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10/07/2007

Les pâtes chinoises.

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Je ne suis pas un fanatique de politique, vous le savez.

Notamment, j’évite d’en parler sur ce blog qui n’est pas dédié ni à la « Res Publica », ni à la diffusion de mes idées politiques, qui sont d’ailleurs fort limitées.

Mais je vais faire une (autre) petite exception.

Je suis tombé sur un éditorial du Washington Post (après le NYT d’hier) et sur sa critique publiée sur un blog.

Les deux sont intéressants à plus d’un titre.

Et comme les idées qu’ils sous-tendent me trottent dans la tête depuis plusieurs semaines, je vais y consacrer une (longue) note.

 

L’éditorialiste E.J Dionne Jr. (un nom qui me parait d’origine québécoise, le hasard n’existe pas) a publié le 10/07 un petit texte titré « French lessons for Bush ».

Vous connaissez les relations difficiles qui lient nos deux pays, et cette relation amour/haine née dès notre première rencontre.

Vous savez aussi que la frange la moins conservatrice de ce beau pays est en train de critiquer la politique de Bush et notamment son implication en Irak.

Chose impensable il n’y a pas si longtemps.

Nombreux ont été « les traîtres » qui ne faisaient que critiquer une guerre injuste, inutile et dévastatrice autant pour les américains et les irakiens.

Les choses changent.

Certains osent considérer notre pays comme autre chose qu’un repère de « Cheese-eating surrender monkeys ».

Certains avancent même que nous n’avions peut-être pas totalement tort dans cette histoire.

Cet éditorial sous-tend donc tout cela, ce qui est en soi même encore inhabituel.

Mais qui plus est,  il compare Bush à Sarkozy, au détriment du premier.

E.J Dionne Jr. loue la politique d’ouverture de Sarkozy, pour mieux critiquer celle de Bush qui poursuit, isolé, sa politique en dépit de la majorité démocrate et surtout entretient des clivages, là ou le pays devrait être uni pour sortir de l’ornière irakienne.

Il loue donc la proposition faite à DSK de diriger le FMI. Il fait une allusion à Kouchner. Il a oublié Védrinne et peut-être Attali (je ne sais pas ou il en est actuellement). Qu’importe, l’idée est là.

Bien sûr, il se doute bien que ces manœuvres ont aussi pour but de couler un peu plus rapidement le Titanic-PS, mais il reste trop centré sur sa propre politique intérieure pour élaborer :

« Hollande is right to be skeptical -- of course there's political benefit to Sarkozy in what he's doing. But seen from the perspective of a sullen, immobilized Washington, Sarkozy's strategy of reaching out is inspirational. ».

Tiens, il connaît Hollande ? Ce n'est pourtant pas une faute d’homonymie, car le pays européen se dit « Netherlands » et non pas « Holland » en anglais.

Cet éditorial utilise donc Sarkozy pour jauger Bush, comme Montesquieu le faisait de Rica et Usbek pour Louis XIV.

 

Le blog qui critique cet article est à mon avis beaucoup plus centré sur la politique de Sarkozy en tant que telle.

Il cite un article du Times qui est beaucoup plus lucide sur notre « Super-Sarko » comme le journaliste britannique le surnomme.

Ses manœuvres ont en effet probablement plusieurs niveaux, ce qui montre, à mon avis sa maîtrise consommée de la politique.

Le bourrin agité que j’ai cru voir en lui il y a 9-12 mois est en fait un très fin politicien. Dans mon esprit, ce n’est pas forcément une critique.

Il tend la main à une gauche désemparée. Difficile de la refuser devant le public, d’autant plus que les « hochets de vanité » proposés sont tentants et que Ségolène aux abois avait largement pratiquée la politique de la main tendue entre les deux tours. Bien sûr que cette politique généreuse affaiblit ce qui reste des instances dirigeantes du PS, c’est un des buts de la manœuvre. Il sait jouer de l’ego des éléphants pour mieux les enferrer. C’est brillant comme politique, d’autant plus que si l’ego des politiciens (notamment ceux des éléphants) était une énergie, on pourrait allègrement se passer de centrales nucléaires, et même de ces vilaines éoliennes.

Le Times cite même une phrase de Bayrou que je connaissais pas, et que je trouve fabuleuse : « Mr Sarkozy was behaving “like a piranha loose in a bowl of goldfish” ». En français : « on dirait un bocal de poissons rouges dans lequel on aurait plongé un piranha».

Je trouve la traduction anglaise bien plus expressive que la phrase originale.

Tout le problème de la gauche y est résumé.

Les poissons du PS ne sont pas rosés, encore moins rouges, mais ils sont dorés.

C'est-à-dire qu’ils ne représentent plus qu’un petit quarteron (ouarff) de « goldfishes », qui sont à leur image.

Comment des militants de gauche qui ont des aspirations tout à fait louables (par exemple mon beau-frère cheminot) pourraient se reconnaître en eux ?

D’un côté un ouvrier de LU, ou un cheminot, de l’autre Fabius ou DSK. Tout le problème du PS est là.

Les dirigeants de l’UMP, eux,  ressemblent à leurs électeurs.

Salope!!

Pardon, je ne me souviens pas avoir dit ça et je vous renouvelle toute mon amitié...

Quand à Ségolène, elle rédige l’ « autocritique » (souvenirs rouges, probablement…) de sa campagne. Très bien.

Elle me fait de plus en plus penser à Sainte Thérèse de Lisieux qui avalait les crachats des tuberculeux pour mieux parvenir à son but mystique.

Je ne la vois pas représenter quiconque à part elle, même dans 5, 10 ou 15 ans. La canonisation, c’est 5 ans après le décès, minimum.

 

Le problème crucial est là pourtant.

La démocratie ne peut marcher que si il existe une opposition qui joue son rôle de surveillance et à mon sens, chose plus importante, qui sert à élever le niveau des grands débats nationaux. C’était en tout cas la conviction profonde de Pierre Mendès France qui a passé presque toute sa vie politique dans l’opposition, et qui connaissait donc bien son sujet.

Sarkozy a toutefois un rôle ambigu ici.

D’un côté, il poursuit l’atomisation du PS, qui certes, le mérite bien, mais qui affaibli encore une opposition moribonde (heureusement qu’il y a le MoDem, ouarfff).

Mais on peut aussi imaginer que le PS, incapable de se réformer depuis Epinay a peut-être besoin d’un Sarkozy pour faire table rase des éléphants et faire éclore de nouveaux talents.

Je ne suis pas loin de penser que le PS tient peut-être en Sarkozy une clef essentielle de son renouveau, et en allant plus loin, de la préservation de notre Démocratie (c’est tiré par les cheveux, uhmmm…).

 

Bon, maintenant, je suis sûr que ceux qui ne se sont pas endormis ou qui n’ont pas abandonné la lecture de cette longue note se demandent pourquoi je l’ai appelée «Les pâtes chinoises. » ?

Et bien, j’avais acheté le 7 mai 2007, 135 Kgs de pâtes chinoises et des matelas chez Carrefour afin de recueillir dans ma cave les résistants passifs ou actifs à la politique du gouvernement actuel. En parcourant le web, je ne pouvais en effet que prévoir qu’ils seraient impitoyablement poursuivis au lendemain des élections par la police politique d’un pouvoir sarkozyste nécessairement liberticide.

Je me suis dit que la cave d’un militant UMP d’avant les élections (notion très importante…) serait un refuge sûr.

Or, il ne se passe rien.

Même ma blague sur la nouvelle carte d’identité qui fait en plus carte vitale ne fait plus frémir.

 

« Tu as vu la nouvelle carte d’identité qui fait carte vitale ?

  • Non !
  • Je viens de la recevoir ! Tu veux la voir ?
  • Bien sûr ! ».

 

J’exhibais alors ma carte UMP rutilante.

 

Par ailleurs, problème devenu majeur pour moi : que faire de ces pâtes et de ces matelas qui me gênent car je ne peux plus sortir le barbecue de la cave ?

A votre avis, j’attends la rentrée sociale qui ne pourra qu’être sanglante et insurrectionnelle (ou vice versa) ?

 

 

 °0°0°0°0°0°0°0°0°

                                                                     

PS (ouarff, je n’ai pas fait exprès, celle là…) :

J’ai un petit souci (vrai, cette fois) avec Sainte Thérèse de Lisieux et l’histoire des crachats.

Il me semble que Caroline m’ait raconté cette histoire, il y a bien longtemps maintenant.

Mais comme j’avais des doutes, j’ai fait un tour sur Google. J’y trouve bien une référence. J’étais fou de joie avant de me rendre compte que la référence pointe sur une de mes notes…

Est-ce que l’un d’entre vous a déjà entendu cette histoire ?

Ou est-ce un fruit déformé de ma mémoire ?

 

 

 

 

Edition 14h12: "amélioration" du passage sur "Salope".Mince, je l'ai encore dit et je vous renouvelle toute mon amitié...  

09/07/2007

Gueule de bois

Cet éditorial du NYT (signalé par le toujours excellentissime ITU) doit vriller les tympans de ceux qui ont conduit la calamiteuse guerre en Irak.

 

Ou sont-ils tellement coupés des réalités de ce Monde qu’ils ne se sentent pas concernés par un tel réquisitoire ?

On peut reprocher tout ce que l’on veut à Chirac. Bien qu’assez proche de ses idées (vous le savez bien…), j’ai eu conscience de ses insuffisances.

 

Mais je lui serais toujours reconnaissant de ne pas nous avoir entraînés dans ce merdier.

 

Les Britanniques se sont embarqués, eux, victimes de leur proximité avec les EU.

 

Et nous y sommes bien allés, la première fois.

08/07/2007

La cavalerie.

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Remington, Frederic.
La charge de cavalerie.
1907. The Metropolitan Museum of Art, New York




Au cours de ma dernière garde de réa de chirurgie cardiaque, j’étais bien content, que comme d’habitude, la cavalerie arrive juste à temps.

 

Comme toutes les réanimations de l’Hôpital étaient pleines sauf la mienne, j’ai du accepter un syndrome fissuraire chez un patient de 81 ans porteur depuis 10 ans d’une prothèse aorto-bifémorale.

Il a développé tardivement un faux anévrysme sur l’anastomose haute et a décidé de le rompre le jour ou donc, j’étais de garde.

 

Je l’ai récupéré, inondé de loxen® (il avait 150 mmHg de systolique) et appelé les vasculaires à la rescousse.

Les chirurgiens demandent un nouveau scanner, jugeant celui réalisé dans le centre envoyeur « ininterprétable » (c’est assez fréquent, grrrrrr !).

Je le descends donc à 00h45 du matin au scanner, avec tout le matériel et l’IADE (infirmière anesthésiste) d’astreinte.

Au moment exact où l’on sort de la réa, une infirmière du service vient me chercher pour un patient opéré récent « qui est pas bien ». Il est en effet bien pâle,  et a 80 mmHg de systolique. Je crains une tamponnade.

Je le fais donc emmener à la réa et cadrer par les IDE de nuit qui sont top niveau.

Au scanner, les images sont péjoratives, et j’appelle l’anesthésiste de garde pour qu’elle me relève afin de surveiller le patient avant de l’emmener au bloc de vasculaire.

J’appelle en réa pour savoir comment va le second patient : « Pas trop mal ».

L’anesthésiste arrive, je remonte ventre à terre en réa.

Avec un remplissage, le second patient va mieux.

Je lui jette un petit coup d’œil en échographie cardiaque : bingo, liquide dans le péricarde, c’est bien une tamponnade.

Comme pour m’approuver, le patient se dégrade de nouveau brutalement et sa TAS passe à 45 mmHg.

Je le remplis comme une mule et j’appelle l’équipe chirurgicale en croisant les doigts (je n’ai jamais eu à drainer une tamponnade en catastrophe car le chirurgien est toujours arrivé à temps, mais on dit qu’il faut toujours une première fois…).

Les nouvelles du scanner sont assez alarmantes, l’anesthésiste et le chirurgien vasculaire sont entrain  de pousser fissa fissa le patient  au bloc.

De mon côté, ça va mieux : l’équipe arrive et l’intervention débute.

Je récupère le patient en bon état une heure plus tard.

L’anesthésiste de chirurgie cardiaque me raconte que l’IADE qui était venue l’aider a été appelée en catastrophe au bloc de vasculaire au beau milieu du drainage.

Je vais me coucher 2 heures.

Le matin, on nous annonce que le patient du syndrome fissuraire n’a pas survécu.

 

Cette histoire de syndrome fissuraire m’en a rappelé une qui a marqué mes jeunes années d’interne de cardio.

A chaque fois que je me retrouve devant une dissection aortique ou un anévrysme aortique en train de se fissurer (heureusement éventualité rare en réa de chirurgie cardiaque), j’éprouve la même peur presque panique.

Un infarctus, un choc cardiogénique ou un trouble du rythme ventriculaire ne me font pas peur, par contre une aorte fragile me terrorise.

 

Je m’allonge sur le divan (n’est-ce pas, Mélie ?) et je raconte. D’ailleurs je m’étonne de ne pas avoir déjà mentionné cette histoire dans ce blog.

 

Premier choix de cardiologie (1997-1998).

Je récupère aux soins intensifs un jeune patient (40-42 ans) chez qui mon assistant venait de dépister une dissection aortique.

L’histoire est assez triste, vous allez voir.

Sur son lieu de travail, il présente une douleur aiguë des 2 jambes et à la poitrine.

Amené aux urgences, il a encore mal aux membres inférieurs, mais plus rien à la poitrine. A l’examen, on retrouve une ischémie aiguë distale et on appelle les chirurgiens vasculaires.

Entre temps, on le fait voir à un cardiologue (qui sera agrégé des années plus tard) car son ECG est un peu « curieux » : RAS.

Il est admis au bloc de vasculaire, ou on le « fogartise » (sonde de Fogarty) et on ramène du caillot frais.

Il sort du bloc sous héparine, n’ayant plus mal nulle part. Tout le monde est soulagé et bien fier de lui.

Les vasculaires demandent une ETO (échographie trans oesophagienne) sans urgence pour éliminer une embolie d’origine cardiaque (par exemple au cours d’une fibrillation auriculaire paroxystique).

L’examen est fait le lendemain par mon assistant, qui met donc en évidence une dissection.

Il arrive tout blanc en réa avec son patient et commence à appeler les chirurgiens cardiaques qui sont dans un autre hôpital.

Je discute tranquillement avec le patient qui ne se plaint de rien et qui s’étonne un peu d’un tel remue-ménage.

En fait, l’ECG « curieux » montrait une hypertrophie ventriculaire gauche, signe d’une HTA que le patient refusait de faire traiter. Sur son thorax de face on voyait très bien (a posteriori tout est plus facile) un élargissement du médiastin.

Je le mets sous bêtabloquants IV pour faire baisser sa TA..

Juste à ce moment une équipe du SAMU entre pour nous apporter une patiente.

On leur raconte l’histoire, et ils décident de convoyer notre patient immédiatement.

Alors que je fais la relève au médecin, je vois du coin de l’œil l’aide soignante mettre un bassin sous les fesses du patient arquebouté.

Une fraction de seconde plus tard, sa tête devient toute rouge, ses jugulaires deviennent énormes et il s’effondre dans le lit.

Son aorte s’est finalement rompue dans le péricarde, provoquant une tamponnade suraiguë, et du même coup un choc hémorragique.

On n’a jamais réussi à le récupérer.

L’aide soignante n’avait vraiment rien à se reprocher. Personne ne lui avait dit qu’il fallait garder ce patient au repos complet. De toute façon, étant donné le délai de prise en charge de 24 heures et la mise sous héparine, on ne lui avait pas donné toutes ses chances, et ça, c’est une vraie litote.

 

Ce jour là, j’ai vraiment compris ce que le concept jusqu’alors très théorique de dissection aortique signifiait vraiment.

Une mort instantanée, totalement imprévisible dans le temps, et totalement inéluctable.

Un véritable cauchemar qui resurgit devant moi, ponctuellement.

Je me souviens encore du nom de ce patient (M. P-A), 9-10 ans après, alors que je suis parfaitement incapable de me souvenir de celui d’un patient que j’ai vu ce vendredi.

La cavalerie est arrivée trop tard ce jour là, et les méchants aux chapeaux noirs ont gagné.

13:40 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)