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19/08/2008

Grains de sable.

Un jour, j’ai vu un homme en consultation, .

Il a été opéré d’une anomalie rare, toutefois sans être soulagé immédiatement des symptômes qui l’avaient amené à consulter.

Seule l’intervention d’un thérapeute non médical avait permis de l’améliorer, des années plus tard, alors qu’il avait perdu tout espoir. D’ailleurs, il avait consulté ce thérapeute pour tout autre chose.

Nous avons discuté de sa longue quête du mieux être.

Il a été surpris de voir que chaque spécialiste consulté (il en a vu une bonne demi-douzaine) croyait fermement avoir la solution à ses problèmes, notamment le dernier qui l’a opéré.

Il a été aussi surpris de la diversité des avis au sein d’une même spécialité.

Je lui ai alors raconté l’histoire des grains de sable que l’on laisse s’écouler de sa main serrée. Ils tombent en formant un petit tas en forme de cloche. C’est la base expérimentale de la loi normale de distribution, développée notamment par Gauss.

Chaque petit grain de sable est un patient.

Nous savons très bien soigner ceux du centre, très mal ceux de l’extrême périphérie, dont il fait partie.

C’est une grande loi médicale.

Il m’a alors dit que chaque spécialiste essayait de le ramener au centre, au milieu des autres.

Pas faux.

Les médecins, nourris de cartésianisme, admettent rarement de ne pas savoir, de ne pas pouvoir classer un patient. Nous aimerions tous que le tas soit pointu, et qu’il n’y ait que peu ou pas de grains isolés.

Je fais pareil, bien entendu.

Mais j’aime beaucoup m’imaginer (nous imaginer) essayant de ramener nos petits grains de sable au centre, et ceux-ci s’accrochant au terrain, là où ils sont, voire pire, à la tranche de notre paume.

16:49 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (3)

16/08/2008

Publicité directe pour le consommateur.

Vous connaissez ce terme, « DTC » (Direct To Consumer en anglais).

Il s’agit d’une publicité pour un produit de santé, voire un médicament ou un dispositif médical qui s’adresse directement aux consommateurs.

Ce type de publicité est (assez) rigoureusement contrôlée en France, malgré une énorme pression de l’industrie pharmaceutique.

J’ai déjà insisté sur les conséquences désastreuses que pourrait avoir une légalisation de ces pratiques au niveau européen, donc français.

Voir/revoir notamment:

De l’intoxication

Lincoln et son castor

C’est byzantin ou Byzance ?

On nous aurait trompés ?

Il faut faire confiance à l’industrie pharmaceutique

Havidol

 

 

Maintenant, vous voulez profiter des bénéfices apportés par la DTC, mais sans avoir à en supporter les coûts de fabrication.

 

Ce site, et ce site sont faits pour vous.

 

Pour zéro euros, et en quelques minutes, ils vont vous permettre de créer une campagne publicitaire complète.

 

Photobucket

 

 

 

Il ne vous reste plus qu’à mettre votre produit sur le marché !

Ne vous inquiétez pas pour les coûts de recherche et développement, un simple placebo suffira ! Comme pour un certain nombre de médicaments, la publicité est mère de l'efficacité.

Presque aucun rapport avec la phrase précédente, mais toujours drôle et instructif pour peu que l'on se donne la peine de lire le document, je vous conseille de lire les comptes-rendus de la "Commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments". Le dernier en date est ici (pour les gourmands courageux, les derniers sont , pour les non courageux, le rapport d'activité 2007 est pas mal non plus). 

 

 

Découvert via le toujours excellent davidrothman.net.

 

(Les deux sites sont des sites commerciaux que je ne cautionne pas et avec lesquels je n’ai aucune affiliation financière ou autre. Ils profiteront de mes liens hypertextes, mais j’ai jugé qu’il aurait été dommage de vous priver de ces petites merveilles d’ironie.)

 

10:31 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (2)

31/07/2008

Le divin et le médecin.

En général, je n’ai pas trop de problème avec Dieu dans ma pratique courante. Chacun reste sur son quand à soi.

A vrai dire, j’estime qu’Il n’existe pas. C'est dire que Ses pensées et Ses actes me concernant me touchent donc peu.

Par contre, je rencontre des tas de gens qui pensent qu’Il existe.

En général, pas de soucis. Ne pas croire et laisser croire est mon credo.

Sauf pour les témoins de Jéhovah qui me les brisent menu menu menu.

D’abord, je déteste leur attitude, mélange de prosélytisme et de victimisation expiatoire.

Ils ne sont, à ma connaissance, pas pourchassés en France.

N’est pas victime (le nouveau Saint Graal de notre société) qui veut.

 

Un agrégé de cardiologie nous confie un patient tritronculaire (avec notamment un tronc gauche très serré où les globules rouges doivent jouer des coudes pour passer) avec un mauvais ventricule gauche en préopératoire de pontages aorto-coronariens.

Un rendez-vous est pris avec un agrégé de chirurgie cardiaque qui approuve l’opération. Le patient accompagné de sa femme revient de la consultation et demande à me voir.

Ils veulent voir un second chirurgien cardiaque (du privé) qui « aurait une méthode pour opérer sans transfuser ».

Je subodore le problème religieux et l’adresse au chirurgien cité, et son hypothétique nouvelle méthode. Je téléphone au cardiologue qui nous l’a adressé pour éviter les frictions diplomatiques.

Nouvelle consultation, suivie de peu par un courrier assez grandiose dans son genre.

En substance, le second chirurgien (qui est excellent, soit dit en passant) fait son Ponce Pilate et se lave les mains devant le Jéhovah (belle image, n’est-ce pas) et demande des examens complémentaires pour trouver tous les arguments pour ne pas l’opérer. Donc pas de technique miraculeuse "Deus ex machina".

Il fait rentrer le patient dans sa clinique et le confie à ses cardiologues.

Je téléphone donc encore au premier cardiologue (agrégé au CHU, je le rappelle) pour lui éviter l’implosion si il apprend que son patient a été proprement détourné.

 

Difficile à dire qui va avoir raison in fine.

Faut-il le ponter ?

A la limite, la question n’est pas là.

 

Un peu cyniquement, je dirais même que je suis plutôt favorable à ce que certains meurent pour leur religion, à condition qu’ils le fassent tout seuls, proprement et sans embêter personne. Ils sont persuadés de rejoindre leur Créateur qui est tout amour dans un monde meilleur. Pourquoi donc vouloir à tout prix les contrarier ?

 

Dans cette histoire, des croyances religieuses obscures ont interféré avec un processus de décision médicale très loin d’être infaillible (comme l’Autre…) mais qui est au moins pragmatique et basé sur un minimum de preuves.

 

Croyance religieuse obscure. Pléonasme ?

Pas forcément.

Je respecte les croyances car elles font partie du fond culturel de tout un chacun. Bien qu'athée, je ne renie pas le moins du monde mes racines "judéo-chrétiennes" (je rajoute le "judéo", car sans lui, il faut bien dire que notre civilisation serait significativement amputée). 

A mon sens, elles deviennent obscures quand elles se font au détriment de la santé de l’être humain (du croyant ou d'un tiers).

 

Chaque fois, que l’on me parle de ces interactions entre Dieu et le médecin, je cite l’exemple frappant des musulmans qui font preuve d'humanisme en prenant en compte l’état de santé du croyant dans la pratique du Ramadan :

 

 

« L’obligation de jeûner.

Le jeûne de tout le mois est obligatoire pour le musulman en capacité physique de supporter le jeûne, et ce dès l’âge de la puberté. Il est cependant nécessaire d’habituer l’enfant peu à peu à jeûner, pour qu’il en apprenne la pratique progressivement et en acquière le goût.

 

Ce qui est permis

– La piqûre (si ce n'est pas de la nourriture).

– Les médicament (sauf pour l'école shafi'ite). --> point important, à préciser!

 

Dispenses --> selon le rite malekite mais à préciser.

– Le vieillard trop faible, et le malade incurable qui ne peut jeûner, en sont dispensés. Le jeûne pourrait perturber leur santé et l'on n'est pas sûr qu'ilspourraient le rattrapper car ils sont au terme de leur vie. Ils peuvent (mais ce n'est pas obligatoire) nourrir un pauvre pour chaque jour non jeûné (fidya).

– Le malade n’est pas tenu de jeûner. Le jeûne lui est interdit s’il a de la fièvre ou s’il doit nécessairement absorber des médicaments en cours de journée. Quand une maladie se déclare, il est licite de cesser de jeûner. La compensation (qadâ) est dûe.

– Le jeûne est interrompu et compensé (qadâ) plus tard s’il fait courir un danger de mort (ex: déshydratation alarmante dans les pays très chauds).

 

 »

 

(source)

09:10 Publié dans Médecine | Lien permanent | Commentaires (6)