Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

17/05/2006

19 stents.

Un patient arrive pour un syndrome coronarien aigu dans une clinique de la région.

A la coronarographie : lésions tritronculaires.

Je n’ai pas les détails, mais à la fin de la procédure, il se retrouve avec 19 (dix-neuf) stents conventionnels intra-coronaires.

Sachant que le pourcentage de sténose est de 20% par stent à 12 mois, calculez le risque que ce patient repasse sur la table de coronarographie à six mois, et à 12 mois.

Autre détail qui a son importance : en général, les stents sont non pontables.

16/05/2006

Schéhérazade en Corse.

La consultation hospitalière du lundi matin, c’est un peu la cour des miracles, en pire.

 

Quasiment que des consultations des services de gérontologie de l’établissement, une sorte d’ « âge de cristal » inversé ou tout être de moins de 80 ans serait impitoyablement pourchassé et abattu.

 

Ce lundi, pourtant deux consultations sont venu égayer mon quotidien.

 

La première : un couple, la quarantaine s’installe devant moi et d’emblée déclare en cœur : « nous sommes venus de Corse pour vous voir ! ».

Sur le coup, je n’ai pas trop fait attention, le service ou je travaille ayant une certaine réputation en dehors des frontières du département.

En fait, le problème du monsieur, puisqu’il s’agit de lui, est assez bénin.

Nous discutons un peu, et je reviens sur leur entrée en matière :

« On vous a conseillé le service, en Corse ?

- Non, non, c’est vous qu’une amie nous a conseillé !

- Sans rire ?

- Elle nous a dit que vous étiez un excellent cardiologue, et que vous pourriez répondre à nos inquiétudes ».

Diable, c’est bien la première fois que quelqu’un vient me voir pour mon nom à l’hôpital.

Je n’ai pas trop forcé mon supposé talent, en dissipant ces inquiétudes qui n’avaient pas lieu d’être.

La fin de la consultation fut euphorique, j’ai même trouvé du charme aux couches pleines !

 

Mais la dernière patiente, et surtout sa petite-fille allaient achever de me mettre de bonne humeur.

La vieille dame est âgée, avec des lésions coronaires et une double valvulopathie inopérable.

La petite fille est magnifique, une sorte de Schéhérazade moderne. Petit jean, petit haut de tailleur noir, une voix douce, dénuée d’accent des banlieues. Je lui ai demandé ce qu’elle faisait : elle est conseillère clientèle dans une grande banque.

J’ai aussi rarement vu quelqu’un d’aussi prévenant pour sa grand-mère.

 

Un ange passe.

 

Mémé/mamie se dit hanaa (ou quelque chose approchant) en arabe.

10:08 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)

14/05/2006

De garde.

Vendredi, j’ai eu une garde agitée.

A l’hôpital, ce n’est pas inhabituel, mais ma nuit n’a été entrecoupée que de rares plages de sommeil.

Appel du SAMU à 20h00, pour admettre une dissection aortique. Il est un peu loin, l’hélicoptère ne peut pas décoller, il arrivera un peu plus tard dans la nuit.

A 22h30, l’homme d’une soixantaine d’année  rentre directement au bloc.

Il sort vers 4h00 (la pire des heures). L’intervention a été remarquablement courte, et le patient stable toute la nuit. En le réceptionnant, nous avons évoqué un temps bien révolu avec les infirmier(e)s.

Les plus anciennes se souvenaient qu’on ne les opérait pas, et que l’on attendait une fin quasiment inéluctable (1% de mortalité par heure dans les premiers jours). Les moins anciennes se souvenaient des premières interventions, débouchant presque toutes sur un décès, ou des séquelles importantes.

Je me souviens des interventions qui duraient 8-12 heures au début de mon internat, avec des résultats assez aléatoires.

Maintenant, l’intervention et le postopératoire sont presque « banals ».

Il faut dire que ce patient avait une vie saine, sans hypertension, sans tabac, sans facteurs de risque opératoire en somme.

C’est le chirurgien qui a trouvé la cause de la dissection : une bicuspidie aortique très calcifiée, sténosante même.

Un peu plus tard dans la nuit (23h00, la pire des heures) une infirmière me fait remarquer que le pacemaker externe d’une patiente endormie(elle n’est pas intubée) semble dysfonctionner. Je regarde ; en effet, certaines stimulations n’entraînent pas de contraction (facilement visible lorsque l’on a une pression artérielle sanglante). Je règle l’appareil, et satisfait, je le repends à la potence. Et là, plus de contraction, artère plate. Arrêt cardiaque.

Je commence à la masser, elle s’assoit l’air effaré, et gaspant pour chercher un oxygène qui ne peut plus alimenter ses organes, du fait de l’absence de débit cardiaque.

On la recouche à plusieurs pour continuer le massage.

C’est assez difficile d’agir dans l’urgence et de réfléchir en même temps et en pleine nuit. Au bout de 10-15 secondes éternelles, je vérifie les connections du pacemaker, et je remarque qu’une fiche est sortie de son emplacement.

Je la rebranche, le rythme repart, on rassure la malade qui a vécu un horrible cauchemar, mais bien réel, celui-ci.

En allant m’allonger, je me demande si je suis encore capable d’assurer des gardes en réa. Cette question est assez récurrente en ce moment, car je récupère de moins en moins bien, et je me questionne sur mes capacités à gérer des patients lourds.

Je me demande si j’ai encore les bons réflexes.

Bon, d’un autre côté, je me suis toujours posé cette question : au début à cause du manque d’expérience, puis à cause du manque de gardes (j’avais arrêté pendant 5 mois quand j’étais sur Paris), puis maintenant, après 200-220 gardes, je me demande si je ne suis pas trop vieux…

           

Je m’endors.

Je rêve que je participe à un concours hippique avec Elisabeth II.

   

Appel à 6 heures (la pire des heures) : un patient greffé cardiaque ventilé, ne ventile plus, justement.

L’infirmière a vite fait le diagnostic : le ballonnet de la sonde d’intubation s’est percé.

Et hop, petite intubation à l’aube.

Je ne me recouche pas, et commence à lire le bouquin que j’avais emmené (l’Enéide modernisée par G. Chandon).

  

Une infirmière vient me chercher : la dialyse d’une patiente vient de tomber en rade.

Il faudrait remettre un catheter veino-veineux dans une veine centrale, son abord fémoral étant de toute évidence devenu indisponible.

D’habitude j’aime bien ça.

Mais pas cette fois : nuit quasi blanche, patiente de plus de 100 Kgs, l’autre veine fémorale déjà occupée, pas de cou (du moins, on ne le voit pas sous les replis graisseux), et plein de petites excoriations potentiellement infectées sur les voies d’abord des deux sous-clavières.

Je dis à l’infirmière que la relève va se charger de ça.

Je retourne à mon bouquin.

  

La relève arrive à 8h30.

Enfin !