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24/02/2005
Big Brother is watching you.
Je vous ai déjà parlé de la toute puissance des labos pharmaceutiques, et de leur incroyable force de vente.
J’en ai encore eu un exemple hier.
Lundi dernier, au cabinet, je vois un patient hypertendu, mal équilibré par un comprimé de 50 mg de XXX.
Je lui dis qu’il faut augmenter la posologie à 100 mg par jour.
Je lui fait une ordonnance : prendre 1 comprimé de 100 mg de XXX par jour.
En la lui tendant, un doute surgit : est ce que ce dosage existe ?
Je regarde sur le Vidal 2004, je ne le trouve pas.
Il me semblait bien quand même que…
J’appelle un numéro d’information du laboratoire à Paris (indiqué à la fin de la notice du Vidal)
« Bonjour, LawrencePassmorecardiologueàAAA….
- je voudrais savoir si le XXX 100 mg existe, j’ai un doute…
- je vous passe le service compétent…
- Bonjour
- Bonjour, je voudrais savoir si le XXX 100 mg existe, je ne le trouve pas sur le Vidal 2004.
- Il existe, mais il est sorti en octobre 2004, c’est pourquoi vous ne le trouvez pas.
- Merci, au revoir
- Au revoir »
Petite précision, mon vrai nom n’est pas usuel, et ma voix nasillarde fait que mes interlocuteurs massacrent quasi-systématiquement son orthographe. Dans ce cas, je l’ai donné par politesse, et non pour qu’il soit réellement compris
Hier, je passe ma matinée au CHU.
Je rencontre la visiteuse médicale du labo qui fait XXX, une vieille copine.
« Bonjour, tiens, voilà la documentation sur le XXX 100 mg…
- Eeeeeh ??!!
- Tu as appelé le service d’information lundi, et j’ai reçu un mail pour me dire que tu recherchais de la doc sur le XXX 100 mg… »
Je suis resté coi, ils ont réussi à comprendre mon nom, et ont contacté LA visiteuse médicale dont je dépends.
Au secours, Orwell…
10:40 Publié dans Prescrire en conscience | Lien permanent | Commentaires (1)
Leica
Leica a inventé la photographie argentique, cette vénérable société risque de ne pas lui survivre.
Je me suis intéressé tardivement, et brièvement à la photo (juin 2004- novembre 2004).
J’ai acheté un appareil numérique afin d’apprivoiser, et connaître les « fondamentaux » de la photo. J’ai envisagé d’acquérir un bon appareil argentique pour vivre les affres du photographe argentique : réflexion sur le cadrage, le diaphragme, le vitesse d’obturation, la lumière, et surtout l’attente du résultat. J’ai même pensé un moment développer moi-même, dans ma cave (probablement le pire endroit de la maison pour développer, à cause des poussières), avec l’aide de mon beau-frère, qui avait tâté cet art difficile dans sa jeunesse.
Après avoir un peu lu, fréquenté des fora de passionnés, et photographié en rafale, tout ce qui tombait sous mon objectif, mon enthousiasme s’est un peu atténué, et je suis passé à autre chose. J’aime toujours autant photographier en débrayant tous les programmes censés aider le photographe (autofocus et réglage du couple vitesse/diaphragme), mais je vais rester définitivement au numérique.
L’instantanéité et la qualité des photos sont telles, que l’argentique ne sera bientôt plus réservé qu’à une petite poignée d’irréductibles passionnés.
La photo est un bon reflet de la société actuelle (je n’ai pas osé dire « une bonne photographie »…). Ses caractéristiques, et tendances, sont aussi celles de notre temps :
- La recherche de la perfection systématique.
Les appareils numériques sont dotés de logiciels de pré et de post traitement, qui permettent, même pour le photographe non voyant de réaliser à coup sûr des clichés réussis : autofocus, stabilisateur d’images, flash TTL, anti yeux rouges, logiciels de filtrage, anti bouloches, anti rides, anti épis, anti tête d’enterrement….
Bientôt, ils vont sortir un AUP (Anti Ugly Person) : un filtre informatique va effacer du cliché toute personne à l’esthétique un peu douteuse. L’AUP est déjà largement utilisé dans le domaine de la publicité, et des relations publiques.
Même plus besoin de réfléchir, le « coach » qui est dans votre appareil s’occupe de tout (« prend pas la mémé, elle est moche et vieille, prend plutôt ta petite sœur… »)
Personnellement, je regrette un peu, car mon cliché favori n’aurait jamais existé avec tous ces logiciels : Giacometti traversant son atelier par Cartier-Bresson. La photo ne serait plus floue, supprimant l’évocation de mouvement, et du mimétisme entre l’artiste et son œuvre. De plus, Giacometti aurait été effacé par l’AUP (il a la cigarette au bec, c’est politiquement incorrect, et il n’est pas particulièrement beau).
- Plus, c’est mieux (« more is better »)
Soyons logiques, 8 M de pixels, c’est mieux que 5, qui est mieux que 4….
Toutes les marques exhibent à qui mieux mieux leurs millions de pixels pour attirer le chaland. Certes, c’est bien pour la définition, mais le pouvoir de résolution de l’œil humain est incapable de faire la différence à partir d’un certain nombre de pixels, sur un cliché 10x15.
C’est évidemment beaucoup plus simple, et plus économique de produire des capteurs de plus en plus miniaturisés qu’un objectif performant. Et aussi plus facile à vendre : « Huit millions » parle beaucoup mieux au grand public que « Minolta AF 75-300 mm f : 4,5-5,6 D ». Puisqu’on vous dit que c’est simple : plus c’est mieux…
Ainsi, 8 c’est mieux que 5.
25 cm mieux que 20
Bonnet C, mieux que bonnet B
4 roues motrices, mieux que 2…
- Plus pour moins d’argent
Le numérique permet de faire des milliers de photos, pour pas un centime.
C’est donc bien, car pas cher.
Même si toute création ou émotion est absente de ces clichés, même si un cliché sur 1000 est regardable.
Le plus important, c’est que çà ne coûte pas cher, et qu’on en ait beaucoup pour son argent.
Vivement l’appareil photo numérique jetable….
Vive le nivellement par le bas
- Plus cher, c’est mieux
Leica, c’est mieux car c’est plus cher, et plus élitiste.
C’est encore plus cher (environ 6500€), encore plus élitiste, donc encore mieux lorsqu’il s’agit d’un boîtier en série limitée E-X-C-L-U-S-I-V-E, habillé par un étui Hermès.
Vos photos seront beaucoup plus belles, faites par un appareil photo habillé par Hermés en cuir veau Barénia (si, si, un appareil à 6500€ ne peut faire QUE de bonnes photos, si elles sont un peu « ratées », c’est voulu, c’est de l’Art).
Vive le nivellement par le haut
- Moins votre cliché montre la réalité, plus il montre un concept, mieux c’est
N’ayez plus honte de vos clichés mal cadrés, un peu flous !
Si vous arrivez à y découvrir un concept, si possible général, c’est gagné. Même si mémé est floue, et n’a ni tête, ni bras, vous avez représenté « l’effacement progressif du rôle d’apprentissage, et de conseil des seniors dans notre société moderne post soixante-huitarde »
Ca mérite une expo à la FNAC.
…
Je pense que l’on pourrait trouver d’autres exemples, mais je vous laisse le soin de poursuivre la liste.
09:51 Publié dans Loisirs | Lien permanent | Commentaires (0)
22/02/2005
Elsamere
Elsamere est un Paradis sur terre.
Mais, est-ce vraiment sur Terre ?
La propriété est lovée au sein d’une forêt d’acacias, sur les berges du lac Naivasha. Nous y arrivons après plusieurs heures harassantes de 4x4, lors de notre premier safari au Kenya, en 2000. Les épineux, et le lac diffusent une fraîcheur inespérée dans la vallée du Rift, ou semblent se concentrer tous les rayons du soleil.
Cette ancienne résidence du couple Adamson, qui a dédié sa vie à la préservation de la faune sauvage africaine est encore imprégnée de leur présence. Sally et moi sommes accueillis par notre hôte, un anglais rondouillard, jovial, en chemise et bermuda colonial.
Sur les bords du lac, vivent des hippopotames, et de grands colobes noirs et blancs semi sauvages.
Il n’y a qu’une poignée de chambres dans ce domaine, et nous nous retrouvons tous, le soir autour d’une table d’hôtes, à savourer un velouté de cressons, en plein milieu de l’Afrique.
Notre hôte nous prévient : même si nous entendons des bruits étranges dans la nuit, nous ne devons sortir, ni allumer la chambre, sous aucun prétexte.
Arrivée dans la chambre, nous, je devrais dire je, chassons les quelques araignées qui s’étaient installées avant nous. Ces bestioles, bien qu’africaines, ne sont pas de grande taille, mais suffisamment pour crisser lorsque je les écrase avec une basket de Sally.
Sally est pré syncopale, elle a une peur phobique des araignées, et a quasiment sauté en marche de sa voiture en trouvant une araignée millimétrique, accrochée au rétroviseur interne.
Après 45 minutes de chasse et d’exploration, nous nous couchons. Aux environs de minuit, nous entendons un mâchonnement continu, et nous découvrons, derrière la baie vitrée, à 3-4 mètres, une maman hippopotame, et ses petits en train de brouter l’herbe devant la chambre.
Le lendemain, nous repartons le cœur serré.
18:50 Publié dans Loisirs | Lien permanent | Commentaires (1)