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27/09/2007

Cas clinique : des nouvelles.

Hier j’ai téléphoné à la fille de la patiente dont j’avais parlé ici ici ici et ici pour avoir des nouvelles.

Depuis le 7 septembre, date de la consultation, elle n’a pas représenté de malaises (petits ou gros) et elle a parfaitement toléré l’augmentation des bêtabloquants.

08:40 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)

25/09/2007

Art ?

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Tout a commencé quand j’ai reçu à la clinique le bouquin sur Yves Klein que j’avais commandé il y a quelques jours.

Un ami médecin qui a aperçu un des monochromes bleus m’a alors dit : « Tu ne crois pas qu’ils se foutent un peu de la gueule du monde ! Je parie que ça vaut une fortune ! ».

Je lui ai répondu que pour moi, toute œuvre qui suscite des interrogations, nous charme et/ou nous permet de voir au-delà de notre quotidien peut être considérée comme de l’art. A partir de là, il en va des goûts et des couleurs.

 

Ca m’a rappelé un documentaire qui m’avait fasciné il y a quelques années. 

« Chacun sa merde » de Hugues Peyret m’a fait découvrir un artiste italien, Piero Manzoni (et ici), et son œuvre majeure, « Merda d'artista ».

 Les fins italianisants auront traduit sans problème, pour les autres : « Merde d’artiste ».

 

Cet artiste contemporain à la vie fort courte (1933-1963) créa en mai 1961 une œuvre composée de 90 petites boites de conserve scellées numérotées et étiquetées en plusieurs langues « Merde d’artiste/contenu net GR 30/conservée au naturel/produite et mise en boite au mois de mai 1961 ». Ces 30 grammes de merde, il les vendait exactement au prix de 30 grammes d’or.

Il n’en a pas vendu beaucoup, la plupart des boites ont été données ou échangées.

Il meurt 2 ans plus tard, a priori de son éthylisme.

 

Les boites ont alors commencé à se vendre aux enchères, et les prix ont explosé.

La Tate Gallery (et ici) a acheté la boite numéro 4 en 2002 pour 31.826,60 euros.

Le record actuel est de 124.000 euros pour une boite vendue par Sotheby’s à Milan le 23 mai 2007.

Ces 30 grammes de merde valent donc à ce jour le prix d’environ 7.5 kg d’or pur (l’once est ce jour à 516,356 euros).

 

Que tirer de cette histoire ?

Peut-on appeler ça de l’art ?

L’artiste s’est-il foutu de la gueule du monde ?

Qui est le plus fou : l’artiste ou les gens qui payent des fortunes pour avoir leur petite boite ?

Ces questions restent ouvertes.

 

 

Jusqu’à assez récemment, on ne savait pas vraiment si il y avait de la merde dedans. Evidemment, les propriétaires n’étaient pas vraiment enclins à ouvrir leur précieuse petite boite.

Dans le documentaire, une partie de ces derniers, souvent des notables locaux, refusent catégoriquement de croire qu’il y a de la vraie merde dedans.

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Posséder un concept un peu potache d’un artiste mort, oui (surtout quand son prix suit une courbe exponentielle). De la merde bien sale, non.

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Les autres, souvent grands collectionneurs, s’en fichent. Ils ont conscience de la plus value de leur boite ou de sa valeur artistique, quoi qu’il y ait dedans. Ca leur suffit.

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Déjà, faire acheter de la merde virtuelle ou non, même au prix de vente initial relève du grand art, sans faire de mauvais jeu de mots. On peut voir ça comme la tentative d’un artiste de ridiculiser le milieu de l’art.

Mais jusqu’à ce point précis, Manzoni n’a pas encore dévoilé tout son génie

 

L’apothéose, évoquée par Manzoni vient ensuite: les boites se sont mises à fuir ou à exploser sous l’action de la fermentation et de la corrosion, libérant une odeur atroce. Car c’était bien de la merde qu’il y avait dedans (une compagnie d’assurance l’a faite analyser pour dédommager un collectionneur).

Une certaine panique s’est alors emparée des possesseurs. Certains les ont même mis dans leur frigo pour arrêter la fermentation et conserver leur investissement et/ou leur œuvre d’art favorite.

La Tate Gallery se veut être rassurante : aucun problème détecté (elle a intérêt, vu le scandale provoqué Outre-Manche par cette acquisition). Ne riez pas, le peuple français a la sienne : la boite numéro 31 est au Centre Georges Pompidou.

 

A l’heure actuelle, 45 boites sur 90 sont endommagées.

 

Si l'on suppose que l’explosion finale faisait partie du dessein de l’artiste, ses boites, de sculpture, sont devenues performances. Leur valeur n'est donc pas moindre. Par contre, si il s'agit d'un défaut de conception, une boite ouverte et puante va valoir bien moins qu'une boite intègre. Piero Manzoni a évoqué cette éventualité, comme je l'ai déjà dit, mais l'avait-il programmée ?

Est-ce que ces boites valent moins cher que les autres ? Voire plus ? Question à 124.000 euros !

 

L’art, l’artiste, les collectionneurs, les amateurs et les critiques d’art, les musées, les flux financiers colossaux qui les lient : cette œuvre a réduit en miettes tout ce système en s’attaquant à sa base et en posant une simple question : qu’est ce qui fait la valeur d’une œuvre ?

Sans ses millions pour le mettre hors de porté du ridicule, le marché de l'art contemporain se retouve bien nu comme l'empereur. Et Manzoni est parmi ceux qui l'ont crié le plus fort.

 

C’est pour cela que je considère ces boites comme des chefs d’œuvre.

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La petite boutique des horreurs.

Le rapport annuel de l’AFFSAPS sur le contrôle de la publicité des médicaments et des autres produits de santé sur l’année 2006 me semble édifiant.

 

La publicité représente un poste important de dépenses pour l’industrie pharmaceutique. Le rapport sénatorial que j’avais cité ici précisait que cette dépense annuelle par médecin en France représentait environ 8500 euros.

Autrement dit, les publicités proposées pour approbation à l’AFFSAPS n’ont pas été bidouillées par le cousin Robert sur son Mac durant la fin de semaine. Derrière chaque réclame on retrouve donc probablement une volonté froide et déterminée et de très gros moyens. J’ai donc du mal à concevoir la possibilité d’une regrettable erreur dans l'ensemble de ces cas.

 

Treize  interdictions (25 dossiers), ça peut paraître minime par rapport à l’océan de publicités déversé sur nous en 2006.

Quatre cent trente mises en demeure (1402 dossiers), ça l’est un tout petit peu moins, puisque le rapport précise qu’elles touchent 14.6% des dossiers présentés.

 

Toutefois tout est relatif, en fonction du point de vue choisi.

Si l’on résonne en statisticien, c’est en effet minime.

Mais du point de vue du médecin qui prescrit des médicaments sur de fausses informations et surtout du patient qui les prend, l’est-ce tant que cela ?

Comment estimer une balance risques/bénéfices quand les poids sont truqués ?

Ce rapport  montre à mon sens le manque total de scrupules d’une petite minorité dont je regrette que les cagoules ne soient pas arrachées (les « cas » ne sont en effet pas identifiés)

 
Je n’ai repris ci-dessous que l’ensemble des cas d’interdiction pure et simple, c'est-à-dire les cas les plus graves. J’ai gardé les noms des sous chapitres car ce plan (avec celui du chapitre "mises en demeure") permet aisément de les classer en grandes familles d’arnaques, et donc de pouvoir les repérer plus facilement à l’avenir dans le discours des visiteurs médicaux.

En parcourant ce rapport, je suis content que la publicité directe aux consommateurs ne soit pas (encore) légalisée en France.

Ce texte ne fait que 17 pages, n’hésitez donc pas à le lire (ici). Il vaut le détour.

 

 

L’extension du champ de la population cible


  • Cas d’un vaccin communicant largement sur les infections invasives à méningocoques du sérogroupe B alors que l’indication se limite au sérogroupe C

 

  • Cas d’un topique présenté comme favorisant le massage en kinésithérapie alors que l’indication se limite aux brûlures du 1er et 2ème degré

 

  • Cas de la revendication par un corticoïde à action locale d’un traitement prolongé dans le cadre de l’inflammation minimale persistante permettant la prévention de l’asthme et des infections virales rhino-sinusiennes alors que l’indication se limite aux rhinites allergiques saisonnières ou per-annuelles;

 

  • Cas de la présentation par un traitement de phytothérapie de la symptomatologie de la dépression caractérisée alors que l’indication du produit se limite aux manifestations dépressives légères et transitoires

 

 

  • Cas de la revendication du positionnement d’un antagoniste de l’angiotensine II à tous les stades de l’insuffisance cardiaque alors que son autorisation de mise sur le marché le restreint aux stades II à III en cas d’intolérance aux IEC ou en association aux IEC chez les patients restant symptomatiques sous IEC.

 

  • Cas du positionnement d’un fibrate en prévention primaire des complications athéroscléreuses du diabétique en l’absence de démonstration clinique.

 

  • Cas de la revendication de l’optimisation d’un traitement diurétique par la supplémentation en potassium dans la prévention de la survenue des accidents vasculaires cérébraux

 

  • Cas du positionnement d’un antagoniste de l’angiotensine II dans la prévention en terme de morbi-mortalité en l’absence de démonstration clinique.

 

  • Cas de la revendication d’une parfaite innocuité d’un topique d’AINS alors que l’AMM a validé des effets indésirables locaux et systémiques notamment dans certaines conditions d’application.

 

La mise en exergue de propriétés non validées par l’AMM

 

  • Cas de la revendication par un protecteur cutané de propriétés d’activation de la microcirculation non reconnues dans l’autorisation de mise sur le marché susceptibles d’oxygéner et de nourrir les tissus en reconstitution.

 

 

  • Cas de la revendication de propriétés hypoglycémiante et hypolipémiante par un mucilage.

 

 

La préconisation d’un schéma posologique non conforme à celui de l’AMM

 

 

  • Cas de l’incitation par une insuline lente administrée dans le cadre de la prise en charge du diabétique de type 2 insuffisamment contrôlé à une progression systématique des doses quotidiennes sans réévaluation du rapport bénéfices/risques au cas par cas comme le recommande l’autorisation de mise sur le marché.

 

  • Cas de la préconisation d’un traitement au long cours par un laxatif de lest sur la base d’études conduites sur des patients dyslipidémiques et diabétiques à des posologies non conformes à celles recommandées par l’AMM en vue de revendiquer des propriétés hypolipémiantes et hypoglycémiantes.

 

 

Concernant le non respect de l’objectivité de la présentation

 

 

  • Cas de la revendication de l’efficacité d’une association fixe antagoniste de l’angiotensine II et diurétique dans le cadre du traitement de l’HTA sévère sur la base d’une étude où les patients ne présentaient pas d’HTA sévère lors de l’initiation du traitement étudié.
  •  Cas de revendication d’un meilleur contrôle nycthéméral de la PA et notamment des 4 dernières heures de la MAPA d’un antagoniste de l’angiotensine II par rapport à un concurrent de la même classe thérapeutique pour en extraire des conclusions en terme de morbi-mortalité sur la base d’une analyse secondaire réalisée à posteriori à partir des donnés d’une étude méthodologiquement correcte.

 

Concernant le non respect du bon usage des médicaments

 

 

  • Cas de la préconisation d’une supplémentation systématique en potassium chez le sujet âgé traité ou non par diurétiques sans tenir compte des contre-indications et précautions d’emploi relatives à ce contexte.

 

  • Cas du positionnement d’un traitement de phytothérapie dans le cadre des épisodes dépressifs majeurs caractérisés de nature à entrainer une perte de chance pour le patient compte tenu de son indication dans les manifestations dépressives légères et transitoires et des alternatives disponibles ayant fait leurs preuves dans les dépressions sévères.

 

  • Cas de la préconisation d’un mucilage indiqué dans le traitement chronique de la constipation dans le cadre de la prise en charge de patients diabétiques et hyperlipidémiques en raison de ses supposées propriétés hypolipémiantes et hypoglycémiantes de nature à inciter une prise prolongée alors qu’il s’agit d’un traitement symptomatique de courte durée.

 

 

18:45 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (5)