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06/04/2006

La P1

Je suis tombé sur un article de Sandrine Blanchard, dans « Lemonde.fr » d’aujourd’hui.

 

« La galère des apprentis médecins » raconte la vie de quelques étudiants en première année de Médecine à Lille.

 

Tout y est : la pression des autres (explicite ou implicite), le travail insensé, les périodes de découragement, puis la délivrance ou l’amère désillusion.

Mes deux P1 datent de 1990-1991 et 1991-1992, il y a près de 16 ans !

Le taux de réussite était de 22%, un peu plus que les 17% de cette année.

    

 

En lisant cet article, j’ai eu l’impression, peut-être erronée, qu’il était « injuste » de faire passer les apprentis médecins sous de telles fourches caudines ("On s'en veut de regarder la télé, car on sait que, pendant ce temps, d'autres travaillent"). Que ces années étaient destructrices pour les recalés, et même les lauréats ("Avant les examens de janvier, j'étais quasiment en pleurs. Heureusement que mes parents m'ont soutenue, raconte-t-elle. C'est dur. Psychologiquement, on n'en sort pas indemne").

 

Ce point de vue me rend perplexe.

Je ne tiens pas compte de mes propres souvenirs, probablement améliorés, « patinés » par un recul de 16 ans. Je pense n’avoir retenu que les bons côtés, source de nostalgie rassurante. Ce que j’en retiens donc après 16 ans : c’était dur, pas la période la plus agréable de ma vie, mais sans plus. Je ne me reconnais pas du tout dans cette "via dolorosa" médicale.

 

De plus, encore une fois, dans cet article, le dogme du « tout pour tout le monde» règne en maître.

Pourquoi je ne pourrais par faire Médecine, puisque je veux le faire (Parce que je le vaux bien…) ?

Pourquoi pas moi, alors que d’autres l’ont fait ?

Ces questions, qui me semblent nécessaires initialement, se pervertissent avec le temps (et notre époque). Petit à petit, cette salutaire impulsion de départ devient une revendication.

Un peu comme un alpiniste escaladant l’Annapurna se plaindrait des mauvaises conditions et de ses souffrances, puis irait râler parce que la montagne est trop haute, trop froide…

 

Tout devient une revendication actuellement ; tout est dû à tout le monde.

Et personne n’accepte plus l’échec, vécu comme une discrimination ("Les reçus-collés se sentent complètement frustrés et les parents ne comprennent pas que 10 sur 20 ne soit pas suffisant").

Personne n’accepte plus l’effort (« Un programme titanesque débité sans répit par les professeurs, dont certains n'acceptent pas de faire de polycopiés »). Non, mais vous vous rendez compte ! Même pas de poly !


 

J’ai bien compris que tout est dramatisé (l’effort demandé, la pression psychologique des autres, l’attente des résultats…) pour aller dans le sens de la mode actuelle, et rendre l’article plus attractif , mais l’idée véhiculée me semble dangereuse.

 

Bref, une illustration de notre société ventripotente, assistée, non productive et geignarde.

 

On se prépare à des lendemains qui déchantent…

 

01/04/2006

Theheart.org

 

 

 

 

 

J’ai encore retrouvé ce jour deux textes intéressants sur ce site.

Le premier est une nouvelle étude (STEP trial) sur l’impact de la prière sur le devenir des patients pontés.

J’avais parlé d’une étude similaire, MANTRA II, pour les patients bénéficiant d’une dilatation coronaire.

Et bien, la prière ne modifie pas le taux de morbi-mortalité post opératoire, sauf dans le groupe des patients qui savent que l’on prie pour eux.

Mais, dans ce cas, la prière semble aggraver les choses !

Une des explications données est le stress engendré par la connaissance de l’intercession d’un groupe de prière : « mon cas est-il donc aussi désespéré ? ».

  

  

Deuxième article sur « le vent de panique » suscité par un article du « Figaro » sur l’étude CHARISMA.

La SFC (Société Française de Cardiologie) fait les gros yeux en menaçant d’un procès le quotidien en cas de décès d’un patient en France. En effet, l’article inciterai, en effrayant les patients, à arrêter leurs antiplaquettaires.

Je n’ai entendu aucune inquiétude émanant de patients, ou même entendu parler d’un quelconque « vent de panique ».

Néanmoins, je suis très satisfait que la SFC pense s’être trouvée une utilité.

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STEP trial:

Benson H, Dusek JA, Sherwood JB, et al. Study of the therapeutic effects of intercessory prayer (STEP) in cardiac bypass patients: a multicenter randomized trial of uncertainty and certainty of receiving intercessory prayer. Am Heart J 2006; 151:934-42.

   

Krucoff MW, Crater SW, Lee KL. From efficacy to safety concerns: A STEP forward or a step back for clinical research and intercessory prayer? The study of therapeutic effects if intercessory prayer (STEP). Am Heart J 2006; 151:762-763.

 

 

20/03/2006

Web et médecine.

Deux histoires intéressantes, lue ce matin dans theheart.org.

 

La semaine dernière se tenait à Atlanta la « grand-messe » annuelle des cardiologues du monde entier.

Au cours de ce congrès sont présentés les résultats de grands essais cliniques, pouvant potentiellement changer notre pratique quotidienne.

 

Sans rentrer dans le détail, un essai (« CHARISMA ») a montré qu’une molécule, d’emploi courant en cardiologie pouvait être délétère en association avec l’aspirine chez certains patients.

Ce résultat a surpris tout le monde, cardiologues investigateurs, et simples auditeurs.

Tout le monde sauf…

Le monde de la bourse, qui connaissait déjà les résultats de cet essai le 28/02, bien avant le 12/03, jour officiel de publication dans le NEJM et de présentation à Atlanta.

En théorie, personne, à part un petit groupe, doit connaître les résultats d’un essai avant leur date de parution. Vous imaginez bien pourquoi : risque de manipulation des cours de la bourse, risque d’être tenté de modifier les résultats, et aussi révélation de résultats avant que toutes les analyses de qualité soient achevées.

A priori, la fuite provient du laboratoire pharmaceutique (français).

Il y a donc quelque chose de pourri dans le royaume de l’industrie pharmaceutique (« Something is rotten in the state of Denmark »). Les sociétés savantes et les journaux scientifiques ont bien haussé le ton, mais comme toujours, c’est celui qui a l’argent qui a raison.

 

Deuxième histoire, sur le même essai thérapeutique.

Les grandes sociétés savantes de cardiologie (Une européenne : ESC, et deux américaines : AHA et ACC) ont publié un « statement », c’est à dire une déclaration/un avertissement devant le risque que des patients arrêtent d’eux même cette fameuse molécule.

 

Il semble en effet qu’un grand nombre de patients (en tout cas bien plus que ceux qui lisent le NEJM) ait envisagé d’arrêter le traitement après avoir cherché et trouvé des informations sur le web.

 

A ma connaissance, c’est la première fois que des sociétés savantes prennent en compte le risque que les patients court-circuitent leurs médecins, pour s’abreuver directement à une source scientifique rendue facilement accessible par le web.

Problème intéressant, car destiné à prendre de plus en plus d’importance à l’avenir.

Ce n’est pas tellement préoccupant à cause d’une éventuelle perte de pouvoir du médecin, mais surtout du fait d’un risque majeur de mauvaise compréhension par le patient.

 

Enfin, on risque de se retrouver dans une situation similaire aux US, ou les grandes compagnies pharmaceutiques font directement la publicité de leur produit dans les médias. Bien évidemment, elles occultent tous les biais/effets secondaires/indications exactes de leurs produits. Après, le patient/consommateur désinformé va faire le siège de son médecin, pour que ce dernier lui prescrive la molécule miracle.

    

Il y a donc aussi quelque chose de pourri dans le royaume de la médecine...