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17/04/2007

Virginia Tech.

Ce massacre est réellement épouvantable, même pour un monde blasé comme le notre.

Mais ce n’est que temporaire. Après une période de remise en question et de recherche de coupable, l’opinion publique et surtout les médias vont attendre presque avec impatience la prochaine catastrophe pour la mettre en scène. Les 32 morts de Virginia Tech ont déjà poussé dans les oubliettes de la mémoire collective les 16 de Columbine.

Toujours plus haut, telle est la quête de notre temps.

On en parle car c’est le pire massacre, avec le plus de victimes, jusqu’au prochain.

 

Pourquoi ? Cela reste la question fondamentale.

L’auteur des coups de feu, qui s’est ensuite suicidé se nomme Cho Seung-hui, il est d’origine sud coréenne (curieusement, tous les médias américains insistent sur ce fait). Il semble à l’heure actuelle qu’il ait agit à la suite d’une rupture amoureuse.

 

Mais le problème de fond reste le même, la vente libre d’armes extrêmement puissantes (dans ce cas particulier, un glock 19 et un Walther P22), semi-automatiques, voire automatiques. Des voix, toujours les mêmes, s’élèvent pour dire que rien n’a été fait depuis Columbine. D’autres, toujours les mêmes, s’accrochent à une loi permissive qui me semble dépassée. Certains pensent même que le fait que les armes aient été bannies du campus depuis longtemps est un facteur qui a multiplié le nombre de victimes (merci à "Inside The USA", pour le lien). C’est logique, si tous les étudiants étaient armés, ils auraient pu riposter. En plus , on résoudrait  le  problème  de  la  surpopulation des amphis en première  année.

 

Permettez moi d’aller au-delà de cette pensée néo-conservatrice (magnifique oxymore) : ce n’est pas la vente libre des armes que l’on doit interdire pour éviter de nouveaux massacres, mais l’entrée des sud-coréens sur le territoire des Etats-Unis.

Je suis sûr que certains y ont effectivement pensé.

 

En tout cas, ce massacre a déjà son héros : Liviu Librescu.

 

Paix à son âme, comme à celles de toutes les autres victimes de cet acte insensé.

 

 

  

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Image récupérée ici

15/04/2007

Le médecin-patient.

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Avec le « Cardiologue-cardiaque », je n’avais fait qu’effleurer une situation peu explorée dans les pourtant milliers de pages consacrées à la relation médecin-malade.

 

Qu’en est-il quand notre patient est un autre médecin, et qu’il est atteint d’une pathologie grave ?

 

J’ai trouvé un très bon article du JAMA (en accès gratuit à condition de s’être enregistré) qui ouvre des perspectives intéressantes sur ce sujet.

 

Les auteurs partent d’une histoire vraie.

Un médecin, le Docteur B., chef de service développe à 50 ans une insuffisance cardiaque.

Il consulte un jeune cardiologue qui le considère comme son Mentor.

L’évolution se fait sur une dizaine d’années et le patient bénéficie de l’implantation d’un pace-maker, puis d’un défibrillateur implantable. Il refusa obstinément toute coronarographie car ses tests fonctionnels coronaires demeuraient normaux.

Au bout de 10 ans, il développe une hémopathie maligne qui va nécessiter un suivi auprès d’un hématologue un peu moins soumis (et aussi plus expérimenté, car il avait suivi son propre père, médecin lui aussi) et aussi l’implication croissante de son propre fils qui devient son médecin traitant.

Finalement, le Docteur B. décédera de son hémopathie après une longue période de déclin. Tout au long de sa maladie il s’impliquera énormément dans ses soins, parfois au grand dam de ses soignants.

 

Les acteurs de l’histoire (je soupçonne que le premier auteur est en fait le fils du Dr B.) vont faire le point sur leur attitude respective, afin d’en tirer des conseils pour gérer une situation qui n’est jamais simple.

 

L’article m’a fait me souvenir des quelques médecins que j’ai croisés dans mon exercice professionnel. Presque tout y est dit.

 

Je vais le paraphraser, mais je vous conseille bien sûr d’aller vous faire votre opinion vous-même.

 

La perspective du médecin traitant


Il existe presque toujours une communauté d’esprit, voire une déférence entre le médecin traitant et le médecin-patient qui va gêner l’établissement d’un minimum d’autorité et d’objectivité nécessaires à la démarche du soignant.

 

La déférence peut confiner à ce que les auteurs nomment le « VIP syndrome ».Dans ce cas, les soignants vont se sentir (ou être) obligés d’accorder à leurs malades des privilèges pouvant même être parfois néfastes aux soins. Dans le même ordre d’idée, les amis médecins du patient risquent de vouloir intervenir dans les soins, ce qui est toujours préjudiciable.

 

Le manque d’objectivité (d’équanimité, pour faire plus savant) peut conduire à un surinvestissement physique ou psychique. Les auteurs pointent le risque de dépression, de colère, d’agressivité du médecin traitant, voire son retrait pur et simple.

 

En général, les médecins se protègent en se concentrant uniquement sur l’aspect technique de la maladie, et en « refusant » de voir le patient et sa famille. Ne pas voir ce qui peut faire souffrir est souvent vécu comme de l’inhumanité par les patients.

Bien sûr, dans le cas d’un médecin-patient, les points communs, voire la filiation professionnelle vont faire voler en éclat cette protection.

Dans le même ordre idée, un excès d’empathie peut conduire à retarder, voire ne pas effectuer d’actes jugés pénibles, bien que nécessaires.

 

Enfin, le médecin traitant peut croire à tort que son confrère malade dispose de l’ensemble des données scientifiques sur sa maladie. Ce n’est souvent pas le cas, et l’accès devenu incroyablement simple à la connaissance médicale (via notamment Internet) est systématiquement mis en échec par l’expansion effrénée de cette dernière.

 

La perspective du médecin-patient


Le « risque » principal du médecin-patient est de se soigner lui-même.

Je vais adopter un profil bas, puisque je me suis choisit comme médecin référant, et que je m’automédique largement.

Laissons donc parler le grand Osler (oui, celui de l’endocardite) :

The physician who doctors himself has a fool for a patient

Les choses sont claires, pourtant nous le faisons tous.

 

La confiance que l’on a en soit, nos connaissances médicales et en général la bonne appréciation de nos limites vont en effet être contrebalancées par son propre ressenti de la maladie. Un médecin va autant dénier sa maladie, si ce n’est plus, qu’un malade.

 

Et en général, les médecins n’aiment pas aller voir leurs confrères.

Que celui ou celle qui aime se faire examiner par le médecin du travail ou par un confrère que l’on s’est résolu à aller voir lève le doigt !

Je ne vois pas de doigt levé, j’en étais sûr. Il faut se faire violence pour passer de l’autre côté du stéthoscope.

 

L’identité professionnelle est importante aussi.

Je l’ai déjà dit, je ne pense pas être le seul (du moins j’espère), mais j’ai le sentiment que les études médicales et la pratique font que je suis médecin 24 heures sur 24.

Je fais autre chose que de la médecine, bien sûr, mais mon métier est une seconde peau. A la limite, la confusion des patients qui ne savent pas comment m’appeler : « Monsieur, pardon, Docteur… » me conforte dans cette idée. Je me sens autant « Docteur » que « Monsieur ». Souvent je réponds que je suis les deux. Je me fiche bien de la gloriole du titre, c’est ce qui a derrière qui m’importe.

Donc pour en revenir à l’article, les médecins-patients perdent parfois leur travail qui est souvent leur raison de vivre et le fruit de longues années d’études.

 

Autre difficulté, la volonté souvent absolue de la part du médecin-patient de vouloir tout contrôler de sa maladie, et ce, indépendamment de la confiance qu’il peut avoir en son soignant. Comme déjà dit, cette volonté provient du sentiment de pouvoir se traiter soi-même, mais aussi de rationaliser la maladie. La mettre dans de toutes petites boîtes, de façon perfectionniste. Tout cela pour ne pas voir en face l’avenir.

 

La phrase exacte de l’article est la suivante :

« Physician-patients may also respond to the threat of illness by attending obsessively to technical details, but, in the process, also avoid painful truths and the big picture. ».

 

Big picture”, quelle expression formidable pour dire toutes les souffrances et la mort.

J’ai aussi souvent retrouvé ce mode de défense chez mes malades non médecins.

Actuellement, j’ai un patient qui a une endocardite infectieuse « refroidie » mais quasiment inopérable. L’évolution spontanée est désastreuse. Et bien, sa femme, qui est infirmière, terrorise les miennes en leur demandant sans cesse son nombre de globules blancs du jour, au leucocyte près. Elle ne veut pas comprendre que ça n’a plus aucune importance.

 

Revenons à l’article

Evidemment ce contrôle excessif va être dommageable pour tout le monde. Comme le dit un vieux proverbe turc, rien ne vaut pour faire couler un bateau que de lui donner deux capitaines.

 

Enfin, une certaine retenue de la part des médecins-patients peut rendre plus difficile les soins. Les auteurs constatent que les médecins, habitués aux plaintes (continuelles) de leurs patients ont tendance à minimiser les leurs.

D’où des traitement, notamment antalgiques inadaptés.

 

L’article se termine en donnant quelques pistes pour rendre plus facile cette relation particulière.

Je ne vais pas les citer toutes, mais la plus importante est la négociation et de jouer cartes sur table dès la première consultation. Ici, plus qu’ailleurs, il ne faut pas laisser la place au non-dit.

 

J’espère que ce petit résumé n’a pas trop ennuyé les nombreux lecteurs non médecins de ce blog. Pour les autres, les médecins, il a au moins une vertu, celle de nous rappeler que nous seront un jour ou l’autre des patients.

Vulnerant omnes, ultima necat.

 

 

 

 

 

Références de l’article :

 

Erik Fromme, J. Andrew Billings. Care of the Dying Doctor. On the Other End of the Stethoscope. JAMA. 2003;290:2048-2055.

 

Site du JAMA: (ici)

19:50 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (5)

14/04/2007

L’obéissance.

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Hier en début de garde, j’ai quand même réussi à lire L’obéissance de François Sureau en entier.

Ce n’est pas un grand exploit, le bouquin fait 155 pages, et se lit facilement.

Il raconte l’épopée tragi-comique en pleine Grande Guerre d’un groupe de soldats chargés de convoyer le bourreau de Paris, ses aides et sa guillotine derrières les lignes allemandes, dans la ville de Furnes, afin d’y exécuter un condamné à mort belge.

Ce petit livre est une subtile analyse de l’équilibre entre le devoir de tout soldat (et de citoyen en ce qui concerne le bourreau) en pleine guerre et l’obéissance aveugle à des ordres dérisoires venus de l’Autorité. C’est aussi une critique contre la guerre et toutes ses absurdités.

Rien de bien révolutionnaire, mais sa lecture vous fera agréablement passer le temps.

 

Par contre, la semaine dernière, j’ai terminé de lire en diagonale les 100 dernières pages de « La théorie des cordes » . Et encore, uniquement pour dire que je l’ai terminé. C’est largement le plus mauvais bouquin de Somoza. Une théorie physique ultra complexe pour arriver à une histoire plus médiocre qu’une banale histoire de fantôme qui terrorise les héros improbables du bouquin. Bien sûr, comme dans tout livre digne de ce nom depuis « Da Vinci Code », on y retrouve une allusion christique. Il ne faut pas décevoir les attentes d'un lectorat exigeant.

Je vais vous faire faire des économies (23 euros) : le nom du "coupable" est à la page 491.

21:30 Publié dans Livres | Lien permanent | Commentaires (1)