08/03/2006
La dame numéro 13.
J’ai terminé hier au soir ce roman de José Carlos Somoza.
J’ai été assez déçu après le magistral « Clara et la pénombre », la critique qui va suivre est donc probablement un peu dure par rapport à la valeur absolue du roman.
L’histoire tient en peu de mots, trois personnes tentent de lutter contre un groupe de 13 « sorcières » quasiment immortelles et inconnues de la plupart des humains. Ces dernières stimulent depuis l’aube des temps la créativité des poètes, elles sont à l’origine du mythe des muses. En fait, elles se servent de certains vers comme d’incantations magiques, souvent aux effets puissants et destructeurs. Elles ne peuvent créer ces vers, ce pourquoi elles ont besoin des poètes. En récitant un vers, elles peuvent plonger leur adversaire dans d’indicibles souffrances (elles ne s’en privent pas…).
Les points positifs : c’est très bien écrit, la traduction est fluide, et certaines phrases évoquent des sentiments qui me paraissent très vrais. Le texte régénère bien la tradition des sorcières, en ajoutant la petite nouveauté de la poésie destructrice.
Je n’ai pas pu décrocher du bouquin jusqu’à sa moitié, tant l’atmosphère dépeint bien l’angoisse des héros de retrouver ces sorcières à chaque coin de rue, alors qu’ils se débattent dans l’énigme du roman (qui sont-elles ? Qui est la mystérieuse treizième que l’on ne voit jamais ?...). Chaque rencontre se solde par un bain de sang, et des tortures toutes plus sophistiquées les unes que les autres.
C’est justement là que le bat blesse, et que j’ai commencé à décrocher. Je me suis vite rendu compte que le récit était une succession de scènes horribles, sans réelle articulation ou transition. Pas non plus de réflexion sous jacente. Autant « Clara » posait des questions sur l’Art, autant les « 13 dames » ne posent qu’une question : ou est la treizième ?
Question d’assez peu d’intérêt, en somme.
19:17 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (0)
04/03/2006
Lectures compulsives.
Depuis quelques jours, je fais chauffer « fnac.com ».
En cours de lecture depuis hier : « La dame N°13 » de José Carlos Somoza.
Déjà arrivés : « Ambroise Paré », biographie écrite par Jean-Pierre Poirier, et « Les grandes familles » de Druon.
En attente de réception : « Hitler » biographie écrite par Ian Kershaw.
En gros, vous avez le sujet d'au moins la moitié de mes 50 prochaines notes.
20:03 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (10)
Psychiatrie sommaire.
De garde la nuit dernière.
Le médecin que je relève me prévient : « La dame de la huit, 60 ans, est totalement folle, elle hurle tout le temps, bonne garde ! ».
En effet, des hurlements se font entendre largement au-delà des murs de la réa. Pendant que les IDE font leur relève, je lis de moins en moins placidement mon bouquin, le dernier roman de José Carlos Somoza, « La Dame N°13 ».
Excellent début de bouquin en vérité.
« PAPA !».
Une histoire de sorcières, utilisant comme arme la poésie.
« MAMAN ! ».
Une histoire prenante et envoutante, ou l’ont tourne chaque page comme on tire frénétiquement sur le fil d’une pelote de laine, pour la dérouler de plus en plus rapidement.
« PAPA !».
Je ne tiens plus, je vais dans la chambre avec François, l’IDE de nuit.
Comme on dit en réa, elle est « en vrac », nue sur son lit, pieds et mains attachées, ces dernières dangereusement proches des drains thoraciques.
« Prépare du Tiapridal ! ».
Alors que François s’exécute, je trouve les photos d’un bébé, posées à plat sur une armoire, à côté mais hors de la vue de la patiente.
« C’est à vous ? »
A ma grande surprise, elle répond : « C’est mon bébé, il est où ? »
« Il doit être tranquillement à la maison, je vais vous les accrocher à la vitre, pour que vous puissiez les voir, d’accord ? ».
« Merci beaucoup, il me manque tellement, c’est mon petit-fils… »
« Il est très beau, promettez-moi de ne plus crier, ça fait peur aux autres patients ».
« Promis, merci beaucoup, docteur… ».
Je fais signe à François de ne pas passer le Tiapridal, et je le présente à la dame.
« Voici François, votre infirmier de nuit, il est corse ».
« Moi aussi, mes parents sont de Corte ! ».
Et voilà qu’ils se mettent à parler du pays….
Un peu plus tard, nous nous retrouvons à l’office.
Grosse séance d’autocongratulation, pour avoir démasqué ce qui n’était qu’une ineffable angoisse.
« Tu as su lui parler », me dit François.
« Toi aussi, et on a de la chance, on tombe toujours sur des Corses ».
Par devers nous, nous éprouvions un grand et réconfortant sentiment de supériorité, lui envers les filles de jour, moi envers le médecin d’astreinte de réa, qui n'avaient rien su voir.
Quel silence apaisant…
Chapitre IV, "Les Dames"
« FRANCOIS ! ».
??
« FRANCOIS ! ».
Dans sa chambre, elle a repris sa danse de Saint-Guy.
« FRANCOIS ! ».
« Oui, qu’est-ce qu’il y a, Madâme ? » (avec un accent corse formidable).
« J’ai mal ! ».
« Les calmants passent ».
« FRANCOIS !»
« Oui ? »
« JE VEUX VOIR MA MERE ! ».
Je lui dis : « Ne criez pas, s’il vous plait, vous me l’avez promis, vous allez arracher vos drains, et pensez aux autres patients ! »
« JE M’EN FOUT ! ».
« JE M’EN FOUT ! ».
« FRANCOIS ! ».
« Allez, hop, NOZINAN rapide… »
Ce matin, j’ai croisé le pauvre François, défait d’avoir été appelé toute la nuit, même « moderato cantabile » après le Nozinan.
« Ne leur redonne plus jamais mon prénom » !
17:10 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : carablogs, medecine et web