05/11/2008
Arythmie.
Deux histoires de fibrillation auriculaire.
La première est parue dans « le Cardiologue », la revue du syndicat. Je ne cotise pas, mais curieusement je le reçois à domicile et à l’hôpital.
Je ne le lis jamais et le survole à peine le temps de le prendre dans mon casier et de le jeter dans la plus proche poubelle.
Mais cette semaine un titre d’article en couverture m’a interpellé : « Cardiologie « low Cost » : attention danger ».
L’article relate l’histoire d’un patient de 58 ans qui a bénéficié d’une consultation de son médecin traitant avant reprise de l’activité sportive. Le médecin traitant lui fait un ECG qu’il télétransmet à une officine qui propose, moyennant un abonnement d’interpréter des ECG à distance. L’officine répond : fibrillation auriculaire.
Le généraliste débute une anticoagulation par héparine puis AVK. Il l’adresse en suite au cardiologue pour réduction. Le cardiologue regarde le tracé télétransmis, et constate, comme tous les lecteurs du « Cardiologue », qu’il est parfaitement sinusal. Il arrête donc le traitement anticoagulant.
J’avais déjà parlé de ce système ici.
C’est vrai qu’en regardant ce fameux tracé, on peut se demander quelles sont les compétences du mystérieux Dr D. qui en a fait l’analyse…
Donc je le répète, même si certains vont me taxer à tort de corporatisme, ce système de télétransmission et d’interprétation d’ECG est à proscrire.
La seconde est un peu du même genre, et un peu plus classique.
Le service de gastro-entérologie m’adresse un patient cirrhotique décompensé sur une hépatite C chronique, pour prise en charge d’une fibrillation auriculaire.
Le courrier précise qu’un holter ECG a même été réalisé.
Bon, le problème est que je n’ai ni les ECG suspects, ni le holter.
C’est drôle, quand même, d’envoyer un patient en consultation pour demander un avis sur des examens qu’on ne me fournit pas.
J’appelle l’interne sous le regard triste du patient qui a été une star locale en son temps. Il a même été champion olympique.
Il mesure quand même au milieu de ses vapeurs d’ammoniaque le ridicule de la situation.
Je contacte l’interne qui m’apporte finalement les tracés.
Elle aussi a le regard triste et fatigué. Elle a débuté son choix lundi dernier, comme tous les autres internes. Ce qui incidemment explique le flou artistique qui règne à l’hôpital cette semaine.
Elle me tend les ECG.
Je sens qu’ils vont être normaux.
Et j’ai raison, les tracés sont superbement parasités mais montrent indubitablement un rythme sinusal. Encore une fois, les externes se sont surpassés dans le championnat interuniversitaire du tracé ECG le plus parasité, dans la catégorie reine, celle du patient non parkinsonien de moins de 100Kg.
[Petite précision, après une recherche rapide de retour à la maison : le foie doit être vraiment être grave, ce patient n'a en effet jamais été champion olympique....]
18:37 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)
Dengue de toi.
J’ai trouvé cet article du NYT qui s’intéresse à la recherche afin de trouver un vaccin contre la dengue.
Cette virose, due à un flavivirus est transmise par les piqûres de l’Aedes, un moustique.
La maladie touche environ 500000 personnes par an, notamment beaucoup d’enfants. Même si sa létalité est relativement faible (2.5%), la morbidité occasionnée est extrêmement lourde.
Deux laboratoire qui partagent une même rue de Bangkok travaillent sur le sujet : l’un est financé et dirigé par l’armée américaine, l’autre par Sanofi-Aventis (cocorico).
Pourquoi l’armée américaine s’intéresse à cette virose ?
Tout simplement car elle touche aussi les soldats en opération dans les pays d’endémie.
J’ai parlé de cet article car, vous le savez, j’aime bien les maladies tropicales (ça change de la cardio: drépanocytose et paludisme, dracunculose, trypanosomiase) et j’ai beaucoup aimé les propos des responsables du laboratoire de l’armée américaine.
Des propos, disons… très militaires :
“All we care about is that we get a vaccine that protects soldiers,” said Lt. Col. Stephen J. Thomas, a medical doctor who is director of dengue vaccine development in the Bangkok laboratory. “Fortunately a lot of our concerns are also global health concerns.”
“There’s no dengue in Kansas,” said Col. James W. Boles, the commander at the laboratory. “No malaria, either. That’s why we are here.”
Pendant ce temps, l’OMS compte les points et espère que cette compétition fasse baisser les prix, in fine, afin de rendre accessible ce vaccin à ceux qui en ont besoin.
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By THOMAS FULLER
The New York Times
Published: November 4, 2008
13:13 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)
01/11/2008
L’angoisse de la page blanche.
Lorsqu’un patient ou qu’une famille est très en colère pour une raison dont vous n’êtes pas responsable (c’est un pré requis fondamental !), mais décharge ses nerfs sur vous, ou quelqu’un de l’équipe, tendez lui une page blanche pour désamorcer la situation, et proposez lui calmement d’écrire une lettre au responsable de son courroux.
En général, l’agressivité diminue d’un cran.
Primo, car avec une feuille blanche dans la main, on s’agite moins, et secundo, l’écriture garde une connotation presque magique qui fait réfléchir même les plus déterminés, qu’ils soient « pauci alphabètes » ou non. La crainte pour les premiers, l’application pour les seconds va rapidement calmer leurs ardeurs guerrières.
Par ailleurs, il est difficile de renier une insulte écrite….
Le but de la manœuvre est de faire baisser la pression, absolument pas de tuer dans l’œuf une plainte souvent justifiée.
Toutefois, une fois devant la page blanche, les hurlements de bête sauvage se transforment souvent en babil plein de récriminations atténuées.
J’en ai encore fait l’expérience cette semaine.
La plume plus forte que l’épée, certainement.
18:33 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (9)