Je m’attends à tout.

Et je ne suis pas déçu.

 

Le jeune est le patron du vieux. Je n'ai pas trop compris leur boulot pour tout dire, mais je crois que ce dernier est manutentionnaire dans la société du premier.

Le jeune est sépharade, volubile, rondouillard, inquiet, flatteur et inquisiteur, et un peu agité. Il tient son indispensable portable à la main. Il me cite d’emblée le nom d'un médecin, peut-être un cousin, qu’à sa déception, je ne connais pas.

Il est un peu saoulant, pour tout dire (surtout après les 4 patients d’avant).

Le vieux est sec, peu de cheveux, tout habillé de noir et quasi mutique.

C’est en fait un arménien d’Arménie, en France depuis 2004. Et depuis quelques semaines, il a mal dans la poitrine.

L’autre, arguant de la mauvaise maîtrise du français du vieux petit monsieur, fait à la fois les questions et les réponses.

Ils faisaient un bien beau duo méditerranéen, tous les deux : le volubile et le mutique. J’ai vaguement pensé à « Astérix en Corse ».

J’ai quand même un peu recadré le jeune pour laisser parler le vieux (il commençait à me parler du triple pontage de son père…).

En fait, le vieux monsieur comprend et parle convenablement le français.

En se déshabillant, j’ai vu les cicatrices des impacts des balles qu’il s’est prises dans l’abdomen au cours d’un combat en Arménie. Quand ? Contre qui ? Personne d’autre que lui ne le sait.

Ce qu’il racontait était inquiétant, je l’ai hospitalisé sur-le-champ.

J’ai rassuré le jeune qui finalement était le plus inquiet. Il lui a probablement sauvé la vie, car le vieux monsieur serait mort avant d’avoir accepté d’aller voir un médecin sans son insistance.

Le vieux s’est levé et m’a serré la main en me disant « Je n’ai pas peur, j’en ai tellement vu, on m’a opéré le ventre sans anesthésie ». En me quittant, le jeune me demande de "tout faire" pour le sauver.

 

La différence d’âge, de culture, leurs liens probablement complexes, mais leur visible affection mutuelle m’ont ému.

 

 

 

 

Les autres patients étaient beaucoup plus « convenus ».

Bonne soirée à tous.

22:45 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)