Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02/06/2007

La libido à tout prix

Rien de bien passionnant du point de vue du cardiologue dans le numéro de Prescrire de juin 2007.

Par contre, la revue pointe un doigt accusateur (comme c’est souvent le cas) sur un médicament censé augmenter la libido féminine chez des patientes hystérectomisées et ayant bénéficié d’une ovariectomie bilatérale.

Il s’agit d’un patch de testostérone, qui doit être associé à une oestrogènothérapie.

Ce patch fait passer le nombre de relations sexuelles satisfaisantes sur une durée de 4 semaines de 3 à 5 au prix d’un hirsutisme, d’une raucité de la voix, d’une acné, d’une alopécie chez 18% des femmes sous traitement (contre 14% sous placebo, ce qui montre encore une fois l'incroyable puissance de l'effet nocebo).

Une partie de ces effets secondaires n’étant pas réversibles à l’arrêt du traitement.

Par ailleurs, la sécurité à long terme, notamment cardio-vasculaire n’a pas été étudiée.

Je vous conseille une visite sur le site qui vante les mérites de ce traitement, et je n’ai pas résisté au plaisir de vous reproduire ci-dessous le questionnaire proposé pour savoir si votre libido est en berne. Ca ne vous rappelle rien ?

Photo Sharing and Video Hosting at Photobucket

 

Même ma femme qui n’est ni ovariectomisée, ni hystérectomisée s’est sentie (un peu) concernée.

31/05/2007

La notice de la notice.

Découvert grâce à un article de Sandrine Blanchard  dans « Le Monde », j’ai découvert cette nouvelle initiative grandiose de l’Afssaps.

Une notice pour expliquer le fonctionnement des notices des médicaments.

J’ai même trouvé la notice de la notice de la notice, c'est-à-dire le communiqué de presse qui accompagne et explique la sortie du dépliant.

J’aime bien la conclusion de l’article : « Le mauvais usage des médicaments entraîne chaque année des hospitalisations. Soit. Mais ne serait-il pas plus judicieux d'améliorer la présentation de ce petit papier illisible qui, accessoirement, se coince toujours entre deux plaquettes de comprimés et empêche de refermer la boîte, ou qui part à la poubelle avec l'emballage du flacon de sirop ? ».

La notice de la notice ici.

La notice de la notice de la notice ici.

 

 

 

 

27/05/2007

L’affaire de la rosiglitazone.

Photo Sharing and Video Hosting at Photobucket

 (Photo tirée du site du New-York Times. Au centre, Steven E. Nissen)

 

 

Le 21 mais 2007, le NEJM a publié en avant première sur le net une méta-analyse de 42 essais (environ 27000 patients) sur le risque cardio-vasculaire d’un anti-diabétique sorti en 1999, la rosiglitazone.

Ce travail montre une augmentation significative de 43% du risque d’infarctus (p=0.03) et une augmentation non significative de 64% du risque de décès (p=0.06). Fait intéressant, les auteurs ont trouvé les données de ce travail sur le site web de GSK (le laboratoire qui commercialise la rosiglitazone). GSK avait en effet décidé d’ouvrir ses données au public il y a trois ans pour plus de transparence (en fait, c’était une décision de la justice américaine). Dans les jours qui suivent, l’action de GSK chute de 9% et des dizaines d’articles alarmistes sont publiés dans des journaux grand public (j’en ai compté 13 dans le « Washington Post » et le « New-York Times »).

 

  Photo Sharing and Video Hosting at Photobucket

Les « leaders d’opinion » médicaux s’étripent joyeusement dans des éditoriaux de revues médicales (le « Lancet » est entré dans la danse le 23 mai) et  l’histoire est remontée au Sénat américain ou se pose la question de la compétence de la FDA.

On exhume de vieux articles (ici et ici) qui prédisaient déjà de tels résultats et les Cassandres d’hier sont devenus les visionnaires d’aujourd’hui.

Bref, une belle cacophonie (ici et ici).

Quelles conclusions provisoires tirer d’une telle affaire ?

- Elle est une nouvelle fois la preuve que le suivi post commercialisation est déficient. Se rendre compte de la potentielle dangerosité d’une molécule près de 8 ans après sa sortie et des millions de prescriptions (alors que la fréquence d’effets secondaires graves serait bien moindre) me parait anormal.

- Les « leaders d’opinion » médicaux sont divisés en deux camps : ceux qui travaillent avec GSK et qui pensent que l’article du NEJM est irresponsable, et les autres qui sont rendus inquiets par ses conclusions. Ce n’est pas une caricature, comme l’atteste cet article de « Theheart.org » daté du 24/05/07 (« The rosiglitazone aftermath: Legitimate concerns or hype? »).

- Le marketing est tout puissant. Cette molécule a soulevé des questions de sécurité (par exemple celui ci datant de 2002 et celui la pointé en mars 2006 par les autorités sanitaires) quasiment depuis sa commercialisation, mais a néanmoins eu un énorme succès commercial (3.2 milliards de dollars de chiffre d’affaire dans le monde l’an dernier).

(Cf. la série d’articles de « Prescrire » sur la rosiglitazone, notamment celui-ci publié en 2002, qui reprend les conclusions de différents journaux datant de 2000-2002).

 

Photo Sharing and Video Hosting at Photobucket

 (Article de la revue "Prescrire" de mars 2005)

 

- C’est quand même curieux qu’un laboratoire pharmaceutique qui ait en sa possession des données d'une telle importance pour la santé publique ne les publie pas, non?

- Je pense que cette affaire va clore rapidement les timides velléités de transparence des laboratoires pharmaceutiques. Les fameuses données non publiées que possèdent tous les laboratoires le resteront donc probablement. Quand on signe un contrat d’investigateur pour une étude, il est bien précisé que les données appartiennent au labo qui reste seul juge pour les rendre publiques ou non. Bien évidemment, les données défavorables ont tendance à rester cachées. Ce n’est qu’à l’occasion de procès (par exemple celui du « Vioxx ») qu’elles sont exhumées.

- Conclusion du point précédent : et si on favorisait la recherche publique ?

- Les laboratoires sont de plus en plus dépendants de la vente d’une seule molécule (les fameux « blockbusters»), donc de plus en plus fragiles,  et donc, in fine, de plus en plus agressifs pour que ces molécules (efficaces ou non, dangereuses ou non) se vendent.